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Manque de personnel: des psychologues au public crient à l’aide

L'hôpital Notre-Dame
Photo: Josie Desmarais/Métro

Au Québec, un quart des psychologues oeuvrent dans le réseau public, et ceux-ci sont «tranquillement évacués du réseau». Des projections du gouvernement du Québec obtenues par Métro laissent entrevoir des efforts de recrutement «difficiles» dans le secteur.

Porte-parole de la Coalition des psychologues du réseau public québécois, Béatrice Filion a un emploi à temps plein dans le réseau de la santé et des services sociaux. Or, les salaires au public sont si insuffisants, affirme-t-elle, qu’elle fait une journée par semaine dans une clinique privée.

«On sort tous avec un doctorat, dix ans d’études et il y a un clash», souligne-t-elle.

Par-delà les conditions salariales, son organisme milite depuis l’an dernier pour une meilleure reconnaissance de la profession. Cela mènerait selon elle à une meilleure rétention du personnel.

Recrutement «difficile»

Métro a mis la main sur un document déposé en 2018 par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). Intitulé «Portrait de la main d’oeuvre: Psychosocial», il recense les besoins des principaux corps de métier du réseau. On y trouve aussi des projections quant aux besoins en personnel de la profession.

Selon les auteurs du rapport, le réseau public en psychologie a constamment perdu des plumes entre 2013 et 2017. À l’époque, les besoins de recrutement «pour maintenir l’effectif actuel» s’élevaient à 895 nouvelles embauches sur cinq ans, ajoutent-ils.

«Considérant la difficulté d’attraction de psychologues dans le réseau, la situation de main d’oeuvre sera difficile même pour maintenir l’effectif au niveau actuel.» – extrait du rapport du ministère

Les projections du MSSS laissent entendre que le bassin de psychologue restera figé jusqu’en 2025.

«Avec autour de 300 diplômés par année, le bassin de main-d’oeuvre qualifiée semble suffisant pour le recrutement projeté, mais le réseau devra recruter dans une proportion bien plus grande que la proportion […] actuelle de 25% des membres de l’Ordre des psychologues du Québec», peut-on lire.

Attrait et rétention

Béatrice Filion ne se surprend pas de ces données. «Il n’y a vraiment eu aucune mesure pour l’attraction des psychologues», tonne-t-elle. Cette employée du réseau va jusqu’à dire qu’«on aurait besoin que tous les finissants aillent travailler dans le public pour combler des postes».

Cofondatrice de la Coalition des psychologues du réseau public, Catherine Serra Poirier évoque des départs supplémentaires depuis le début de la pandémie de COVID-19. «Je ne pense pas que ça va avoir aidé. Je crains des chiffres encore pires que ce qui avait été prévu initialement», constate-t-elle.

D’après Mme Filion, le CISSS de la Montérégie-Centre, où elle travaille, enregistre en moyenne une année d’attente pour des consultations.

«En ce moment, pour être priorisé dans le réseau, faut que ça n’aille vraiment, vraiment pas bien», indique-t-elle. Alors que la pandémie a exacerbé les problèmes de santé mentale, elle craint que le réseau manque de ressources.

«Les gens en détresse pas urgente, les gens qui commencent à se sentir épuisés, qui sont à risque d’épuisement professionnel, ces gens-là n’auront pas de place dans le réseau rapidement. Ils vont se retrouver à s’endetter pour aller voir un psy dans le privé», signale-t-elle.

Démarches à Québec

Le gouvernement du Québec a amorcé des négociations avec le secteur public à l’automne 2019. Les psychologues y sont représentées par l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), un syndicat qui porte aussi les intérêts d’une cinquantaine de milliers d’employés en soins.

Selon Mme Filion, cela a pour effet de rendre les discussions avec Québec beaucoup plus ardues.

La Coalition des psychologues du réseau public québécois a demandé des représentations au gouvernement pour être mieux entendue. Au centre de ses demandes: une meilleure autonomie professionnelle et une réduction de l’écart salarial avec le privé.

«Un psy au privé, ça coûte en moyenne 100$ de l’heure. Ce n’est pas que la classe défavorisée qui n’y a pas accès.» – Béatrice Filion, psychologue

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