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Pascale Bussières face aux fantômes dans «Frontières» 

Photo: JF Galipeau, Métro

Des fantômes dans le cinéma québécois, c’est plutôt inusité comme proposition, mais c’est bien celle du film Frontières de Guy Édoin, présenté en première ce lundi aux Rendez-vous Québec Cinéma (RVQC). 

Après la mort de son père dans un accident de voiture impliquant un chevreuil, Diane (Pascale Bussières) habite seule avec sa fille, Sarah (Mégane Proulx), sur la ferme familiale, située dans les Cantons-de-l’Est tout près de la frontière américaine.  

En plus de vivre difficilement son deuil, elle se sent constamment menacée et se met à croire peu à peu que les lieux sont hantés. S’inquiétant pour sa santé mentale, ses sœurs (Christine Beaulieu et Marilyn Castonguay) appellent en renfort leur mère, Angèle (Micheline Lanctôt), qui réside en Floride. 

Cette prémisse fait-elle de Frontières un film d’horreur? Guy Édoin affirme avoir voulu proposer un long métrage flirtant avec différents genres, tels que le suspense et le fantastique, tout en jouant avec leurs codes, voire en les détournant. 

«J’avais le goût de faire un film qui est très satisfaisant pour le public, qui était généreux, soutient-il en entrevue avec Métro. Je suis quelqu’un qui aime beaucoup le thriller. Mais tout ça, c’est un peu un écran de fumée au vrai drame de Diane.» 

Aux frontières du réel 

Guy Édoin explique que, très vite, Pascale Bussières s’est imposée dans le processus de création de Frontières et dans la vision qu’il avait du personnage de Diane.  

«Je savais qu’on allait plonger dans les abysses de la psyché humaine. C’est pas avec n’importe qui que j’avais envie d’aller là. Après trois films, il y a une relation de confiance qui s’est construite. Je ne voyais pas avec qui d’autre je pouvais aller aussi loin sans fard, sans filet.» 

Le mélange de genres a beaucoup séduit Pascale Bussières à la lecture du scénario, d’autant plus qu’elle trouvait «excessivement» intéressante l’idée de revisiter les mêmes lieux que dans Marécages, tout en changeant l’angle d’approche. 

«C’est intéressant de mêler l’intrigue des fugitifs qui ont traversé la frontière avec le drame psychologique de cette femme qui est à la frontière entre la santé mentale et la folie, entre le réel et le surnaturel, pour se protéger de la brutalité de la réalité.»  

La tendance consistant à mêler plusieurs genres à la fois, aussi observée récemment dans les films Viking de Stéphane Lafleur et Mistral Spatial de Marc-Antoine Lemire, est-elle une manière de rejoindre un plus large public? 

Sans vouloir parler pour les autres, Guy Édoin croit que cette tendance sera de plus en plus présente chez les nouvelles générations de cinéastes. Et s’il aime beaucoup le suspense, le réalisateur a surtout voulu créer une tension dans son film afin de garder le public captif. 

Il faut qu’on laisse les auteurs, les cinéastes avoir de l’audace et qu’on arrête de vouloir aplatir leurs propositions. Il y a beaucoup d’audace à la télé et si le cinéma est plus straight que celle-ci, ça ne va pas bien. 

Pascale Bussières

Un Wild Bunch féminin 

Très tôt dans la création de l’histoire, Guy Édoin a eu l’idée d’une sororité avec des personnages de femmes fortes dans un univers souvent associé aux hommes.  

«Cette volonté était initiale au projet, parce que dans l’histoire du cinéma, les hommes ont eu largement leur place. Mais avant tout, c’était un désir de cinéphile. Un désir de créer cette famille, de créer des femmes fortes.»  

«Ce qui est étonnant, c’est que ce soit un homme qui écrive des rôles de femmes comme ça, souligne Pascale Bussières. Il vient d’une famille où il y avait une grande force du côté des femmes. C’est là-dedans qu’il a grandi, alors naturellement, il veut les représenter comme ça, pour notre plus grand plaisir.» 

Photo: Gracieuseté, Laurence Grandbois Bernard

Avec l’omniprésence des armes à feu et des paysages ruraux, on pense inévitablement au western. Frontières propose donc une sorte de Wild Bunch au féminin, mais avec une histoire plus mélodramatique. 

«Je voulais qu’elles soient badass, mais fragiles aussi», précise Guy Édoin. 

Badass, Christine Beaulieu l’est assurément, notamment dans cette scène où, complètement nue, elle menace avec une carabine un batteur de femmes. Pour Guy Édoin, son personnage représente «l’amazone ultime». 

«Ce sont des personnages très campés, qui ont toute une crise à affronter et qui se solidarisent ensemble pour passer à travers celles-ci», commente quant à elle Micheline Lanctôt, qui a trouvé le scénario «très prenant». 

Guy Édoin, réalisateur de Frontières. Photo: JF Galipeau

Duo mère-fille éprouvé 

Guy Édoin a voulu profiter de la relation de longue date qui existe entre Micheline Lanctôt et Pascale Bussières. Cette dernière considère Micheline Lanctôt comme «sa mère spirituelle» puisqu’elle a commencé sa carrière dans son film Sonatine, en 1984. 

«Il y a quelque chose entre Pascale et Micheline qui leur appartient, que je n’ai pas besoin de créer et qui ne date pas d’hier, raconte Guy Édoin. J’aime aller jouer dans la psyché du cinéma, ce qui a été fait avant, ce que les acteurs portent.» 

«On a une histoire personnelle et professionnelle, parce qu’on a joué souvent ensemble, confirme Micheline Lanctôt. La première fois, c’était la série Belle-Baie, où je jouais sa mère. On était très émues toutes les deux.» 

Se remémorant tous les projets sur lesquels elle a travaillé au cours des dernières années, Micheline Lanctôt soutient que c’est un «vaste privilège». 

Frontières sera en salle à partir du 3 mars. 

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