Montréal-Trudeau: des mesures encore laxistes?
Malgré la mise en place de mesures spécifiques pour éviter la propagation du coronavirus, le contrôle des passagers qui franchissent les portes de l’aéroport Montréal-Trudeau laisserait toujours à désirer. Plusieurs voyageurs interrogés par Métro s’étonnent du manque de suivi des autorités sanitaires.
«À l’aéroport, c’était tellement facile. Tu passes comme d’habitude. Je n’ai jamais franchi les douanes canadiennes aussi facilement », avoue Carole Goudreault, revenue d’Indonésie le 29 mars.
Il y a deux semaines, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, avait fait part de son mécontentement par rapport au manque d’efforts du fédéral à Pierre-Elliott-Trudeau. Alertée, elle avait mandaté la Santé publique régionale afin de sensibiliser les voyageurs à leur arrivée au pays. Des équipes avaient été déployées sur place afin de rencontrer les voyageurs.
Depuis, ces équipes ont quitté l’aéroport.
La semaine dernière, Ottawa a déclenché la Loi sur la mise en quarantaine, ce qui lui permet d’imposer des amendes salées aux voyageurs qui font fi des directives d’isolement. Or, selon plusieurs voyageurs, aucune mesure de suivi n’a été imposée à leur arrivée dans la métropole.
«Ça s’est fait très rapidement», indique Catherine Courchesne, qui est arrivée de Thaïlande le 19 mars. À aucun moment lui a-t-on demandé de fournir une adresse de quarantaine ou un numéro de téléphone.
«Je me disais qu’ils allaient vérifier que je me rendais à l’adresse où j’étais censée être. Ils ne m’ont même pas demandé de numéro.» – Carole Goudreault, une voyageuse
«Échantillon aléatoire»
Actuellement, c’est l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) qui s’assure, en collaboration avec l’Agence de santé publique canadienne, que les voyageurs ne présentent pas de symptômes
Le suivi promis par le premier ministre Justin Trudeau la semaine dernière se fait de façon aléatoire.
«Depuis le 25 mars 2020, les personnes entrant au Canada peuvent être tenues de remplir un formulaire de coordonnées avec leur numéro de téléphone ou leur adresse électronique, ainsi que l’adresse où elles s’isoleront», indique la porte-parole principale de l’ASFC, Rebecca Purdy, dans un courriel.
La distribution de masques n’est faite qu’aux personnes présentant des symptômes. La prise de température serait inefficace, selon l’organisme gouvernemental.
«Lors de l’épidémie du SRAS, 2,3 millions de voyageurs ont été contrôlés à l’aide de scanners thermiques [dans les aéroports canadiens]. Malgré cet effort de dépistage intensif, aucun cas de SRAS n’a été détecté en utilisant ces méthodes», rappelle Mme Purdy.
Au Canada, les voyageurs asymptomatiques se voient donner un feuillet d’information par les agents de douane. Ils peuvent prendre l’autobus, le taxi ou le métro pour retourner chez eux.
La directrice régionale de la Santé publique, qui assure un contact avec l’ASFC, soutient que les douaniers sont «très actifs» malgré une baisse importante de l’achalandage à l’aéroport.
Le professeur Benoit Barbeau invite l’Agence des services frontaliers à considérer «tous les voyageurs comme potentiellement porteurs».
D’autres aéroports plus restrictifs
Les voyageurs interviewés par Métro ont généralement eu à faire face à des mesures beaucoup plus strictes dans les aéroports internationaux d’où ils provenaient. Kent Aubichon et Maryse Rouxel en ont été témoins avant leur retour, le 22 mars.
«Ils prenaient ça beaucoup plus au sérieux en Guadeloupe», affirme M. Aubichon.
À Montréal, «on nous a donné un papier. C’est la seule chose qu’il y avait de différent par rapport aux années passées», constate celui qui voyage régulièrement.
Manuel Gingras, qui a mis le pied à terre mardi, a eu les mêmes commentaires. «Nous avons faits cinq aéroports. Dans ceux d’Asie, tous les employés portaient des masques et les voyageurs avaient l’obligation d’en porter. Ce qui n’était pas le cas aux États-Unis ni à Montréal», écrit-il à Métro.
Le cabinet du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Bill Blair, maintient d’ailleurs qu’il «examine toutes mesures supplémentaires qui pourraient être nécessaires».
«Depuis la fin janvier, l’ASFC a mis en place des mesures de contrôle frontalier progressivement plus restrictives dans certains aéroports internationaux», nous a-t-on indiqué par courriel.