Évictions: connaissez-vous vos droits comme locataire?
Alors que le nombre d’évictions pour subdivision, agrandissement ou changement d’affectation de logement a continué d’augmenter cette année, la Ville de Montréal lance une campagne de sensibilisation sur ses réseaux sociaux pour informer les locataires de leurs droits et des ressources à leur disposition.
En effet, non seulement les locataires peuvent contester un avis d’éviction, mais ils ont droit à trois mois de loyer et à une indemnité pour les frais de déménagement, peu importe s’ils consentent ou non à l’avis.
De plus, le propriétaire est dans l’obligation de fournir un avis écrit indiquant clairement la date, le motif de l’éviction et le projet envisagé, au moins six mois avant la fin du bail. Quant aux évictions pour des travaux de rénovation, elles sont illégales.
Voici quelques-unes des informations présentées dans la campagne de sensibilisation. Or, plusieurs ménages ne les connaissent pas nécessairement.
Pour la porte-parole du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), Véronique Laflamme, il est très positif que la Ville de Montréal fasse une telle campagne de sensibilisation alors que la saison des reprise de possession notamment bat son plein. «Il est extrêmement important que les locataires sachent qu’ils et elles ont des droits. En méconnaissance de cause des locataires acceptent trop souvent des demandes injustifiées ou ne recevront pas les compensations auxquelles ils et elles auraient droit», ajoute-t-elle.
Surchauffe immobilière à Montréal
En plus d’informer les Montréalais des ressources disponibles, la campagne rappelle aux locataires l’importance de bien se protéger alors que le manque de logements abordables demeure criant dans la métropole, les hausses de loyer ayant atteint des records dans les dernières années.
Cet appel à la vigilance est d’autant plus important qu’il survient dans un contexte où Montréal fait face à une surchauffe immobilière et à une explosion des prix de vente, ce qui a pour effet d’encourager les achats spéculatifs et les stratagèmes associés aux «flips» immobiliers.
Selon les données du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ), 44% des tentatives d’éviction sont faites par des propriétaires ayant acquis l’immeuble depuis moins d’un an.
De plus en plus de débordements et de stratégies douteuses pouvant porter atteinte aux droits des locataires surviennent fréquemment, déplore le responsable de l’habitation et vice-président du comité exécutif de la Ville de Montréal, Benoit Dorais. «Nous demandons aux propriétaires résidentiels de respecter les règles en matière de droit du logement. C’est ce que la vaste majorité fait, mais une minorité de récalcitrants causent de grands dommages dans la vie des gens», déclare-t-il.
En faire plus…
Si les réseaux sociaux sont un bon outil parmi d’autres pour rejoindre la population, Véronique Laflamme estime que ce n’est pas suffisant, d’autant plus que plusieurs locataires à faibles revenus n’ont pas un accès quotidien à internet. «C’est la raison pour laquelle nous demandons au gouvernement du Québec de mener des opérations d’information grand public», poursuit-elle.
Au-delà des campagnes d’information, Mme Laflamme pense qu’il est urgent de renforcer les protections. «Les évictions faites notamment pour le profit contribuent actuellement à l’effritement rapide du parc de logement locatifs encore abordable», souligne-t-elle.
Elle suggère, entre autres, de modifier le Code civil afin que tout propriétaire soit obligé de déposer et de justifier sa demande d’éviction, quelles que soient les circonstances, puis le Tribunal administratif du logement (TAL) vérifie ces projets à posteriori en sanctionnant les propriétaires qui auront malgré tout trahi l’esprit de la Loi.
«Il y a plus d’un an que la ministre de l’habitation [Andrée Laforest] a promis d’étudier la question des évictions frauduleuses… il est temps que Québec mette en place des mesures structurantes», mentionne-t-elle.
Pour se renseigner ou demander de l’aide, il suffit de contacter un comité logement ou une association de locataires. Pour savoir lequel est le plus près de chez-vous consultez la liste.