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Dépistage des ITSS: il faut s’armer de patience dans l’est de l’île

Photo: Archives Métro Média

«Aucune disponibilité». Voilà le message qui s’affiche sur Clic Santé lorsqu’on tente d’obtenir un rendez-vous sans frais, en l’absence de symptômes, afin de passer un test de dépistage des ITSS au CLSC de Saint-Léonard. Le problème est généralisé alors que les résidents de tout l’est de Montréal doivent patienter de longues semaines pour obtenir un rendez-vous de dépistage dans un CLSC.

Lors du premier test de Métro sur le site Clic Santé, le 7 septembre, le premier rendez-vous disponible à Saint-Léonard en clinique jeunesse – donc, seulement disponible pour les 12 à 25 ans – était le 9 décembre. Une semaine plus tard, soit le 14 septembre, plus aucun rendez-vous n’était disponible.

Le délai pour obtenir un rendez-vous sans frais pour le dépistage des ITSS touche la totalité du territoire couvert par le Centre intégré universitaire de santé et services sociaux (CIUSSS) de l’Est-de-l’Île-de-Montréal, lequel compte environ 400 000 habitants. En effet, la situation est la même dans les quatre autres CLSC disposant d’une clinique jeunesse pour les 12 à 25 ans et offrant un service de dépistage: pas de disponibilité avant les mois de novembre ou décembre.

Contacté par téléphone, le CLSC de Saint-Léonard nous redirige vers le site de Clic Santé pour la prise de rendez-vous ou nous propose de nous rendre à son unique créneau sans rendez-vous. Pour les 12 à 25 ans, il est possible de se présenter sans rendez-vous pour se faire dépister les vendredis à partir de 13h. Il faut arriver en avance, nous dit-on, puisque le premier arrivé est le premier servi.

Du côté des 25 ans et plus, qui ne peuvent aller en clinique jeunesse, le CIUSSS de l’Est-de-l’Île n’offre le dépistage des ITSS que dans deux CLSC: celui de Rosemont et celui de l’Est-de-Montréal La prise de rendez-vous pour cette tranche d’âge est impossible sur Clic Santé et les délais d’attente n’ont pu être trouvés par Métro.

Le CLSC Saint-Léonard n’a plus aucun rendez-vous disponible de dépistage des ITSS. Photo: Archives Métro Média

Le manque de ressources en cause?

Le CIUSSS n’a pas souhaité commenter ni les délais ni les raisons de ceux-ci. Il affirme tout de même, dans ses communications avec Métro, avoir revu à la hausse le nombre de créneaux horaires pour les prochains mois, tandis que les 25 ans et plus devraient pouvoir prendre rendez-vous en ligne sur Clic Santé dès la fin du mois.

Du côté de l’organisme communautaire Rézo, spécialisé en prévention et dépistage des ITSS chez les hommes gais, bisexuels, transgenres et queers, le directeur général, Alexandre Dumont Blais, avance que «c’est quand même régulier qu’un manque de ressources [dans le réseau de la santé] temporaire ou durant quelques mois réduise le nombre de dépistages possibles».

«Au Québec, ça prend un infirmier ou une infirmière pour faire un dépistage. On l’a vu avec la COVID, on en manque dans le réseau», explique-t-il. Le CIUSSS de l’Est-de-l’Île est régulièrement aux prises avec un débordement des urgences de l’hôpital Maisonneuve-Rosemont en raison de problèmes de sous-effectifs.

M. Dumont Blais rappelle par ailleurs que le problème du manque de ressources en santé touche la province entière et s’observe dans des services autres que le dépistage des ITSS.

Moins de rendez-vous, moins de dépistages

Les jeunes Léonardois souhaitant faire un dépistage doivent donc choisir entre attendre trois mois, se rendre dans des quartiers plus lointains pour obtenir un dépistage ou aller à l’unique créneau de prélèvements sans rendez-vous.

Comme la population de l’est de la métropole vit pour une grande partie dans des quartiers où les transports en commun sont moins réguliers et efficaces, se rendre à un centre de dépistage dans un autre territoire ou dans une ressource communautaire n’est pas évident pour tous.

«On prône un accès au dépistage simplifié et fréquent et, bien sûr, l’enjeu des ressources du système empêche cela», soutient Alexandre Dumont Blais.

Le manque d’accès au dépistage dans certains secteurs a été observé par l’organisme Rézo. «Nos intervenants ont vu des patients venant se faire dépister au centre-ville avec leur matériel personnel pour travailler sur place afin de ne pas rater leur rendez-vous, car ils habitent dans des quartiers éloignés ou en dehors de Montréal», raconte M. Dumont-Blais.

Des conséquences sur la santé

Le directeur général de Rézo s’interroge sur les conséquences que peuvent entraîner les délais dans le dépistage. «On ne peut prédire ce qui va arriver dans ces trois mois de délai, mais la personne qui veut se faire dépister, elle va peut-être vivre de l’anxiété, va-t-elle arrêter son activité sexuelle dans ce temps-là?».

Alexandre Dumont Blais précise qu’il ne veut pas être alarmiste, mais il souligne qu’il serait possible que la situation entraîne plus de transmissions d’ITSS. Tout en soulignant, avec prudence, qu’une telle hausse dépendrait de plusieurs facteurs, il indique que, dans tous les cas, les longs délais ont un impact négatif sur une bonne prévention en santé sexuelle.

Au Québec, le dépistage des ITSS doit être effectué par un infirmier ou une infirmière, des emplois particulièrement touchés par la pénurie de main-d’œuvre. De plus, la PrEP, un traitement préventif permettant de réduire les contaminations au VIH, n’est toujours pas gratuite au Québec.

Un parcours pour se faire dépister Afin de suivre les recommandations en santé sexuelle et obtenir un résultat de dépistage, certains patients doivent fournir un effort considérable. Métro a constaté qu’il fallait souvent naviguer entre diverses informations contradictoires. Il est difficile de s’y retrouver dans la panoplie de services existants. Le site du gouvernement qui répertorie les cliniques de dépistage en donne un grand nombre, mais ne précise pas lesquelles sont réservées aux 12 à 25 ans. Sur le site, on trouve également des CLSC qui n’ont plus de service de dépistage ou qui ne prennent plus de rendez-vous, sans que cela soit indiqué. De plus, certains CLSC passent par Clic Santé pour la prise de rendez-vous, tandis que, pour d’autres, cela se fait seulement au téléphone.

Un problème localisé Si le problème pourrait être généralisé au Québec, potentiellement à cause du manque de ressources dans le domaine de la santé, les longs délais pour faire un dépistage des ITSS semblent toucher particulièrement l’est de la métropole. Au CIUSSS du Nord-de-l’Île, Métro a été capable d’obtenir un rendez-vous de dépistage la semaine suivante dans les CLSC de Montréal-Nord et de la Petite-Patrie.

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