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Chantier féministe: Réfléchir la place des femmes sur scène

Solène Paré et Ginette Noiseux Photo: Josie Desmarais/Métro
Charlotte Mercille - Métro

L’égalité homme-femme est-elle atteinte sur la scène québécoise? Existe-t-il un double standard dans la sphère publique? Voilà des questions brûlantes qui seront abordées cette semaine à l’occasion du premier Chantier féministe tenu au théâtre Espace Go.

Ginette Noiseux fait ses premières armes au théâtre durant l’âge d’or du féminisme au Québec. À la fin des années 1970, le mouvement bourgeonne au même rythme que l’innovation dans l’art dramatique.

«C’était une époque enthousiasmante où des questions concrètes étaient posées. Puis, le massacre de Polytechnique a donné lieu à des décennies de grande noirceur», relate la directrice artistique du théâtre Espace Go et instigatrice du Chantier féministe.

De nos jours, «c’est plus compliqué d’être une jeune femme qu’à mon époque, croit Ginette Noiseux. Beaucoup d’entre elles ont été élevées par des féministes et confortées dans l’idée que le travail était achevé. Et pourtant, il reste plus de batailles à mener que de victoires à célébrer.»

Ginette Noiseux décèle aussi une double pression sur les femmes d’aujourd’hui. «Leurs mères se sont battues pour leur émancipation sexuelle. Elles ont repris le contrôle de leur corps en se donnant le droit d’avoir plusieurs partenaires sexuels, de choisir quand tomber enceinte et quand avorter. Or, leurs filles portent ce poids, dans la mesure où elles doivent être sexuellement très actives tout en cultivant un intellect béton», observe-t-elle.

«On assiste à une vague sismique dans le mouvement féministe, et ce, hors des murs du théâtre. Les constats sont clairs: dans bien des domaines, les femmes, même si elles ont fait les bonnes études, ne se trouvent pas sur le marché du travail. Le Chantier cherchera à définir les obstacles et les mythes à déboulonner.» –Ginette Noiseux, directrice artistique d’Espace Go et membre du comité directeur du Chantier féministe

Membre de cette génération, Solène Paré entame cette année une résidence de trois ans à Espace Go. Jeune metteuse en scène, elle voit de nombreuses collègues confinées aux petites salles. Leur crédibilité et leur prise de parole sont régulièrement remises en cause, et les postes de direction en création demeurent la chasse gardée des hommes.

«L’ignorance représente la plus grande menace à la cause des femmes. On ne veut pas qu’elles volent le travail des hommes, mais en pensant ainsi, on se prive d’énormément de talent et d’intelligence sur les planches», appuie Ginette Noiseux.

Solène Paré espère aussi discuter de féminisme intersectionnel, c’est-à-dire de l’égalité des personnes subissant d’autres formes de discrimination dans la société, comme le racisme et l’homophobie.

«Les femmes racisées, queer, trans, vivant avec un handicap et toutes les autres personnes marginalisées auront une place à la table. Voilà pourquoi c’était important pour nous d’accueillir des personnalités issues de ces communautés, comme Widia Larivière, du mouvement pour les droits autochtones Idle No More», soutient Solène Paré.

De lundi à jeudi, les séries de tables rondes Les Savantes et de dîners-causeries Les Curieuses se destinent au grand public. Le traitement médiatique des femmes, de la prise de photo aux questions posées en entrevue, est à l’ordre du jour.

L’écriture épicène sera également explorée. Doit-on dire «autrice» ou «auteure»? Que signifie être une femme au Québec? Comment les valeurs inclusives et féministes sont-elles abordées dans l’art actuel?

Les journées de vendredi et de samedi s’adresseront plutôt aux professionnels du milieu théâtral. Avec des spécialistes de l’intelligence collective et du design thinking, ils seront invités à réfléchir sur les problématiques propres au domaine.

De ce débat public, les organisatrices espèrent tirer un rapport qui servira à documenter la situation des femmes dans le milieu du théâtre et des médias.

«Il nous faut un observatoire pour documenter l’évolution du féminisme et l’adhésion à cette cause, réclame Ginette Noiseux. Des statistiques et des pratiques concrètes pourront servir de sources d’information pour remplir des demandes de subvention. Nous souhaitons implanter rapidement les conseils qui émergeront durant le Chantier et déléguer des partenaires à leur mise en œuvre.»

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