Juste pour rire: une «Annie» terriblement attachante!
À elle seule, l’affiche officielle d’Annie accroche un sourire au visage avec, au premier plan, le minois pétillant du personnage-titre et son adorable perruque rousse bouclée. Bonne nouvelle, le spectacle ainsi annoncé remplit ses promesses et constitue un parfait bonbon estival pour toute la famille.
Juste pour rire renoue avec le plaisir de ses habituelles comédies musicales, trois ans après la réussite de Mamma Mia!. (On ne vous étonnera pas en spécifiant que la tradition avait été délaissée en 2020 et 2021, pour une raison vaguement connue…) Et on aurait difficilement pu trouver opus plus rassembleur qu’Annie pour rallier les troupes en salle et leur insuffler une bonne dose de magie au cœur.
À preuve, 45 000 billets ont déjà été vendus pour les représentations d’Annie prévues jusqu’à la fin juillet à Montréal, puis à Québec à la fin de l’été. Et ce, avant même la première médiatique, qui avait lieu mercredi au Théâtre St-Denis (et qui a été reportée d’une semaine en raison d’une éclosion de COVID-19 dans l’équipe).
Rempli d’espoir
Dès les premiers numéros de groupe, sitôt les premières notes consacrées de C’est une vie d’enfer – une joyeuse ritournelle vivifiante malgré son cruel propos –, poussées par les petites comédiennes-chanteuses interprétant les orphelines de New York dans un ballet de pas parfaitement coordonné, avec leurs chiffons blancs qui volent en l’air, on se laisse happer par l’énergie contagieuse qui ne se démentira pas de toute la prestation. Plus tard, la pleine d’espoir Demain, aussi facilement identifiable à l’univers d’Annie, ravit également.
La pièce québécoise reprend bien sûr la trame exploitée sur les planches de Broadway et d’ailleurs essentiellement connue grâce au film de 1982 de Jean Huston (ici, l’œuvre est adaptée de la mouture scénique de 1977 dont le livret est signé Thomas Meehan, et les paroles et la musique, Martin Charnin et Charles Strouse): en 1933, au cœur de la Grande Dépression, la débrouillarde petite Annie désespère de retrouver son papa et sa maman, coincée dans un orphelinat où règne en tyran la détestable Miss Hannigan (Geneviève Alarie), cette dernière allant jusqu’à faire faire du ménage en pleine nuit à ses ouailles. Lorsqu’un milliardaire (David Savard), soucieux de redorer son image publique, invite une orpheline à passer une semaine chez lui, c’est Annie qui est choisie, et une complicité naîtra entre l’homme et sa nouvelle protégée.
Annie s’adresse à un public de tout âge. Les bambin.e.s craqueront pour l’histoire très bon enfant, réconfortante comme n’importe quel classique américain. Se réjouiront des scènes d’orphelinat et de leurs chorégraphies bien rodées, où les dégourdies fillettes sans parents se taquinent allègrement.
Évidemment, l’audace de la petite Annie, intelligente, frondeuse, optimiste malgré le triste sort qui est le sien, envoûte. L’emblématique gamine est formidablement interprétée par l’attachante Kayla Tucker, dont le charisme est à tout casser. La benjamine de la bande de petites filles, Molly (jouée en alternance par Juliette Aubin et Arielle Lalonde), est également à croquer avec ses répliques spontanées et inattendues.
Les adultes, connaissant ou pas avec le récit, apprécieront la relecture toute locale et ses blagues adaptées (accent bien québécois inclus!). Ils remarqueront la mise en scène maîtrisée d’un Serge Denoncourt allumé, qui, on le devine, a dû en découdre à plusieurs reprises en répétition avec cette bande de petites artistes pour la plupart sans expérience (Raphaëlle Morissette, fille de Véronique Cloutier et Louis Morissette, et Alice Déry, fille d’Élyse Marquis, sont de la distribution)… et la chienne Sandy (Chloée dans la «vraie» vie, bien sage lors de ses apparitions!).
Moyens d’envergure
Juste pour rire a toujours su allouer les moyens de grandeur nécessaires à l’envergure de ses comédies musicales, et Annie ne fait pas exception, avec ses décors évoquant tantôt un dortoir de pensionnat, tantôt les ruelles new-yorkaises, tantôt la maison majestueuse du milliardaire Warbucks, parfois appuyés de projections. Les chansons originales traduites en français (œuvre de Serge Denoncourt et Manuel Tadros), et les costumes et coiffures d’époque savamment détaillés ajoutent à l’ensemble. C’est un beau voyage dans le temps (on parle ici et là du président Roosevelt ou d’autres références à l’époque) qu’on nous propose.
David Savard en impose en homme d’affaires juste assez parvenu, mais sympathique. Véronique Claveau (Grace Farrell), Kevin Houle (Rooster), Émily Bégin (Lily St-Régis) et Éloi Archambaudoin (Drake) tirent bien leur épingle du lot. Le jeu des acteur.trice.s est parfois caricatural, notamment celui de Geneviève Alarie en Miss Hannigan, ce qui ne constitue pas nécessairement un défaut dans ce type de contexte très familial, quasi proche de la bande dessinée (ce qu’était d’ailleurs Annie à l’origine).
Certes, comme toutes les productions du genre, Annie ne donne pas dans la concision; le spectacle dure 2h45, incluant l’entracte. On sent dès le départ que certains tableaux s’installeront peut-être longtemps.
Mais c’est tellement un doux moment qu’on passe avec Annie et les siens, tellement un mignon baume qui nous ramène tout droit en enfance qu’on ne saurait adresser le moindre reproche à ce petit bonheur touchant et sans prétention.
Annie tient l’affiche du Théâtre St-Denis jusqu’au 31 juillet, puis se déplacera à la salle Albert-Rousseau, à Québec, dès le 12 août. Hahaha.com pour informations.
Voyez, ci-dessous, nos photos du tapis rouge de la première d’Annie, qui avait lieu mercredi au Théâtre St-Denis:
Quelques faits amusants sur Annie
– Selon le journal New York Times, la pièce Annie est produite en moyenne de 700 à 900 fois par année à travers les États-Unis;
– La comédie musicale a été traduite dans plus de 28 langues à travers le monde et a été jouée dans 34 pays différents;
– Sarah Jessica Parker compte parmi les actrices ayant incarné le rôle-titre à Broadway;
– Le film Annie, sorti en 1982, célèbre ses 40 ans cette année… comme le Festival Juste pour rire qui présente le spectacle à Montréal cet été;
– Juste pour rire a reçu plus de 500 candidatures de fillettes qui espéraient jouer le rôle d’Annie sur scène. Pour la version cinématographique américaine de 1982, c’est 8000 petites filles qui avaient auditionné pour enfiler la désormais célèbre perruque bouclée de l’attachante petite orpheline!