Aide gouvernementale au Pérou: «Cuzco aurait dû être la priorité»
L’aide gouvernementale canadienne se fait attendre dans la ville touristique de Cuzco, au Pérou. Une Québécoise exige du fédéral qu’il intervienne immédiatement, avant que le manque de nourriture atteigne «les 1000 Canadiens» pris là-bas.
Léa Harvey, 24 ans, est prise dans une auberge du Pérou depuis près de trois semaines. La fermeture des frontières péruviennes l’empêche de rejoindre le Canada.
Tard mardi soir, les autorités policières de Cuzco sont intervenues: confinement obligatoire dans les chambres de l’auberge. Léa se sent «prise en otage» au Pérou et attend de l’aide. «Ici, avec les Canadiens, on se sent abandonnés, s’insurge-t-elle. On a beau écrire plein de courriels, aucune réponse. Pourquoi le gouvernement ne vient pas nous chercher à la porte?»
Le ministère canadien des Affaires étrangères a nolisé trois vols d’urgence pour le Pérou en début de semaine. L’un deux est atterri mardi à Toronto. Le hic: tous les avions doivent rejoindre la capitale, Lima.
Or, selon Léa Harvey, ils ne sont pas moins de mille à Cuzco. Et les mesures de confinement actuelles empêchent de rejoindre Lima, qui se situe à 1h25 à vol d’avion.
«À court de nourriture»
Léa Harvey craint même de se retrouver «à court de nourriture». «Les autorités péruviennes nous aident plus ou moins», explique-t-elle au bout du fil.
«Déjà, quand notre situation commençait à être critique, l’ambassade aurait dû nous envoyer à d’autres endroits. Maintenant, si je sors d’ici, je vais en prison.» – Léa Harvey, une Québécoise coincée au Pérou
Sur son site Web, l’Ambassade du Canada au Pérou assure que «les services consulaires restent à la disposition des Canadiens». Cuzco abrite un aéroport international: l’établissement Alejandro-Velasco-Astete. «Mais la priorité, ce n’est plus les avions, relativise Léa Harvey. On a besoin d’aide.» «Il faut que le gouvernement trouve un plan et nous rassure», martèle la résidente de Québec.
Un exercice «compliqué» pour Ottawa
Pour l’experte en relations internationales au Département de sciences politiques de l’UQAM, Michèle Rioux, la dure réalité est qu’Ottawa a une capacité d’action «limitée» pour aller récupérer des gens comme Léa, qui se trouvent à l’extérieur des grands centres.
«Quand des gens ne peuvent pas bouger d’une région à l’autre par eux-mêmes, ça devient compliqué pour un gouvernement d’aller les récupérer. Chaque pays est différent, chaque diplomatie est différente, et c’est très complexe de naviguer là-dedans», explique-t-elle à Métro.
Si les ambassades et les consulats ont «la responsabilité» d’établir des plans d’urgence, ils ne peuvent malheureusement pas tout faire, dit la spécialiste. «Il y a des limites à l’immunité diplomatique de ces organes pour défier certaines régulations. Sa capacité d’intervention n’est pas toujours complète», raisonne-t-elle.
«Je n’aimerais pas être coincée dans des régions pareilles, mais il faut garder en tête que le gouvernement est en train d’essayer de trouver des solutions pour tout le monde.» -Michèle Rioux, experte en relations internationales de l’UQAM
Rejoint par Métro, le ministère des Affaires étrangères, assure faire de son mieux pour rapatrier tous les Canadiens coincés ailleurs dans le monde.
«Même si nous prenons très au sérieux la sécurité des Canadiens à l’étranger, certaines restrictions peuvent être en vigueur dans certaines régions du monde. Par conséquent, des retards dans la prestation des services consulaires et même des interruptions de service peuvent survenir», indique-t-on toutefois.
Des personnes comme Léa pourraient «rester hors du pays pour une durée indéterminée», ajoute-t-on.
Mardi, le premier ministre canadien Justin Trudeau a confirmé le rapatriement de près d’un million de Canadiens la semaine dernière. Ottawa compte dépêcher des vols dans plusieurs autres pays où des Canadiens se retrouvent bloqués.
– Avec Henri Ouellette-Vézina