Bouchra Klaoua : la maman de Montréal-Nord

Bouchra Klaoua est la maman d’une grande famille. Celle de milliers de jeunes qui sont passés par le Carrefour Jeunesse Emploi de Montréal-Nord (CJE) qui favorise l’insertion socio-économique des 16-35 ans et dont elle est la directrice. Pour son implication, elle a récemment reçu un prix.

«C’est une vraie entrepreneure! Ici, on ne fait pas juste du communautaire, on va plus loin. Bouchra est une innovatrice, elle veut donner une autre dimension à nos actions», affirme Ginella Diaz, agente de liaison au CJE.

Son dynamisme et sa volonté de faire bouger les choses lui ont valu un prix qu’elle a reçu à la fin du mois de mai, celui du Top 20 de la diversité, remis pas Media Mosaïque. Il récompense les citoyens issus de l’immigration qui ont réussi et qui apportent quelque chose à la communauté.

C’est grâce à ses compétences et son esprit entrepreneurial qu’elle en est arrivée là. Elle a eu l’occasion de les développer lorsqu’elle a cofondé la première manufacture de lingerie féminine du Maroc, son pays d’origine, avant de suivre son mari pour le Québec en 1998.

Mais sous sa carapace de femme d’affaires dynamique, se cache une directrice au grand cœur, qui s’occupe de ses jeunes comme si elle était leur mère. «Je les aime ces gamins. Ils ont froid, ils ont faim, je me dis que ce n’est pas de leur faute et qu’il faut leur donner une chance pour qu’ils aillent mieux».

Embûches

C’est en arrivant au Québec que Bouchra Klaoua a entendu l’appel.

Passée par le Centre des femmes de Montréal et par l’Alpa, elle est finalement recrutée au Carrefour Jeunesse Emploi de Montréal-Nord. Un parcours qui ne se fait pas sans peine. «Quand on est immigrant, on doit repartir à zéro lorsqu’on arrive ici, nos acquis passés n’ont quasiment aucune valeur si on n’a pas d’expérience québécoise. Il faut aussi savoir se vendre. Au Maroc, on se ne sait pas faire ça, on ne sait pas ce que ça veut dire, on n’a pas l’habitude», explique-t-elle.

Comme les autres, elle a dû apprendre à mettre ses qualités en avant et aujourd’hui, c’est aussi le message qu’elle essaye de transmettre aux jeunes qui passent par le Carrefour.

Un projet de logement d’accueil

Presque investie d’une mission qu’elle s’est donnée à elle-même, Bouchra Klaoua vit son engagement dans le milieu communautaire comme une réussite, une fierté. «Ça ne me dit plus de travailler dans le privé», lance-t-elle.

«Les retours que j’ai  m’encouragent à poursuivre notre travail», assure Mme Klaoua qui compte bien continuer de voir les choses en grand. «J’aimerais lancer un projet de logement d’accueil d’urgence. Ces jeunes qui se font mettre à la rue, comment pensez-vous qu’ils vont faire pour survivre ? Ils vont aller voir les gangs, vendre de la drogue, etc. Il faut leur donner une autre alternative», raconte-t-elle.

La directrice devra sûrement se battre pour mettre sur pied un tel projet. Loin d’avoir sa langue dans sa poche, elle n’hésite pas à dire que d’après elle, Montréal-Nord ne fait pas assez pour les jeunes du quartier, tout en reconnaissant que les choses sont en train de bouger.

Un engagement quel imagine tenir de son enfance. «Lorsque j’étais petite, ce n’est pas à ma sœur ainée que ma mère confiait mes six frères et sœurs, mais à moi… » Elle avait déjà une sacrée fibre maternelle.