L’UdeM sur le point de renier son expertise?
L’Université de Montréal (UdeM) fera-t-elle la sourde d’oreille face aux recommandations de ses propres experts pour le design de son futur campus d’Outremont? Ironiquement, tout semble pointer dans cette direction.
Rappelons tout d’abord les faits. Le gouvernement Marois confirmait la semaine dernière son appui financier pour la construction du nouveau campus d’Outremont, un méga chantier estimé à 350 M$. Le noyau central de ce projet, le complexe des sciences, s’implantera sur le site de l’ancienne gare de triage d’Outremont et regroupera quatre départements de l’UdeM : celui de chimie, de physique, des sciences biologiques et de géographie. Plus de 2 000 étudiants et près de 200 chercheurs s’approprieront les lieux d’ici 2018.
En plus des pavillons universitaires, le site accueillera 1 300 logements (dont 30 % de logements sociaux), ainsi que divers commerces de proximité. Montréal s’engage même à réaménager des rues et des infrastructures pour le transport collectif afin de redynamiser ce secteur en déclin depuis plusieurs années.
Le projet représente donc beaucoup plus qu’un simple lieu d’enseignement supérieur : on parle carrément de la renaissance d’un quartier et de la création d’un nouveau symbole de fierté pour l’UdeM. Et les dirigeants de l’établissement ne s’en cachent pas : on désire faire rayonner à l’international l’expertise scientifique qu’on y retrouvera d’ici à peine quelques années.
Jusqu’à maintenant, la planification de ce campus a été particulièrement bien gérée, notamment grâce à la tenue de consultations publiques pour assurer un processus transparent et vigilant face aux préoccupations des résidants du secteur. Le paradoxe par contre dans ce dossier, c’est que l’université semble vouloir négliger volontairement les recommandations de ses propres experts pour la suite du processus, c’est-à-dire la phase de conception des lieux.
Il y a quelques mois, le doyen de la faculté d’aménagement, la directrice de l’école d’architecture et de nombreux professeurs ont fortement recommandé à leurs patrons la tenue de concours de design internationaux pour la conception de ce quartier. Des concours qui permettraient d’offrir à nos architectes et à nos urbanistes une chance égale de faire valoir leurs idées, une transparence dans le processus de conception, mais surtout, de s’assurer d’obtenir le meilleur rapport qualité/prix pour 350 M$ d’argent public. On ne parle donc pas ici d’un pur caprice, mais d’un processus logique qui a fait ses preuves partout ailleurs sur la planète.
Mais après avoir vérifié auprès du conseiller principal des relations médias de l’université, cette recommandation ne figure pas à l’ordre du jour. L’idée n’est pas écartée à 100 %, mais elle semble avoir été effacée des priorités. Même son de cloche auprès de certaines sources très au courant du dossier, mais souhaitant garder l’anonymat. Ces dernières soulignent d’ailleurs l’incohérence de l’UdeM qui finance elle-même une Chaire de recherche sur les concours et les pratiques contemporaines en architecture. Comme quoi nul n’est prophète en son pays, visiblement.
Tout de même regrettable qu’un établissement ayant formé des centaines d’architectes, architectes paysagistes et urbanistes ne semble pas comprendre les bénéfices significatifs que pourraient apporter de tels concours internationaux.