Seul
Statistique Canada nous a récemment appris que 33,3% des ménages québécois étaient désormais composés de personnes vivant seules. Ça donne un coup. Et, en toute franchise, j’ignorais qu’on pouvait «composer» un ménage sans avoir ni compagne ni compagnon, ce qui représente en soi un exploit mathématique sans précédent dans l’histoire du monde. Quand vient le temps de normaliser des résultats, la science de l’homme m’étonnera toujours…
De tout temps, on a eu un problème avec ceux et celles qui vivaient seuls. Avec ces figures impaires et imparfaites. Que de mépris pour le vieux garçon et la vieille fille! Celui qu’on présumait asocial et l’autre qui ne pouvait être qu’une «air bête» incapable de se trouver un bon parti. Que faisait donc ce beau monde, tout seul tard le soir, dans le noir? Maintenant, on le sait :
ce beau monde s’emmerdait que le yâbe. Sauf qu’il s’emmerdait en solo plutôt que de le faire en famille. C’était là la seule différence.
Avec ce qu’on sait maintenant et en regardant la courbe qui pointe invariablement vers le haut depuis plusieurs années, il est clair que l’option de la vie en solo est là pour rester. Et je suis convaincu que dans notre nouvelle manière d’aborder le partage des lieux et des airs, les humains en chiffres pairs vont encaisser une baffe en pleine gueule. Que les amitiés choisies vont résolument prendre le dessus sur les familles obligées. Que le voisinage stratégique avec plein de chums sera une activité de plus en plus populaire et que les prochaines décennies seront celles du retour à la ville, près des services à distance de marche. Et ce n’est sûrement pas moi qui vais m’en plaindre.
Quinze années de banlieue – même toute proche – m’auront enseigné au moins un chose : que le temps est long et que tout est loin quand rien ni personne ne bouge autour.
D’ici un an, attendez-moi, je m’en reviens en ville. Pas la peine de vous déranger, je ne prendrai pas trop de place. J’arriverai seul. Et mon chat aussi.
***
Le moment de malaise de la semaine : la journaliste qui essaie tant bien que mal de faire un duplex en direct d’Osheaga et le crétin qui profite du moment en question pour lui faire une bise non sollicitée et parfaitement déplacée. (Le monsieur en question s’est excusé hier soir. C’était bien le moindre.)
L’autre moment de malaise de la semaine : dès que l’événement est devenu viral, on a lu plusieurs commentaires sur les réseaux sociaux qui banalisaient ce geste totalement dégoûtant. Me semble que ça n’est pas compliqué: quand on touche à l’intégrité physique d’une personne, rien ne sert d’en évaluer le niveau, c’est une agression simple et sans équivoque. Parlez-en aux femmes qui se sont fait frôler les seins et les fesses dans le métro, aux enfants qui ont été pris avec un mononcle un peu trop insistant qui leur faisait faire des ti-galops un peu trop longtemps dans un party du jour de l’An… Ça n’a jamais blessé personne, bien sûr. Rien de visible, en tout cas. Ça se passe plutôt en dedans, là où les pansements ne tiennent pas.
***
Depuis jeudi dernier le Théâtre Outremont ne désemplit pas avec la superbe série Les films de ma vie, concoctée par Roland Smith. Bravo! Voilà la preuve que le public se déplace quand le rendez-vous en vaut la peine. Suis allé voir Manhattan de Woody Allen samedi soir et c’était rien de moins que génial. On le rappelle, c’est jusqu’au 3 septembre. Et si on se fait insistants, je suis sûr que Raymond Cloutier, l’animateur de l’Outremont, ne se fera pas prier pour allonger le concept d’une manière ou d’une autre.
***
Vendredi soir, je suis tombé – c’est le cas de le dire … – sur le talk-show animé par Maripier Morin. Dans une entrevue avec Jean-François Breau, en faisant référence à son habitude de montrer des photos de son enfant, elle lui a lancé de but-en-blanc: «Toi, t’es vraiment un père fucking gossant…»
Qui a dit que le français était en net recul au Québec? Genre, ça s’rait fucking down que le monde y continusse à penser de même, tsé…
***
Suggestion aux organisateurs d’Osheaga: l’an prochain, vous devriez déclarer 100% de votre site «Zone VIP». Comme ça, tout le monde pourrait se prendre le selfie entre têtes couronnées…