Un sondage douteux sur les professeurs de l’ÉTS
Les étudiants en génie électrique de l’École de technologie supérieure (ÉTS) sont présentement invités à compléter un sondage bien particulier pour évaluer leurs professeurs. L’exercice, qui constitue un essai, propose un choix de réponse qui se limite à «pas du tout» et «tout à fait», sans nuance ou point milieu. La méthodologie est d’ailleurs qualifiée d’insuffisante par le directeur du département.
Le questionnaire, qui comporte quatre portions et une section commentaires se déroule entièrement sur le web. Il a récemment été créé par l’Association étudiante de l’ÉTS (AEETS), parallèlement à l’évaluation de l’enseignement commandée par l’université à chaque session. TC Media n’a pu avoir accès à la totalité du formulaire.
On y retrouve des affirmations comme «l’enseignant ne parle pas trop vite ou trop lentement» et «l’enseignant est dynamique». Il est seulement disponible pour les étudiants en génie électrique, pour le moment.
«Nous avons limité les options de réponse à deux choix pour que les étudiants puissent répondre à toutes les questions d’une façon rapide et pour qu’on ait le plus de participation possible», fait valoir Vincent Larouche, le représentant étudiant de génie électrique à l’AEETS.
Ce dernier explique que la raison d’être du sondage n’est pas de remplacer l’évaluation officielle des professeurs, mais plutôt de servir comme outil de détection de problèmes chez certains d’entre eux.
«Si 80% des répondants disent qu’un prof n’est pas respectueux des étudiants, par exemple, nous organiserons une intervention auprès du professeur. L’avantage, c’est qu’on a accès aux données immédiatement et qu’on peut rapidement intervenir», avance le représentant étudiant de génie électrique à l’AEETS.
Méthodologie
Ce formulaire violerait le principe numéro un d’un sondage, selon la présidente de l’Association mondiale pour la recherche sur l’opinion publique, Claire Durand.
«Il faut respecter le répondant, tranche-t-elle. Il doit pouvoir faire état de son opinion réelle, qui n’est jamais noir ou blanc.»
La spécialiste ajoute qu’une technique valable pour éviter la paresse du répondant est de ne pas avoir de point milieu parmi choix de réponses. Elle réitère toutefois que des options nuancées sont obligatoires pour qu’un sondage soit méthodologiquement viable.
«Ça ne prend pas plus de temps pour choisir parmi quatre options dans un sondage de ce type-là. D’ailleurs, des études ont prouvé que les gens ont moins tendance à répondre quand il y a deux choix plutôt que quatre et que ce sont majoritairement les insatisfaits qui seront portés à participer», révèle-t-elle.
Ouverts à discuter
Alors que Vincent Larouche affirme pour sa part que la méthodologie du sondage est valide «selon ce que l’association a besoin d’évaluer», le directeur du programme de génie électrique de l’ÉTS, Jean-François Bolland, ne croit pas qu’elle soit suffisante.
«On ne pourra pas prendre des décisions uniquement en fonction du sondage, mais il peut venir appuyer des données fournies par l’évaluation officielle», estime-t-il.
Il salue tout de même ce projet de l’association, qu’il qualifie de «belle initiative». Selon lui, si les étudiants revoyaient sa méthodologie dans les années à venir, il pourrait venir jouer un rôle plus important dans les interventions au sein du corps professoral puisqu’il aborde des sujets qui ne sont pas couverts dans l’évaluation que chapeaute l’institution.