Le boulanger boycotté de Westmount reçoit un prix
Le boulanger français de Westmount qui avait subi les foudres d’une cliente anglophone mécontente d’être servie en français au point de faire un appel au boycottage de son commerce en mai dernier reçoit un prix de Mouvement Québec français.
«Des anglos veulent faire fermer sa boulangerie française à Montréal». C’est ainsi qu’avait titré le Journal de Montréal pour raconter la mésaventure de Jérôme Moutonnet, propriétaire de la Brioche Dorée, dans Westmount.
Dans cet article, on expliquait que des anglophones de Montréal menaient sur les réseaux sociaux une «campagne de salissage» pour faire fermer la boulangerie du commerçant, qui aurait eu «le malheur de servir une cliente… en français».
Afin de saluer cet entrepreneur qui s’est «tenu debout», le Mouvement Québec français et la présidente de sa section montréalaise (MQFM), Sophie Stanké, lui ont donc remis ce vendredi le Prix de l’ambassadeur 2023 de la langue française.
Une question de politesse
Arrivé au Québec il y a six ans, Jérôme Moutonnet soutient que ce qui a provoqué ce conflit avec cette dame n’est pas qu’elle lui demande d’être servie en anglais, mais plutôt parce que cette dernière aurait été «malpolie».
«C’est le ton méprisant, désagréable, agressif, limite violent, d’une vieille bique qui a dû passer sa vie à chercher des noises aux autres» qui explique son refus, raconte à Métro le boulanger français.
Ce dernier précise que de servir un client en anglais est une courtoisie, pas une obligation.
Il ajoute que ce qui est inadmissible dans cette histoire, c’est l’appel au boycott que la dame a fait par la suite sur les réseaux sociaux.
Pas la peine de pleurnicher sur l’inclusivité si t’es pas capable de parler français à Montréal!
Jérôme Moutonnet, propriétaire de la Brioche Dorée
Réagissant au premier article du JdeM sur cette histoire, la dame en question – apparemment bilingue – a affirmé de son côté avoir demandé poliment d’être servie en anglais et «n’avoir aucun regret au lendemain de la controverse qu’elle a créée».
Une première
C’est la première fois que le MQFM remet le Prix de l’ambassadeur 2023 de la langue française.
«[Le conseil] a décidé d’honorer les gens qui faisaient de grands gestes […] des citoyens et des citoyennes qui décident de se lever pour le français […] mais qui ne travaillent pas pour la francophonie», explique à Métro Sophie Stanké.
Si ce prix est aujourd’hui remis à Jérôme Moutonnet, c’est que son histoire a entraîné des répercussions et a ravivé médiatiquement le débat sur la langue française, justifie la présidente du MQFM.
Lorsqu’on lui demande s’il n’y a pas quelque chose d’un peu «baveux» de la part du MQFM de remettre ce prix à Jérôme Moutonnet, Mme Stanké rétorque qu’elle admire les gens qui se tiennent debout pour leurs convictions.
Ce n’est pas pour embêter la madame [qu’on lui donne un prix], c’est surtout pour dire merci.
Sophie Stanké, présidente du MQFM
Péril en la demeure
Lors de la remise du prix, Sophie Stanké a déclaré qu’il y avait un incendie à Montréal et que la langue française était en train de mourir dans la métropole.
«Quand on va magasiner, on se rend compte qu’on ne s’adresse plus à nous en français et que le balancement du bonjour/hi au hi/bonjour veut dire quelque chose, raconte la présidente du MQFM. Ça veut dire: non seulement on est bilingue, mais on préfère vous accueillir en anglais en premier.»
Elle y voit un message très fort et il faut s’occuper de ce problème, selon elle.
«La mairesse [de Montréal] ne fait rien pour ça», déplore Sophie Stanké, qui lui reproche entre autres d’écrire ses messages de vœux de Noël et de bonne année dans les deux langues sur les réseaux sociaux.
Lorsqu’on lui demande si ce n’est pas plus inclusif de s’adresser à la population montréalaise dans les deux langues, Mme Stanké répond que c’est un mauvais message qu’on envoie à cette dernière.
«Denis Coderre avait mieux fait au niveau de la langue française», affirme-t-elle.
[La mairesse Valérie Plante] déforme le message. Elle donne l’impression que Montréal est une ville bilingue et qu’on doit presque oublier qu’on est francophones ici. C’est très dangereux.
Sophie Stanké, présidente du MQFM
Sophie Stanké reconnaît que la population a d’autres préoccupations en ce moment, que ce soit l’inflation du panier d’épicerie ou la pénurie de logements abordables, mais la défense de la langue française demeure importante à ses yeux.
«Je ne veux pas qu’on disparaisse parce que soi-disant il faut s’occuper des autres choses, dit-elle. Quand on touche à notre langue, on touche à notre âme.»