Deux Montréal
L’unité de Montréal n’est pas faite. La division entre l’ancienne ville centre et ses anciennes banlieues demeure. Cette division transparaît dans la présente campagne électorale.
Parmi les principaux candidats, Denis Coderre est celui qui courtise de la manière la plus évidente les anciennes banlieues. Ses principaux alliés sont des maires et des conseillers sortants des arrondissements situés en périphérie comme Saint-Laurent et Saint-Léonard. Lui-même est un ancien député de Montréal-Nord.
Ses trois principaux adversaires, au contraire, courtisent principalement les électeurs de l’ancienne ville centre. Richard Bergeron, Marcel Côté et Mélanie Joly incarnent l’urbanité, chacun à leur façon. Leurs programmes sont faits pour plaire à des citadins privilégiant la qualité de vie dans des quartiers denses et bien desservis par les transports publics.
M. Coderre reste seul dans sa catégorie. Ses adversaires ne s’adressent pas à ses électeurs de la banlieue, qui lui sont donc acquis, tandis qu’ils se partagent le vote urbain, réduisant ainsi leurs chances de victoire le 3 novembre prochain.
Cette division est la même qui avait permis à Gérald Tremblay de prendre et de conserver la mairie. Sous sa gouverne, les banlieues ont eu un accès plus important au pouvoir que leur poids démographique. Ses anciens alliés d’Union Montréal ont regroupé leurs forces derrière Denis Coderre et sont en voie de reproduire le même modèle.
En créant une coalition entre son parti (Vision Montréal) et Marcel Côté, Louise Harel cherchait à transcender cette coupure. Il semble que M. Côté, qui devait rallier les électeurs de l’ouest de l’île, ne réussisse pas à livrer la marchandise, même si, théoriquement, l’idée était bonne. Sortir de ce dilemme ne sera pas facile.
La solution pourrait peut-être se trouver dans une modification du mode de scrutin. Si le maire de Montréal était élu dans un scrutin à deux tours, comme pour l’élection présidentielle en France, la diversité des programmes pourrait s’exprimer au premier tour pour forcer, au deuxième tour, un ralliement des électeurs des tiers partis à l’un ou à l’autre des deux candidats restés en lice.
L’un et l’autre de ces deux candidats seraient forcés de courtiser une clientèle différente de celle qui lui est acquise afin de constituer une majorité absolue (plus de 50 % des suffrages) en sa faveur. Il y a fort à parier qu’aucun ne pourrait se cantonner soit dans les anciennes banlieues, soit dans l’ancienne ville centre. Tous devraient chercher des appuis dans les deux territoires, ce qui contribuerait, à terme, à unifier la ville tout en assurant que le pouvoir à la tête de la ville soit mieux distribué entre les banlieues et la ville centre.