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«Salt»: la quintessence de Half Moon Run

Le groupe montréalais Half Moon Run, formé de Dylan Phillips, Conner Molander et Devon Portielje, sort « Salt », son quatrième album long. Photo: JF Galipeau/Métro

Salt, tel le sel qui subsiste après avoir fait bouillir un liquide. Dans le cas de Half Moon Run, ce liquide constitue un océan d’idées. C’est ce qui a inspiré le titre du superbe nouvel album du trio montréalais, qui sort ce vendredi.  

De leur processus créatif ont jailli 11 chansons recelant en leur fondement l’essentiel de la musique créée par Devon Portielje, Conner Molander et Dylan Phillips depuis leur entrée remarquée sur la scène indie rock en 2012 avec leur premier album, Dark Eyes. 

Si leur mini-album Inwards & Onwards, paru en pleine pandémie en 2021, en était un de « survie, Salt, c’est la floraison », affirme en entrevue avec Métro le batteur du groupe, Dylan, sous un soleil éblouissant en plein cœur du parc La Fontaine, dans Le Plateau-Mont-Royal

Paru sur la maison de disques BMG, l’envoûtant Salt, serti d’une élégante pochette à l’esthétique des années 1970 montrant le trio sur une berge, prouve en effet que Half Moon Run ne cesse de s’épanouir.  

Salt prouve que Half Moon Run ne cesse de s’épanouir. Photo : JF Galipeau/Métro

Replonger dans une mer d’archives  

Sous les recommandations du réalisateur de Salt, Connor Seidel, que le groupe a rencontré en collaborant à l’album collectif 1969, paru l’an passé, les musiciens ont replongé dans leurs abondantes archives inutilisées des 12 dernières années — l’on parle ici de plusieurs centaines d’enregistrements. 

« On prend tout ce que vous avez fait, chaque petite idée de mélodie, de guitare, d’arrangement incomplète, on fait une liste avec ça et on refait des démos », raconte Dylan en paraphrasant le réalisateur de leur quatrième album long. 

Ils ont ainsi redécouvert des mélodies et des paroles jadis délaissées, n’ayant pas trouvé faveur à leurs yeux à diverses époques. À ces vestiges, ils ont insufflé une vitalité, une touche nouvelle, créant des chansons en phase avec les musiciens qu’ils sont devenus. Autrement dit, le groupe s’est abreuvé de son passé afin de façonner son avenir.  

« Je vois ça comme un cadeau des nous du passé aux nous du futur, illustre Dylan en riant. C’était fou de revisiter toutes ces époques, des temps où on était des personnes tellement différentes. »  

C’est ainsi qu’un motif musical de ukulélé déterré de 2012 a engendré l’enivrante Alco, qui fait résolument honneur aux talents de mélodistes de Half Moon Run, dont il fait toujours si bon de retrouver les harmonies à trois voix et les arrangements atmosphériques. 

Dylan Phillips, Conner Molander et Devon Portielje ont replongé dans leurs abondantes archives inutilisées des 12 dernières années — l’on parle ici de plusieurs centaines d’enregistrements — afin de créer Salt. Photo : JF Galipeau/Métro

Voyage mélodique dans le temps  

De la soixantaine de démos créés, Half Moon Run en a étoffé 24 en studio, pour les réduire aux 11 pièces de Salt. « On a eu un océan de matériel, un océan de temps, mais ça s’est réduit en un mix de tout ce qui nous représente depuis 12 ans », illustre le pianiste classique de formation qui a sorti un mini-album instrumental en 2020, Undercurrents

Le processus avec Connor Seidel, Dylan en parle avec ravissement. « Nos philosophies de travail matchaient. On n’avait pas peur de faire 60 démos parce qu’on aimait le processus. Ce n’était pas comme bloquer un nombre de semaines de studio et en sortir vraiment fatigués. On a dû prendre de six à huit mois, on and off, et on écrivait de nouvelles choses entre les séances de studio. »  

Si plusieurs chansons sont nées de perles enfouies du passé, telles Hotel in Memphis, Dodge the Rubble ou Salt, d’autres découlent (inéluctablement est-on tenté de dire) de la pandémie, comme Everyone’s Moving Out East, Gigafire et Goodbye Cali. Des pièces qui témoignent non seulement des angoisses ayant assailli le groupe à ce moment, mais également d’un besoin d’espoir.  

Ultimement, Dylan ne pourrait être plus heureux du résultat. « C’est la première fois que tout le monde est vraiment content. C’est finalement l’album qu’on voulait faire », affirme le multi-instrumentiste, estimant que ses complices et lui ont atteint le potentiel auquel le groupe aspirait. « Ça fait du bien après 12 années à essayer de le trouver! », lance-t-il en riant. 

Après plus d’une décennie rythmée par de nombreux changements, les trois gars de Half Moon Run, qui ont remporté en 2022 le Félix du meilleur spectacle anglophone de l’année au Gala de l’ADISQ, sont toujours aussi soudés. Photo : JF Galipeau/Métro

Cheminer à trois  

Après plus d’une décennie rythmée par de nombreux changements, les trois gars de Half Moon Run, qui ont remporté en 2022 le Félix du meilleur spectacle anglophone de l’année au Gala de l’ADISQ, sont toujours aussi soudés. 

« C’est comme pour tout bon mariage, on communique bien », dit en anglais Devon Portielje, guitariste et principal parolier du groupe. « You make it work for the children! », s’esclaffe à ses côtés le guitariste et claviériste Conner Molander. 

« Une communication franche et l’écoute sont probablement l’épine dorsale, de sorte que l’on ne laisse pas le ressentiment grandir, ce qui est tout naturel », renchérit paisiblement Devon. 

Au regard de cette longévité, quels défis ont-ils eu à surmonter? « Il y en a plusieurs! pouffe Dylan Phillips. Mais récemment, avec la pandémie, ç’a été de nous questionner sur le futur. » Dans la foulée de l’interruption des concerts, les gars et lui ont « eu peur », avoue-t-il, ce qui les a amenés à s’interroger. C’est à ce moment qu’Isaac Symonds a quitté le groupe.  

Parlant de tournées, le rythme effréné auquel Half Moon Run, qui jouit d’un succès international, a donné des concerts durant des années s’est accompagné de « périodes difficiles, particulièrement de 2013 à 2015 » quand la popularité l’a happé, souligne Dylan. Avant que ne sévisse la pandémie, le groupe avait d’ailleurs « commencé à trouver un équilibre ». 

Si Devon, Conner et Dylan continuent à évoluer ensemble comme musiciens, ils le font également comme personnes, relève le batteur. « On continue d’apprendre les uns des autres. On a tellement changé comme personnes et on est encore capables de s’épanouir ensemble. »  

Et c’est toujours à Montréal — qu’ont adoptée Dylan et Conner, originaires de Colombie-Britannique, et Devon, expatrié d’Ottawa — que la chimie opère et qu’ils ont ancré leur chez-eux auprès de leurs amoureuses. « Je vois ma vie ici, c’est vraiment ma ville préférée », lance Dylan Phillips (qui n’est pas pressé de faire un autre album solo, assure-t-il). 

« Après 13 ou 14 ans, si je vais ailleurs et qu’on me demande d’où je viens, je réponds Montréal, pas de la Colombie-Britannique », dit Conner.  

« Et c’est une province qui soutient les arts en général, renchérit Devon. La scène musicale est formidable. On a été adoptés par les gens du Québec », conclut-il en français.  

Half Moon Run sera en concert le 29 février 2024 au MTelus, à Montréal  

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