Relancer Montréal par la culture
La culture est rarement à l’avant-scène lors des campagnes électorales. Elle devrait pourtant être une priorité de cette élection municipale, selon différents acteurs du milieu culturel qui estiment que la relance de Montréal passera par les arts.
On le sait, la pandémie a mis à mal le secteur culturel. Mais l’heure est à la relance, un mot qui est sur toutes les lèvres cet automne. Quoi de mieux que des événements d’envergure et une offre culturelle riche et diversifiée pour donner un nouveau souffle à la métropole?
Après tout, la culture génère des retombées économiques importantes à Montréal. «Il faut voir la culture comme un levier de développement et non pas seulement comme un secteur gravement touché par la pandémie», soutient la directrice générale de l’organisme Culture Montréal, Valérie Beaulieu.
Ces propos résonnent chez Lorraine Pintal et Charles Décarie, respectivement directrice artistique et générale du Théâtre du Nouveau Monde (TNM) et président-directeur général du Groupe Juste pour rire (JPR).
«On veut contribuer au retour des foules en ville», affirme ce dernier, rappelant qu’en temps normal, un million de personnes fréquentent chaque année son festival.
Bien que la majeure partie des investissements culturels proviennent des paliers gouvernementaux fédéral et provincial, la Ville joue un rôle important, puisqu’elle est un service de proximité.
C’est pourquoi Lorraine Pintal réclame un fonds de relance spécifiquement lié à la pandémie. «Les salles de spectacle, les musées et les lieux de performance en ont vraiment besoin», affirme-t-elle.
M. Décarie abonde dans le même sens. «On a besoin d’un coup de pouce pour relancer les activités culturelles au niveau d’avant. Ça permettrait aux hôteliers, aux restaurateurs et aux commerçants du centre-ville d’en profiter», dit-il, ajoutant que JPR a «pris des risques» en tenant son édition durant l’été.
Métropole culturelle
Il y a trois semaines, Culture Montréal a partagé 40 recommandations s’adressant aux candidats de cette élection municipale. «Toutes ces recommandations servent à conserver notre statut de métropole culturelle d’envergure internationale», souligne Valérie Beaulieu.
C’est connu, Montréal jouit d’une réputation enviable à l’international pour son offre d’activités culturelles et de festivals. Or, dans les 18 derniers mois, cette vitalité a été mise à rude épreuve.
La Ville a du pain sur la planche.
Lorraine Pintal, Directrice artistique et générale du TNM
Par conséquent, les intervenants consultés pour ce reportage estiment qu’il est primordial de s’assurer que Montréal conserve ce statut. Cela passe notamment par l’augmentation du budget du Conseil des arts de Montréal (CAM), qui était de 20 M$ en 2020.
«C’est une priorité pour la prochaine élection, car il s’agit de notre organe pour soutenir les artistes», mentionne Valérie Beaulieu.
«Pour une grande ville comme Montréal, je pense qu’il faudrait doubler le budget du CAM, le tripler serait encore mieux!», avance Lorraine Pintal. Le financement de cette instance permet notamment au TNM de développer des initiatives pour soutenir la relève en arts vivants et de favoriser l’inclusion et la diversité.
La culture, ce n’est pas juste un gros party. C’est un moteur économique à Montréal.
Charles Décarie, Président-directeur général de JPR
Quelques recommandations pour cette élection
L’organisme Culture Montréal a émis 40 recommandations en vue de cette élection. Voici cinq de ses priorités pour Montréal.
Mieux protéger le patrimoine
«Il y a une désuétude à Montréal, les bâtiments se détériorent rapidement et ça coûte de plus en plus cher de les mettre aux normes, se désole Valérie Beaulieu. Il y a très peu de planification et de concertation entre les différents acteurs. C’est pourquoi on recommande de créer une direction du patrimoine à la Ville.»
Créer une ambassade autochtone
Culture Montréal martèle cette demande depuis plusieurs années. Selon Mme Beaulieu, «Montréal comme métropole se doit d’avoir une ambassade culturelle et touristique autochtone». Le projet, nommé DestiNATIONS, permettrait de rassembler et de diffuser en un seul et même lieu l’art actuel des communautés autochtones.
Documenter le manque de diversité
La faible représentation des minorités culturelles dans les projets artistiques fait couler beaucoup d’encre, mais le phénomène est très peu documenté. C’est pourquoi Culture Montréal recommande la tenue d’une étude. «Nous avons besoin d’indicateurs clairs de nos lacunes pour pouvoir nous améliorer», soutient Mme Beaulieu.
Retenir les artistes à Montréal
Malgré les récents investissements alloués aux ateliers d’artistes, «il faut demeurer vigilant», prévient Mme Beaulieu. La pandémie a suscité un exode des artistes, qui trouvent des lieux de création à meilleur prix en campagne. «La Ville doit s’assurer que les taxes foncières des ateliers d’artistes n’augmentent pas constamment», dit-elle.
Bonifier l’offre de tournages
C’est connu, Montréal est prisée pour les tournages de films hollywoodiens, ce qui génère des revenus importants. Afin de répondre à cette demande et de favoriser la croissance de cette industrie, Culture Montréal recommande de doubler la superficie des studios et des lieux de tournage pour ces productions.