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Les adolescentes, doublement discriminées dans les espaces publics?

Les adolescentes de Pointe-aux-Trembles manquent d'espaces conçus pour elles. Photo: iStock - FatCamera

Montrant la double discrimination dans l’espace public des adolescentes de Pointe-aux-Trembles, le court-métrage ADOES est le seul film canadien présenté au festival Visioni urbane (Visions urbaines) à Bologne, en Italie.

Ce petit film a été chapeauté par la directrice de recherche et anthropologue Nathalie Boucher ainsi que par la géographe Sarah-Maude Cossette, dans le cadre du projet de recherche homonyme supervisé par l’organisme Respire, qui est à l’origine du projet.

À travers la vidéo, le court-métrage enchaîne les témoignages de jeunes filles qui parlent de leurs usages de l’espace public, de ce qui leur manque, de leurs inquiétudes et de leurs envies. Dans le cadre du festival, il est disponible pour un visionnage en ligne jusqu’au 4 décembre à 18h.

Le film identifie les espaces publics comme étant les espaces qui ne sont ni la maison ni l’école. L’étude de cas est disponible en ligne et un mémoire a été présenté aux élus de l’Arrondissement.

Double discrimination?

Dans le mémoire, les autrices soutiennent que les jeunes adolescentes sont à la croisée de discriminations «en tant que jeunes» et «en tant que filles». Le mémoire avance que l’espace public a été pensé par et pour les hommes.

Nathalie Boucher explique, en entrevue avec Métro, que les investissements dans les activités sportives sont considérables, et que l’importance accordée à celles-ci fait en sorte que «les besoins de s’asseoir et de parler» sont négligés. Pourtant, l’étude de Mme Boucher montre que les filles aiment jaser entre elles.

Ces activités auraient été délaissées car elles seraient «jugées de façon défavorable», interprète l’anthropologue. «Les femmes le font, donc c’est superficiel», indique-t-elle. Les parcs pointeliers disposent ainsi d’espaces pour les plus jeunes, les aires de jeux, et pour les garçons, de terrains de sport, mais aucun espace pour s’asseoir et parler n’y est aménagé.

Revaloriser la «jasette»

Le film révèle que les adolescentes qui souhaitent parler doivent, dans les parcs actuels, occuper les balançoires des aires de jeux ou les gradins des terrains de sports, et qu’elles doivent quitter ces espaces lors de l’arrivée du public cible de ces lieux.

Nathalie Boucher cite les balançoires musicales du Quartier des spectacles comme un exemple de mobilier qui pourrait plaire aux jeunes filles. Cependant, ces infrastructures sont davantage destinées aux touristes qu’aux adolescentes.

Pour les parcs de Pointe-aux-Trembles et ailleurs au Québec, l’étude avance plusieurs idées, dont l’installation de mobiliers protégés permettant un peu d’intimité, la mise en place d’un Wi-Fi public et la présence de services sanitaires «propres, sécuritaires, bien éclairés et équipés pour les besoins d’hygiène menstruelle».

De Pointe-aux-Trembles jusqu’en Italie

Le projet de recherche et le film sont présentés à l’international, dans cette 3e édition du festival italien Visioni urbane. Le festival se déroule du 24 au 27 novembre, et les films participants sont également projetés en ligne jusqu’au 4 décembre.

Ceux-ci sont soumis au vote du public durant la période de diffusion. Les lauréats de chaque catégorie seront dévoilés le 6 décembre. ADOES est présenté dans la catégorie Visions urbaines.

Le court-métrage et le projet de recherche sont nés d’une réflexion que Nathalie Boucher et l’organisme Respire avaient eue il y a quelques années, alors que durant des ateliers, des jeunes filles de Rosemont s’étaient confiées sur le manque d’espaces où elles se sentaient à l’aise.

Leur étude s’est ainsi axée sur le ressenti de l’inconfort par les jeunes filles plutôt que sur le ressenti de l’insécurité, plus largement documenté. L’objectif est «d’entendre ce [que les ados ont] à dire» en dehors de l’insécurité, précise Mme Boucher.

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