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Un manifeste trop théorique!

La semaine dernière, une coalition de divers acteurs du monde de l’éducation, incluant la Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université et plusieurs associations étudiantes, a fait paraître un Manifeste de l’université québécoise. Comme tous les manifestes, celui-ci présente une vision idéale. Selon les signataires, la mission première de l’université est de préserver la liberté académique, de favoriser la transmission de la connaissance et de la culture, et de permettre le développement de l’esprit critique. Il serait difficile de contester ces valeurs, puisqu’elles ont servi de guides aux études supérieures depuis des siècles. Qui peut s’opposer à la vertu?

Les signataires vont cependant bien plus loin. D’après eux, ces valeurs fondamentales sont en voie d’être remplacées par une vision «économiciste» (sic). Selon le manifeste, ce n’est pas la principale fonction de l’université de former la main-d’ouvre en vue du développement économique du Québec. Son rôle n’est pas non plus de permettre l’enrichissement des individus. Autrement, elle ne serait plus qu’une machine à produire des employés. L’université doit plutôt demeurer un lieu de production de toutes les connaissances – pas seulement des savoirs utiles aux entreprises-, rester indépendante et refuser d’être soumise aux diktats ponctuels des marchés.

C’est malheureux à dire, mais si ce point de vue avait été adopté il y a 50 ans, plusieurs de ceux qui ont écrit ce manifeste ne seraient sans doute pas à l’université. À cette époque, nous étions convaincus, tout comme aujourd’hui, que le développement économique nécessitait une main-d’ouvre qualifiée abondante. Afin de la préparer, les gouvernements ont investi massivement dans les systèmes d’éducation, les universités particulièrement, avec l’accord complet des dirigeants économiques de l’époque.

Ces investissements massifs ont rendu possible la création de l’université publique. Ils ont permis de conserver les frais de scolarité bas et les études accessibles. Sans eux, les universités seraient toujours ce qu’elles étaient auparavant, des institutions dispendieuses réservées aux élites sociales. Grâce à ces investissements, plusieurs ont pu faire des études qu’ils n’auraient pas entreprises autrement, y compris des professeurs d’université (bien payés, au passage!) et des dizaine de milliers d’étudiants, présents et passés.

Étudiants et professeurs ne doivent donc pas oublier  que «l’économicisme» qu’ils dénoncent est ce qui permet l’existence de l’université accessible qu’ils désirent ainsi que nos faibles frais de scolarité. La société investit énormément dans la formation pour que le plus grand nombre de gens possible puissent y accéder. En retour, elle s’attend à un bénéfice concret, sous la forme de diplômés aptes à s’intégrer sur le marché du travail. Et c’est bien d’ailleurs ce que l’université, pour justifier le maintien de ces investissements, lui promet depuis 50 ans.

Pour conserver l’université, il vous faudra conserver aussi un compromis avec les acteurs économiques!

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