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Garantir la sécurité alimentaire pour lutter contre la pauvreté

Photo: iStock, Shih-wei.

La consultation publique en matière de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, qui s’est achevée le 30 juin dernier dans le cadre de l’élaboration du quatrième plan d’action gouvernemental, semble être l’occasion pour plusieurs organismes de remettre la question de l’insécurité alimentaire sur la table.

C’est le cas de la banque alimentaire du Réseau d’Entraide Verdun, qui dénonce une pénurie de services d’aide alimentaire d’accès universel à Montréal.

«La consultation publique sur la stratégie de lutte contre la pauvreté est d’une importance majeure, puisqu’elle est l’occasion unique de sensibiliser le public à la réalité de la pauvreté extrême», explique Rudi Svaldi, directeur communautaire du Réseau d’Entraide Verdun. Ce dernier, avec l’aide de ses bénévoles, a profité de cette période de consultation pour faire la revue des services alimentaires communautaires du Grand Montréal offrant un service d’accès universel. Ce qu’il constate, c’est une pénurie importante de ce type d’organismes à Montréal.

«Sur 200 organismes de bienfaisance enregistrés à Montréal, spécifiquement destinés à soulager la pauvreté, moins de 10% d’entre eux étaient à accès universel», affirme monsieur Svaldi. Les services d’aide alimentaire d’accès universel sont des services offerts sans rendez-vous et sans justificatifs, pour les situations d’urgence. Avec ce type de services, tout le monde peut donc avoir accès à l’aide alimentaire sans en justifier la raison.

C’est ce que propose le Réseau d’Entraide Verdun, qui est situé sur la rue Wellington. L’organisme d’aide alimentaire ne demande aucun document aux personnes se présentant à la distribution de paniers alimentaires chaque lundi. «Quelle preuve faut-il de plus lorsqu’on voit que ces personnes sont prêtes à attendre deux heures pour obtenir un panier d’épicerie ?», demande Rudi Svaldi.

Rudi Svaldi aux côtés de trois bénévoles du Réseau d’Entraide Verdun lors d’une distribution de sandwichs. Photo: Lucie Ferré, Métro.

Un problème de définition

Dans le cadre de la consultation publique, les organisations québécoises étaient invitées à répondre à un questionnaire et à envoyer un mémoire en lien avec la thématique à l’intention du ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale.

Dans le mémoire envoyé par l’organisme d’aide alimentaire de Verdun, plusieurs problématiques ont été soulevées. L’une d’entre elles dénonce la dualité qui persisterait entre la définition d’un organisme à action communautaire et celle d’un organisme de bienfaisance. «Notre organisation se situe à la croisée de deux approches de l’action communautaire. Ce positionnement hybride suscite des interrogations quant à notre identité», explique le directeur communautaire.

Cette dualité se serait manifestée en 2011 lorsque l’enregistrement de l’organisation en tant qu’organisme de bienfaisance a été suspendu par le gouvernement fédéral, car elle avait intégré des cuisines collectives à son service de dépannage alimentaire. Cela avait été perçu comme une divergence à sa mission de bienfaisance enregistrée. «Ironiquement, ce programme était subventionné par la Ville de Montréal, qui voyait l’intérêt d’intégrer les cuisines collectives dans notre approche de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale», peut-on lire dans le mémoire.

Cette dualité donnerait alors aux organismes une perception limitée de leurs actions. «Pour garantir la sécurité alimentaire, il est essentiel de prendre en compte à la fois les aspects à court terme et à long terme de l’urgence alimentaire», croit l’organisme.

Pour Rudi Svaldi, il faudrait pour cela reconnaître l’aide aux démunies, et arriver à relever le défi de la pauvreté extrême en considérant de manière plus poussée les services d’aide à l’urgence alimentaire.

L’enjeu de la pauvreté extrême est plus que jamais d’actualité au Québec. Il faut souligner l’importance de la responsabilité des provinces et des municipalités en matière de lutte contre la pauvreté dans un contexte de crise du logement et d’inflation.

Rudi Svaldi, directeur communautaire du Réseau d’Entraide Verdun.

L’homme se dit tout de même satisfait de la collaboration qu’il a réussi à obtenir avec l’Arrondissement de Verdun dans le cadre d’un projet d’urgence alimentaire visant à développer l’apport en protéine de leur service de paniers alimentaires. Ce projet représente un investissement de 37 000$ pour la municipalité.

«Repenser la solidarité»

Pour Chantal Rouleau, la ministre responsable de la Solidarité sociale et de l’Action communautaire, cette consultation représente l’occasion de repenser la solidarité. «Il s’agit d’un formidable exercice démocratique qui permettra d’influencer le processus décisionnel», a déclaré la ministre.

Contacté par Métro, le réseau des Banques alimentaires du Québec (BAQ) dit également avoir transmis un mémoire dans le cadre de la consultation. Le réseau dessert un panier de provisions à plus de 670 000 personnes chaque mois. Le 7 juillet dernier, l’organisation s’est vue octroyer une aide financière de 20 M$ pour améliorer les infrastructures de son réseau et pour renouveler une partie de sa flotte de véhicules de livraisons.

Selon le réseau, lutter contre la pauvreté passerait par une amélioration du filet social québécois. «Il faut augmenter le pouvoir d’achat des personnes moins nanties grâce à des mesures de redressement de leurs revenus et d’allègement du coût de la vie», peut-on lire dans le mémoire. Pour Martin Munger, directeur général des Banques alimentaires du Québec, il n’est pas normal que des personnes à faible revenu puissent souffrir d’insécurité alimentaire. «Nous sommes dans une société où l’économie roule à fond. Je pense qu’il faut réussir à mieux se partager les richesses», explique-t-il.

Le réseau dit subir une énorme pression causée par l’ampleur du nombre de demandes. En 2022, 62% des organismes du réseau avaient déclaré manquer de denrées.

Une rencontre entre les représentants d’organismes québécois et la ministre Chantal Rouleau en lien avec la consultation devrait avoir lieu au courant de l’automne prochain.

L’insécurité alimentaire en chiffres

  • Selon les données d’un sondage de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) datant de mars 2023, 24 % des adultes québécois vivaient dans un ménage en situation d’insécurité alimentaire.
  • Avant la pandémie, près de 500 000 personnes se rendaient à une banque alimentaire du Québec chaque mois. En 2022, ce chiffre aurait subi une hausse de 33%, selon le dernier Bilan-Faim.
  • Dans son budget 2023-2024, le gouvernement du Québec a prévu 125 M$ pour soutenir les organismes communautaires et renforcer la sécurité socioéconomique des plus vulnérables.

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