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DALLAS, TX - JUNE 23: Marc Bergevin of the Montreal Canadiens handles draft duties the 2018 NHL Draft at American Airlines Center on June 23, 2018 in Dallas, Texas. (Photo by Bruce Bennett/Getty Images) Photo: Getty Images

Les fans de Canadien sont évidemment nombreux à souhaiter du changement en vue de la prochaine saison. Parmi eux, nombreux sont ceux qui souhaitent non pas du «changement dans la continuité», comme l’espère Philippe Couillard pour sa formation politique, mais du «vrai» changement. Mais du changement, au fond, c’est quoi? Riez pas, je pose la question sincèrement.

C’est pas simple. D’abord, plusieurs philosophes avancent qu’on ne peut plus penser le changement comme au XIXe siècle, c’est-à-dire en fonction d’objectifs précis comme ceux du progrès techno-capitaliste ou des grandes révolutions. Les choses auraient changé. Aujourd’hui, ce qu’on veut et ce qu’on produit comme société, c’est du changement pour du changement. L’historien français des idées Pierre-André Taguieff a même trouvé un nom pour ça: le bougisme.

Vu de même, Canadien fait du bougisme depuis plusieurs années (pensez ici au trade de marde de votre choix qui n’a rien changé au final). Mais est-ce réellement de ce changement dont rêvent les fans pour la prochaine saison? Je ne pense pas.

Puis, il faut savoir qu’il y a un problème philosophique important avec l’idée même de changement. D’abord, soit la chose, l’être ou l’équipe de hockey change complètement et on ne parle plus de changement, mais plutôt de rupture; soit la chose, l’être ou l’équipe de hockey se maintient tel quel et puis, résultat, il n’y a aucun changement. Pour faire savant, on dirait que c’est la pensée de Héraclite contre celle de Parménide.

Je soupçonne Marc Bergevin de s’inspirer du philosophe des sciences Karl Popper, qui a déjà dit que les choses, les êtres ou les équipes de hockey qui changent véritablement ne perdent pas leur identité dans un processus de changement.

Marc Bergevin, lui, est beaucoup plus philosophe que ça, je trouve. Face à cette conception paradoxale du changement, il semble avoir choisi une position mitoyenne qui s’apparente à celle de Philippe Couillard: le changement dans la continuité. À titre d’exemple, il refusait encore récemment d’utiliser le mot «reconstruction», préférant s’en tenir à l’idée d’un changement d’orientation seulement, appliquant même l’idée – sans le dire en conférence de presse – de «l’éternel retour du même» de Nietzsche, en rapatriant Plekanec à Montréal.

En fait, mieux encore, je soupçonne Bergevin de s’inspirer du philosophe des sciences Karl Popper, qui a déjà dit que les choses, les êtres ou les équipes de hockey qui changent véritablement ne perdent pas leur identité dans un processus de changement. L’exemple que Popper donnait souvent était celui-ci: on dit d’une feuille verte qu’elle «change» en devenant brune, alors que, si on substitue une feuille brune à la feuille verte, on ne parle plus de la même feuille, mais d’une rupture.

Ainsi, à suivre le cheminement philosophique de Marc Bergevin, il ne serait pas surprenant de l’entendre se défendre en point de presse cette année, livre de Popper à la main, en disant que Canadien effectue du changement de manière constante puisqu’à domicile, il joue en rouge, et qu’à l’étranger, il joue en blanc. Car changer, c’est être soi-même, autrement.

Ça, c’est du changement à la hauteur de ses compétences de DG.

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