Canadien ira en séries
Vous l’aurez lu ici en premier: Canadien prendra part aux séries éliminatoires 2019-2020.
Ensuite, dans les faits, que ce soit vrai ou pas, on s’en fout. Pourquoi? C’est que les plus grandes encyclopédies de ce monde, tant la prestigieuse Universalis que la pas mal moins fiable Wikipédia, soulignent généralement que la présence est le parfait contraire de l’absence.
Or, la philosophie, qui est toujours là pour penser le contraire du bon sens (la philo me fait beaucoup penser à Benoît Brunet), nous enseigne qu’il y a souvent beaucoup de présence dans l’absence. Je m’explique.
D’abord, je ne suis pas assez con pour croire que Canadien fera vraiment les séries. Non. Ils en seront absents. Toutefois, l’absence est un instrument de mesure de la tendresse ou de l’indifférence qu’on éprouve à l’égard d’une personne, d’un objet ou encore, pourquoi pas, d’un club de hockey; ainsi, l’absence de Canadien en séries fera prendre conscience aux fans de la valeur de leur équipe à leurs yeux.
Évidemment, c’est pas Pierre-Yves McSween qui vous tiendrait pareil discours. Un comptable n’a rien à faire, disons, d’une absence d’argent dans votre compte d’épargne; il vous dira d’en mettre et d’aller le revoir l’an prochain.
Pire, il est impensable pour un comptable qu’une absence d’argent puisse traduire la présence d’un grand bonheur.
Or, fait intéressant, le joueur des Oilers d’Edmonton Zack Kassian, qui a récemment pété la yeule à Matthew Tkachuk après que celui-ci lui eut servi un coup de cochon pas possible, a pourtant l’air très heureux de l’absence de 20 967,74 $ dans son compte, montant que la LNH lui a servi en forme d’amende.
Une tendance à magnifier
Au fond, Kassian me rappelle Marcel Proust; on le sait, les poètes sont des êtres plus sensibles et connectés sur leur cœur plutôt que sur leur REER.
Dans un recueil paru en 1896, avec une préface d’Anatole France (je dis ça de même, mais le best-seller de McSween a été préfacé par Paul Arcand, ce qui donne tout son sens à l’expression «on fait ce qu’on peut avec ce qu’on a»), Proust écrit ceci: «L’absence n’est-elle pas, pour qui aime, la plus certaine, la plus efficace, la plus vivace, la plus indestructible, la plus fidèle des présences?»
Réponse: oui.
Bref, vous commencez à comprendre mon point: il y a beaucoup de présence dans l’absence. Ma seule crainte, c’est que l’absence d’une personne, d’une chose ou d’un club de hockey qu’on aime engendre parfois une tendance à magnifier.
Et comme pour votre ex que vous regrettez d’avoir dompé, dont vous vous ennuyez et que vous magnifiez depuis huit ans, il se peut que, lorsque vous la reverrez, vous vous disiez: epelaille, c’était finalement un bon move.
Bref, si vous prenez pour un autre club que Canadien pendant les prochaines séries, ça se peut que vous ne vouliez plus revenir auprès de lui ensuite. Au pire, le polyamour est tellement à la mode; vous pourrez toujours vous rabattre sur ce concept pour vous justifier d’aimer les deux.