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Le premier centre communautaire noir à Montréal renaîtra de ses cendres

L'Église où se trouvait le Negro Community Centre, juste avant sa destruction en 2014. Photo: Archives Métro

Un centre qui jumèlera logements abordables et activités communautaires sera développé sur le site originel du Negro Community Centre (NCC), qui a été le premier centre communautaire noir à Montréal.

Le conseil municipal de Montréal a approuvé lundi l’acquisition au cout de 2,175 M$ du terrain vacant au coin des rues Coursol et Canning où se trouvait le NCC, dans la Petite-Bourgogne.

«Le projet n’est pas encore défini», explique en entrevue le responsable de l’habitation au comité exécutif de la Ville, Benoit Dorais. Le nouveau centre sera construit en étroite collaboration avec la communauté noire afin que le projet se concrétise selon sa vision, assure-t-il.

Ainsi, la Ville compte s’asseoir avec des représentants de la communauté au retour des Fêtes pour déterminer les modalités et les activités du centre.

C’est [la communauté] qui va mener, on ne vient pas développer pour elle.

Benoit Dorais, responsable de l’habitation au comité exécutif de Montréal et maire du Sud-Ouest

Le Sud-Ouest et la Ville de Montréal mettront donc leurs ressources techniques et financières à la disposition du Centre canadien pour les Canadien.ne.s Afro-Descendant.e.s (CCAD), la nouvelle appellation du NCC.

De plus, l’administration municipale sera flexible dans l’application des paramètres d’urbanismes, dont la hauteur du futur bâtiment et son empreinte au sol, pour maximiser le potentiel du centre, assure l’élu.

L’échéancier des travaux et les moyens de financement seront déterminés lorsque le projet sera mieux défini, ajoute-t-il.

«C’est comme si on revenait à la maison»

«Notre longue marche vers la maison s’est terminée», se réjouit la vice-présidente du CCAD, Andrea Este.

La nouvelle de l’achat du terrain par la Ville est un grand soulagement pour les membres du CCAD qui luttent depuis des décennies pour préserver l’héritage du NCC, explique celle qui est également la grande nièce du fondateur du centre, le pasteur Charles H. Este.

Il y a eu des tentatives de faire renaitre le centre sous le règne de l’ancien maire de Montréal, Gérald Tremblay. Toutefois, une volonté politique vacillante et des difficultés de financement ont empêché de concrétiser le projet.

«Nous sommes encore en train d’essayer d’assimiler cette incroyable nouvelle», affirme Andrea Este, visiblement émue. «Nous serons à nouveau en mesure de prospérer dans ce lieu qui nous est propre».

Des enfants, assis autour d’une table, tissent à l’aiguille avec l’aide d’une éducatrice du NCC. Gracieuseté de la Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ)/Conrad Poirier.

Désormais, c’est à la communauté de se retrousser les manches, explique pour sa part le président de la Table ronde du Mois de l’histoire des Noirs, Michael Farkas.

Celui qui a fréquenté le NCC comme membre dans les années 80 a confiance que le CCAD et la Ville seront en mesure de concevoir un projet qui répond aux besoins de la communauté tout en respectant l’esprit et la mission du centre.

C’est un maudit beau cadeau de Noël!

Michael Farkas, président de la Table ronde du Mois de l’histoire des Noirs

Centre de mémoire et de documentation, salle de réception, locaux communautaires: Michael Farkas rêve en grand et espère que le nouveau centre perdurera. «C’est pour nos petits-enfants», résume-t-il.

Par ailleurs, il espère que le projet aura une vocation culturelle est très importante en raison du déficit d’espace dédié à la culture noire Montréalaise.

Une histoire riche et tumultueuse

Institution emblématique du quartier – et pour l’ensemble de la communauté noire montréalaise – le NCC était le «poumon» de la Petite-Bourgogne, explique Michael Farkas.

Fondé en 1927, le centre venait en aide aux gens dans le besoin, offrant nourriture et vêtements ainsi que du soutien en matière d’emploi, d’immigration et de logement.

Au sommet de sa popularité, dans les années 50 et 60, le centre était un «pôle d’attraction culturel et communautaire», ajoute-t-il. Des gens venaient de partout, dont des États-Unis, pour s’y rassembler et y voir jouer des musiciens de renom comme Oscar Peterson et Oliver Jones.

Un déclin progressif des activités du NCC mène à sa fermeture définitive en 1993. La réorganisation urbaine de la Petite-Bourgogne dans les années 60 et 70, au premier chef la destruction de logements pour la construction de l’autoroute Ville-Marie, avait entrainé un exode de la population noire vers d’autres quartiers de la Ville.

Un jeune joue au tennis de table au Negro Community Center. Gracieuseté de la Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ)/Conrad Poirier.

Malgré une forte opposition de la communauté et de la Ville, l’église West End Methodist, qui hébergeait le NCC a été détruite en 2014 par son nouveau propriétaire, 9289-5929 Québec inc. Le bâtiment était déjà dans un état de décrépitude avancé, un mur complet s’étant effondré en avril de la même année.

Le promoteur a par la suite tenté d’exploiter le terrain de diverses façons, mais l’Arrondissement du Sud-Ouest refusait de changer le zonage s’il «ne développait pas du logement abordable ou un projet à vocation communautaire», précise Benoit Dorais.

Cet automne, après une transaction immobilière avortée entre deux parties privées, 9289-5929 Québec inc. a finalement accepté de vendre le terrain à la Ville.

Le président de 9289-5929 Québec inc., Paul Sen Chher, n’a pas voulu commenter la vente.

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