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Violence conjugale: un nouveau portrait «inquiétant» à Montréal-Nord

Violence conjugale Montréal-Nord
Photo: iStock

Alors que Montréal-Nord affiche un taux de violence conjugale deux fois plus élevé que dans l’ensemble de la Ville de Montréal, les services d’aide pour les victimes sont rares et insuffisants. C’est le constat le plus « inquiétant » d’un rapport de recherche commandé par la Table femmes Osez au Féminin.

À Montréal-Nord, on compte « plus de 7 femmes victimes de violence conjugale pour 1 000 femmes, soit presque deux fois plus que dans la ville de Montréal (3,9) », peut-on lire dans le portrait de la violence conjugale publié récemment par l’arrondissement. Près d’une femme victime sur dix rapporte plus d’un événement violent.

Il s’agit bien d’un problème touchant majoritairement les femmes. Elles sont à l’origine de 8 plaintes sur 10 en la matière logées à la police et sont « touchées par des infractions plus sévères ». Près de 63% de celles-ci ont entre 15 et 34 ans. Ces chiffres proviennent des données du SPVM de 2016 et 2017.

Or, ces chiffres ne seraient que la pointe de l’iceberg puisque beaucoup de femmes ne portent pas plainte à la police, selon la directrice de l’organisme Halte-Femmes Montréal-Nord, Sophie Lemay.

« Elles ont peur de la police, des représailles, de perdre leurs enfants », dit-elle en citant ses observations de terrain. Selon elle, ce ne sont que 25% des violences qui sont présentées dans les chiffres de la police.

Disparité

Géographiquement, c’est à l’est de l’arrondissement que les cas de violence conjugale sont concentrés. Le taux de femmes qui en sont victimes est 1,5 fois plus élevé dans le secteur est (9,8 sur 1000) que dans les deux autres secteurs (6,2 sur 1000).

Dans ces secteurs, le taux de monoparentalité est plus élevé et le niveau socioéconomique est plus bas, mais ces caractéristiques ne doivent pas être perçues comme des causes du taux plus élevé de violence conjugale, selon la représentante de la table femmes Osez au féminin de Montréal-Nord, Arianne Hopkins.

L’étude avait été commandée par cette table en 2018. Elle a été réalisée par le projet Trajetvi, qui se spécialise sur l’enjeu de la violence conjugale.

Déficit de ressources

Trajetvi conclut qu’il y a une « rareté » de services puisque l’arrondissement ne compte que deux organisations spécialisées en violence conjugale et aucune maison d’hébergement « de première étape ».

On ajoute que les ressources financières limitées des organismes, les délais d’attente et la géolocalisation des services rendent difficile l’accès aux ressources.

Selon, Arianne Hopkins, le manque de services est une cause du taux élevé de violence conjugale. « Plus il y a de services, plus les femmes se sentent en moyens de quitter la relation violente », explique-t-elle. Elle fait aussi falloir qu’il n’existe pas d’organisme axé sur la prévention.

L’enjeu « central » de la diversité

On note que la clientèle qui fréquente les services des organisations qui interviennent en violence conjugale est « de façon générale », issue de l’immigration et de la diversité culturelle. Ces caractéristiques comportent des enjeux spécifiques quant à la perception de la violence conjugale dans certaines cultures.

« Par exemple, le rejet de la famille et de la communauté à la suite d’un divorce, le parrainage des femmes par le conjoint contribueraient à maintenir les femmes et les enfants dans une situation de dépendance et de contrôle de la part du conjoint, peut-on lire dans l’étude. Les répondant(e)s mentionnent aussi la divergence des perceptions de la violence selon les cultures comme un enjeu avec lequel les femmes ont à composer. »

Pour Arianne Hopkins, cet enjeu devra être « central » dans le plan d’action que doit réaliser la table. « C’est clair que dans la sensibilisation qu’on va faire, il faut prendre le cumulatif des systèmes d’oppression que ces femmes-là vivent. »

Actions à venir

Dans le cadre de la campagne provinciale des 12 jours d’action contre les violences faites aux femmes, huit acteurs, dont l’arrondissement de Monréal-Nord, la Table de quartier et le CIUSSS du Nord-de-l’Île-de-Montréal, ont annoncé qu’ils s’alliaient afin de faire « de la lutte violence conjugale et à la violence dans les relations amoureuses des jeunes une priorité ». Bien que rien de concret n’ait pour l’instant été annoncé, un plan d’action et des annonces sont prévus lors de la prochaine année.

Les enfants témoins

Dans les familles où il y a de la violence conjugale, les enfants y généralement exposés alors qu’ils sont très jeunes.
À Montréal-Nord, près d’une personne sur cinq exposée à la violence conjugale est un enfant de moins de 4 ans. Plus précisément, parmi les témoins de violence conjugale qui ont moins 19 ans ou moins, près d’un sur deux a moins de 4 ans (48,2%).
Selon Sophie Lemay, directrice de l’organisme Halte-Femmes Montréal-Nord, les enfants devront faire partie des domaines d’intervention. « Il faut aller chez les tout-petits qui peuvent vivre des chocs post-traumatiques pour faire en sorte qu’ils ne répètent pas ces comportements », pense-t-elle.

 

Recommandations du rapport

  • Prévenir les violences dans les relations amoureuses dès l’adolescence.
  • Sensibiliser et mobiliser la communauté de Montréal-Nord autour de la problématique de la violence exercée par un partenaire intime.
  • Améliorer les milieux de vie au niveau des communautés locales.
  • Accroître l’offre de services d’intervention psychosociale en violence conjugale et en violence dans les relations amoureuses.
  • Mettre en place des services d’information et d’accompagnement par rapport aux procédures policières et judiciaires.
  • Développer une communauté de pratique en matière de violence conjugale et de violence dans les relations amoureuses dans l’arrondissement de Montréal-Nord.

 

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