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Insomnies

Sylvain Ménard

«La nuit, tous les chats sont gris.» J’ajouterai à ça «tous les esprits aussi». Hormis le déficit de sommeil, il y a un prix à payer pour les éveillés de la pénombre: l’angoisse. Ça fait déjà sept ans que je travaille la nuit à la radio et s’il y a une chose que j’ai apprise au cours de ces années, c’est que dans le noir, l’enfant qui sommeille en nous (sans jeu de mots) prend toute la place. Les monstres réapparaissent sous le lit, les ombres recommencent à bouger sur les murs et des hamsters s’invitent dans nos têtes pour nous convier à un éreintant marathon de réflexions.

La nuit, même les plus durs d’entre nous sont fragiles. Toutes les peurs reprennent le dessus, les problèmes deviennent insolubles et la solitude étouffe tout le monde, que vous viviez seul ou pas. La nuit est un isolant de qualité supérieure, qu’on se le dise. Un isolant qui vous donne froid dans le dos.

Étant moi-même insomniaque (et ça empire avec l’âge), je suis fort bien placé pour m’étendre (!) sur le phénomène. Quand, vers 6h du matin, le sommeil finit, enfin, par gagner, il est déjà trop tard, le mal est fait… Peu importe sa durée, ce qu’il reste de la nuit ne suffira pas, tes courbatures seront toujours bien présentes et les intérêts sur ton hypothèque de repos auront encore grimpé. Seul soulagement: les tracasseries ingérables du milieu de la nuit se régleront instantanément dès que tes esprits auront repris un minimum de sens. C’est là l’unique consolation que t’apporte le jour nouveau.

On dit qu’un tiers des gens souffrent de troubles du sommeil. C’est fou, quand je pose la question autour de moi, ça ressemble pas mal plus à 9 personnes sur 10. Mais qu’est-ce qu’on a pu faire au bon Dieu pour dormir aussi mal? Je l’ignore, mais je commence à croire qu’une force supérieure nous en veut en maudit…

Si l’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt, que reste-t-il pour ceux qui dorment mal? Des reprises d’Occupation double à la télé? Demandez-vous pas pourquoi tout va tout croche dans le monde…

Si l’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt, que reste-t-il pour ceux qui dorment mal?

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Je suis tombé sur le cul en constatant à quel point Ken Dryden avait su conserver un bon français en l’écoutant l’autre soir à Tout le monde en parle. Il y a maintenant plus de 40 ans que ce grand monsieur a quitté le Québec et, même après tout ce temps, il est encore capable de donner une entrevue à la télé nationale dans un niveau de langue plus qu’acceptable. Pour ça, il mérite nos plus sincères félicitations. D’autres qui ont passé leur vie entière ici sont incapables de demander un litre de lait au dépanneur du coin.

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Elizabeth May a quitté son poste de chef du Parti vert. Lors de son allocution annonçant son départ, elle a déclaré: «J’attendais de trouver un moment où nous avions remporté du succès avant de partir.» Moi, avoir fait élire seulement trois députés et être allé chercher à peine 6,5% du vote dans un contexte hautement favorable pour faire avancer le discours vert, j’aurais plutôt tendance à garder le profil bas. On souligne, juste comme ça, que les verts avaient recueilli 6,8% du vote en 2008 et n’ont obtenu que deux sièges de plus à la Chambre des communes en huit ans. Pas de quoi pavoiser.

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Écouté et réécouté: A Blemish in the Great Light, le tout nouvel album de Half Moon Run. L’automne nous livre habituellement une pochetée de nouvelle musique. Mais, de mémoire de chauve, je ne me souviens pas d’une aussi belle cuvée que celle de l’automne 2019. C’est maintenant au tour du groupe Half Moon Run d’y aller avec un album qui se positionne dans la zone de l’excellence. Tout, je dis bien t-o-u-t, est bon ici: la musique, les voix (oh, les harmonies, mes amis…), la qualité de l’écriture, la réalisation; c’est à vous visser sur votre sofa. On recommande au carré et même au cube.

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