L’art de la table continue de séduire les Québécois
Et si les Québécois dépensaient leur ancien «budget voyage» pour embellir leur maison? C’est ce que croit la propriétaire de l’une des dernières boutiques indépendantes vouée à l’art de la table, située rue Gilford à Montréal.
Au téléphone avec Métro, Annick D’Amours se réjouit: l’achalandage à sa boutique indépendante, 3 Femmes et 1 Coussin, est plus élevé que l’année dernière à pareille date. Et ce, malgré les lourdes difficultés qu’a entraîné la pandémie.
Depuis 20 ans, elle et Sandrine Leduc offrent au public une sélection de porcelaine, grès, verrerie et autres accessoires de très grande qualité.
Pour Mme D’Amours, il est clair que les gens investissent davantage dans l’art de la table parce qu’ils sont confinés.
«On a vu un changement drastique. Les gens n’ont jamais été aussi nombreux que maintenant. Tout leur budget voyage va dans la maison. Surtout qu’on y est tout le temps, donc ce qui ne va pas nous saute aux yeux!».
La pandémie a peut-être parallèlement accentué le «besoin d’un rapport avec l’autre», selon elle. Ils cherchent en outre des produits plus «luxueux», dit-elle à Métro.
«L’art de la table, c’est un repas, un partage. C’est pour ça que les gens veulent se retrouver à Noël, retourner au restaurant. Ce sont des retrouvailles entre amis, des célébrations de manger, de recevoir». –Annick D’Amours, propriétaire
Solidité financière et pandémie
On le sait: le contexte n’est pas facile en ces temps de COVID-19. La pandémie a ainsi amputé 3 Femmes et 1 Coussin de 85% de sa clientèle, composée de nombreux restaurants et d’hôtels, du Ritz au Germain.
Elle a en outre ralenti toute la chaîne de production: le transport, la fabrication, les délais.
«Dans le plan d’affaires, tu prends des assurances pour le feu, pour tout, mais personne n’avait pensé à une pandémie, ça c’est évident», note Mme D’Amours.
Et si la boutique n’avait pas été assez «solide» au moment où la première vague a frappé, les choses auraient été bien différentes, poursuit-elle.
«Tout ça serait arrivé il y a 10 ans, je ne sais pas comment on aurait fait. On rapporte de belles histoires de résilience, de nouvelles idées, mais je crois qu’il y a plein de choses qui entrent en ligne de compte. Dont la solidité financière». –Annick D’Amours, propriétaire
La copropriétaire explique avoir dû investir beaucoup de temps pour survivre et rebondir.
«On a refait notre site web et on s’est concentré sur le commerce de détail. On n’est pas comme un café ou une boulangerie, les gens ne viennent pas tous les jours», explique-t-elle.
Le challenge d’être un commerce indépendant
Finalement, pandémie ou pas, être un commerce indépendant comporte tout de même son lot de défis quotidiens.
«Il faut rester en santé, être sur place tous les jours. Il y a des challenges tout le temps». Mais quand on est passionné par ce qu’on fait, «ça paraît», dit-elle, «dans l’énergie et dans l’espace que tu occupes».
Évidemment, la fermeture du magasin Arthur Quentin, anciennement sur la rue Saint-Denis, les a quelque peu aidées.
«C’est sûr que ça a fait venir les gens, on comble un espace vacant, explique Mme D’Amours. Pour moi, c’était une institution. Quand j’étais étudiante, c’était l’une de mes boutiques chouchou, j’allais là-bas et je rêvais».
Pour autant, les deux femmes ont toujours cherché à se différencier et à adopter une approche bien à elles, comme elle l’explique à Métro.
«On aime sortir du cadre parfois formel et proposer des mariages plus créatifs. On fait des tables très élégantes mais joyeuses. C’est un esprit art de vivre qui se retrouve à tous les niveaux: c’est beau, mais on s’y sent bien aussi». –Annick D’Amours, propriétaire
Alors même si la boutique avait la capacité de «pogner» la claque de la pandémie «en pleine face», comme elle le dit, c’est peut-être cet amour palpable pour l’art de la table et leur métier qui les aura surtout permis d’y faire face.