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Des végétariens mangent des animaux pour la cause

Photo: Mauricio Handler/National Geographic/Getty
Kieron Monks - Metro World News

La plus récente tendance en matière de cuisine végétarienne? Être sans pitié avec les animaux qui abîment l’environnement.

La charmante ville de Gand, en Belgique, est aujourd’hui un repaire de militants végétariens. Les restaurants n’y servent pas de viande le vendredi, et le marché bio du centre-ville est devenu la base des éco-activistes de tout poil.

Au début de février, le bourgmestre (maire) Daniël Termont s’est présenté au marché et, devant la foule, s’est vu tendre une cuisse d’une oie vivant dans la région et l’a dévorée avec férocité. Les végétariens de Gand ont rapidement suivi son exemple. Cette oie était une bernache du Canada, une espèce qui prolifère dans la région gantoise.

«Ces oies encrassent les eaux, ce qui forme des plaines inondables», explique Lisa Ma, artiste et activiste sociale qui a persuadé la Ville de Gand de collaborer avec elle à son projet sur les espèces envahissantes – et qui a cuit la cuisse de bernache offerte au maire. «Ces espèces modifient l’environnement», affirme-t-elle.

Là où les espèces envahissantes sont cause de nuisances urbaines, la réponse habituelle est l’abattage, une opération coûteuse qui nécessite la mise à mort, puis la destruction de la carcasse de l’animal abattu. Le projet de Mme Ma, lui, sensibilise le public à un enjeu plus vaste.

Les restaurants locaux ont appuyé l’idée, mais ont aussi dû faire face à une certaine résistance. Un propriétaire qui avait mis de l’écureuil à son menu s’est ravisé après avoir reçu des menaces de mort.

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Il reste que celle-ci est de plus en plus populaire. «Il y a 10 ans, nous étions fort peu nombreux, rappelle Joe Roman, un biologiste de la conservation responsable du populaire site EatTheInvaders.org. Aujourd’hui, il existe des initiatives similaires aux États-Unis, en Amérique latine et en Europe.»

M. Roman a lancé son site parce qu’il était exaspéré par les dommages causés par les espèces envahissantes, qu’il s’agisse de la destruction de récoltes par les porcs sauvages ou des ravages des poissons tête-de-serpent dans sa ville natale de New York. Son site guide ainsi la nouvelle communauté, de l’identification d’une population animale problématique jusqu’aux recettes pour l’apprêter. «La rascasse volante est arrivée en Floride dans les années 1980 et s’est mise à dévaster les récifs, explique-t-il. Bien apprêtée, elle fait d’excellents sashimis – sa chair blanche est très délicate.»

M. Roman estime qu’il est dans l’intérêt de tous de puiser dans l’héritage de chasse des États-Unis. «Puis les gens qui ne chassent pas peuvent très bien s’attaquer à des plantes savoureuses, comme le pissenlit et la bardane», ajoute-t-il.

Sur le plan législatif, des initiatives de ce type sont encouragées. L’État du Mississip­pi appuie la pêche intensive de la carpe asiatique, et le Parlement européen réfléchit à des lois visant le contrôle de populations d’animaux non indigènes.

Il existe un large consensus au sujet de la dévastation dont sont responsables les espèces envahissantes, affirme Dr Piero Genovesi, de l’Union internationale pour la conservation de la nature. «Elles sont la principale cause de disparition d’espèces animales et végétales dans le monde, et près de 25 % de toutes les espèces sont aujourd’hui menacées par elles.»

M. Genovesi ajoute que la propagation de ces espèces a augmenté avec la mondialisation et que les changements climatiques peuvent aussi entraîner des modifications, par exemple, en causant l’afflux d’invertébrés en Europe. Mais il estime que la prévention est la solution à privilégier. «Il nous faut des programmes de gestion efficaces, par exemple, des plans de traitement des eaux qui permettent de réduire l’invasion des écosystèmes marins.»

En dépit de ce conseil, l’avenir des «invasivores» (personnes consommant des espèces envahissantes) semble prometteur, cette approche comportant des bienfaits personnels autant que sociaux – en permettant, par exemple, de faire plus d’exercice et de coordonner des actions communautaires. «Je veux savoir comme cela peut fonctionner sur le plan des mœurs, dit Mme Ma. Est-ce qu’on verra un jour des gens chasser des écureuils avec des bâtons en allant faire son jogging au parc?»

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Recette de nachos de rascasse volante

Ingrédients
Préparation : 10 minutes
Temps total : 45 minutes

  • 1/2 tasse d’huile végétale
  • 8 carrés de pâte wonton
  • 1/4 tasse de mayonnaise au wasabi
  • 2 c. à soupe de sauce soya sucrée
  • 2 c. à soupe de sauce chili thaïe sucrée
  • 1 c. à soupe de sauce soya
  • 8 filets de rascasse volante
  • 1 tasse de salade d’algues (vendue dans les marchés asiatiques)

Cinq espèces à traquer

Spot-winged comb jelly over a sand flat Ocyropsis maculata Curacao, Netherlands Antilles
Cténaire

Ayant migré de l’océan Atlantique grâce au transport, cette créature marine s’est rapidement multipliée, constituant à un certain moment 90% de la biomasse de
la mer Noire.
LionfishA
Rascasse volante

Ce prédateur vorace, capable de manger 20 poissons en 30 minutes, a un effet désastreux sur les récifs coralliens. S’étant propagé du Pacifique à l’océan Atlantique, ce poisson dont les épines sont venimeuses est aussi une menace pour les plages fréquentées par les touristes.
ENV-LAKEVICTORIA
Jacinthe d’eau

Cette plante dangereuse a des effets désastreux sur le lac Victoria, dont elle a fini par recouvrir la surface, étouffant les espèces locales, causant des sécheresses et attirant les moustiques porteurs du paludisme.
FERAL PIGS
Porcs sauvages

D’abord observés en Asie, ces porcs détruisent aujourd’hui des cultures aux États-Unis – en particulier dans le sud – et représentent un danger pour les humains. Mais ils sont aussi l’une des espèces envahissantes les plus populaires auprès des amateurs de chasse et de cuisine créative.
feralcatsEDITED
Chats féraux

En Nouvelle-Zélande, ces félins menacent d’extinction plusieurs espèces d’oiseaux indigènes. Ils font aujourd’hui l’objet de l’une des plus importantes campagnes d’abattage au monde.

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