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Un programme d’art brise l’isolement social et facilite le retour au travail

Dessins sur une table de l'atelier de sérigraphie offert à L'Atelier Photo: Caroline Samii-Esfahani/Métro

Dans le quartier de Milton-Parc, l’organisme L’Atelier propose un programme de réinsertion professionnelle de six mois, Transart, qui brise l’isolement social grâce à des ateliers de créations artisanales et un soutien en santé mentale.

En mars, Beatriz Lopez et Isabelle, des étudiantes de respectivement 62 ans et 38 ans, ont célébré, autour d’un dîner festif, la fin d’une aventure qui a rétabli leur équilibre émotionnel et les a remis sur le marché de l’emploi.

«Nager à contre-courant»

Transart a permis à Beatriz de trouver un emploi, de s’assumer en tant qu’artiste multidisciplinaire et de réaliser qu’en fait, depuis trop longtemps, elle «nage[ait] à contre-courant». Cette prise de conscience a été un choc pour la femme de 62 ans, qui se décrit comme de nature toujours dynamique et optimiste.

Deux jours par semaine, Beatriz a suivi les ateliers de connaissance de soi, lesquels l’ont aidée à réaliser qu’elle avait trop longtemps ignoré les signaux d’alarme de son corps.

Beatriz Lopez, 62 ans, artiste multidisciplinaire et participante de Transart Photo: Caroline Samii-Esfahani, Métro

L’accumulation de stress dans sa vie, avec la surcharge de travail, a brûlé celle qui assurait seule les revenus du ménage et le soutien de son mari malade. Le mal-être s’est installé sournoisement.

Un jour d’automne en 2020, elle est immobilisée dans son lit et se retrouve hospitalisée. Après deux jours d’examens médicaux, le verdict tombe: Beatriz a eu une crise de panique et fait une dépression.

Incapable de fonctionner, elle quitte son emploi et se réfugie chez elle avec son mari en convalescence. Elle découvre l’existence de L’Atelier par hasard, sur un babillard, dans son quartier.

Une fois inscrite à Transart, Beatriz doit choisir entre différents métiers d’art offert par l’organisme. Amoureuse de l’art visuel, elle décide de compléter son horaire par la sérigraphie trois jours par semaine.

Retrouver un sens à la vie

«Les ateliers d’arts sont là pour faire du bien, un espace de créativité pour sortir de sa tête, être dans son corps, ses mains, dans le moment présent, dans un cadre social sans pression», explique Claudèle Allali, intervenante psychosociale de L’Atelier. Elle accompagne les étudiants dans leurs défis en santé mentale. Leur encadrement par une dizaine de formateurs qui partagent leurs passions de l’artisanat est propice pour «retrouver une place et un sens à leur vie dans la société» et à son rythme, précise Mme Allali.

À mi-chemin de la formation, les participants suivent un stage qui leur permet de progressivement retourner sur le marché du travail. «L’Atelier, c’est ma joie, ma deuxième maison», déclare Beatriz. Comblée, elle a décroché le poste à temps plein d’adjointe de la boutique de l’organisme, après y avoir fait son stage immersif d’un mois.

Harcèlement et post-partum

«J’ai trouvé des gens qui me ressemblent, aux sensibilités et parcours similaires», confie de son côté Isabelle (nom fictif), mère de trois enfants et participante de 38 ans désireuse de partager son histoire, mais pas son vrai nom.

Il y a trois ans, le harcèlement subit au travail cumulé au post-partum submerge Isabelle, qui tombe en arrêt maladie. Au bout du rouleau, elle compte sur un suivi avec son médecin bonifié d’un soutien psychologique pour remonter la pente. La pandémie perturbera cependant ses espoirs de prendre soin de sa santé mentale dans le secteur public, lui-même au ralenti.

Isabelle, 38 ans, finissante de Transart Photo: Caroline Samii-Esfahani, Métro

«J’étais déjà en bas de mon escalier quand tout s’est éteint, tout s’est fermé, l’école a fermé. Je me suis ramassée avec l’école à la maison», se souvient-elle. Elle puise alors dans ses économies pour rencontrer un psychologue qui la soulage de ses préoccupations.

Avec la fin de la pandémie et le retour à la vie normale, ses enfants ont repris l’école. Isabelle s’est sentie mieux, mais trop fragile pour affronter le marché du travail. Être «payée pour faire de “l’art thérapie”, j’étais très enthousiaste», admet-elle. Émerveillée par les grandes fenêtres lumineuses de L’Atelier, elle s’inscrit et suit, comme Beatriz, l’atelier de sérigraphie.

Au terme de son parcours du combattant de trois ans, elle a retrouvé une routine de vie saine et s’est lancée dans l’entrepreneuriat en enseignement.

L’Atelier, un allié

L’équipe d’artisans formateurs de L’Atelier et Claudèle Allali, intervenante psychosociale (au centre) Photo: Caroline Samii-Esfahani, Métro

L’Atelier existe depuis 52 ans et offre deux cohortes annuelles de formation Transart financées par Services Québec. Ainsi, les participants, jusqu’à 20 par session, bénéficient du statut d’étudiant et reçoivent une allocation d’environ 1390$ par mois. Ils apprennent la création de vitraux, de feutre ou de bijoux, la sérigraphie, la couture, la broderie ou le tissage. En prime, la boutique de L’Atelier vend les créations des étudiants, dont la moitié du prix de vente leur est reversée.

Le maintien de sa santé mentale

Au Québec, 21 000 demandeurs seraient actuellement en attente de soins en santé mentale, déplore Jean-Rémy Provost, directeur général de Relief, dont l’organisme de soutien en santé mentale a vu ses demandes augmenter pendant la pandémie.

Selon lui, personne n’est à l’abri de se retrouver face à des défis en santé mentale, qui mérite d’être autant préservée que la santé physique. Ces défis peuvent se manifester par les signaux suivants:

  • une baisse, voire une perte de contacts sociaux;
  • une routine sociale, professionnelle et économique chamboulée;
  • le stress social – l’augmentation du rythme de la vie, l’hyperstimulation des moyens de communication, l’anxiété de performance –;
  • la baisse d’appétit, de concentration, la négligence vestimentaire, les préoccupations et l’irritabilité.

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