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Never look away: Dialogue entre l’art et l’histoire

Tom Schilling se glisse dans la peau de Kurt Barnet, un personnage inspiré du célèbre peintre allemand Gerhard Richter Photo: Collaboration spéciale

L’histoire de son pays passionne encore le réalisateur allemand Florian Henckel von Donnersmarck. Après son remarquable La vie des autres qui lui a valu un Oscar, place à Never Look Away.

Ce nouveau film se déroule cette fois sous le régime nazi, puis sous le gouvernement communiste en Allemagne de l’Est, alors qu’un artiste (Tom Schilling) cherche à s’affranchir des dogmes du régime.

Le modèle du protagoniste est le célèbre peintre Gerhard Richter, qui n’a pas aimé le portrait que fait de lui ce long métrage.

«Je me suis inspiré d’éléments de sa vie et il le sait, mais l’essence est la fiction, confie en français le cinéaste, joint à Los Angeles en pleine période des Oscars (où son film s’est incliné devant Roma d’Alfonso Cuaron). Je crois en la fiction, qu’elle peut raconter quelque chose qui est plus vrai que les documentaires. On peut éliminer le hasard d’une vie et raconter celle-ci comme elle aurait dû être, pour vraiment représenter toute une époque, l’ensemble d’une idée.»

C’est justement ce que fait le héros, qui réimagine le réel au moyen de l’art. Cette façon de voir les choses lui permet d’ailleurs de s’accrocher au plus près la vérité.

S’il traite des horreurs d’hier (stérilisation et euthanasie de gens jugés «différents», héritage nazi, clivage idéologique), Never Look Away ne peut que nous éclairer sur les problématiques actuelles.

«Je crois qu’un discours sur le passé est seulement intéressant si, en parlant du passé, en fait, nous parlons du présent.» – Florian Henckel von Donnersmarck, cinéaste

«La nature humaine est toujours la même, rappelle le metteur en scène. Je crois que la meilleure façon d’examiner le présent est d’examiner le passé. Parler d’une situation politique de maintenant est toujours difficile. Nos opinions sont très fermes et très fermées. Mais quand je vois un film historique, je suis beaucoup plus ouvert à changer mon opinion sur le présent.»

Il ne faut toutefois pas envisager ce récit épique de plus de trois heures nappé des douces mélodies de Max Richter uniquement sous un angle politique et historique. La beauté, la liberté et la création en sont ses fondements, alors que la souffrance d’un être est sublimée dans la création d’œuvres d’art.

Mais avant d’y arriver, il faut se trouver comme artiste. Une démarche qui peut être longue et fastidieuse.

«C’est une recherche infinie, admet le réalisateur de 45 ans, qui a connu la renommée en 2006 dès son premier long métrage La vie des autres, avant de décevoir les critiques, mais pas le public quatre années plus tard avec son divertissement The Tourist, qui mettait en vedette Angelina Jolie et Johnny Depp. Le monde change et nous aussi. Ce n’est jamais quelque chose de stable et on peut se perdre si on ne continue pas à chercher. »

«En faisant Never Look Away, j’ai passé beaucoup de temps à examiner mes propres convictions sur l’art. Je crois que ça m’a donné confiance en mon propre instinct.»

Never Look Away est en salle vendredi.

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