Culpabilité maternelle
Riley Harriff, cinq ans et sa petite sœur Maddy, quatre ans, sont heureux. Ils sont équilibrés et réussissent bien à la prématernelle. Malgré tout, leur maman, Roberta, se sent coupable. «Chaque jour, je me sens coupable de travailler autant, voire d’être au bureau, quand je vois toutes ces mères qui restent au foyer, explique-t-elle. Je me sens coupable de ne pas être aussi créative que d’autres mamans. Je me sens coupable de les laisser trop écouter la télé.»
Roberta Harriff, 37 ans, est administratrice des ressources humaines dans une entreprise de Chicago. «Parfois, je me sens coupable parce que d’autres enfants suivent des cours de natation, de danse ou pratiquent d’autres sports, alors que nous n’avons ni le temps ni les moyens pour leur permettre de le faire, ajoute-t-elle. La culpabilité est toujours présente!»
Ses impressions sont peut-être irrationnelles, mais elle n’est pas la seule à les ressentir. «La culpabilité des mères remonte à des temps immémoriaux», affirme la professeure de psychologie Kathy Hirsh-Pasek, de l’Université Temple, et auteure d’Einstein Never Used Flashcards. «Aujourd’hui, poursuit-elle, on s’attend à ce que les mères fassent tout, mais elles n’ont pas nécessairement l’aide de la famille élargie. Et puis l’herbe est toujours plus verte chez le voisin : alors que les femmes au foyer veulent travailler, les mamans au travail veulent rester à la maison, et celles qui travaillent à temps partiel se sentent incompétentes dans leurs deux rôles.»
Cela dit, les mères qui travaillent à temps plein ressentent davantage de culpabilité. «Je passe une heure le matin avec mes enfants, et deux heures le soir avant de les coucher, calcule Mme Harriff. Et ces moments sont passés à manger, s’habiller, prendre le bain… Il est difficile d’avoir l’impression de passer du temps de qualité avec eux dans ce contexte.»
Même si la plupart des études montrent que les enfants dont la mère travaille ne se développent pas différemment des autres, certains résultats alimentent la culpabilité des mères. Plus tôt cette année, une étude a notamment révélé que les enfants dont la mère travaille prennent un kilo de plus par année. Une autre recherche publiée cette année a montré que ces enfants sont aussi plus à risque (200 % plus, en fait) d’être hospitalisés, de faire de l’asthme, de se blesser ou de s’empoisonner.
Il n’y a pas de formule magique pour guérir ces femmes de leur culpabilité, affirme Mme Hirsh-Pasek. «Les meilleures mères sont celles qui font la paix avec elles-mêmes. Si le souper n’est pas prêt à temps, ne vous dites pas que vous avez échoué. Voyez plutôt cela comme une occasion d’enseigner à vos enfants que les humains ne sont pas parfaits et que ce n’est pas grave.»
Raccrochez et débranchez-vous
«Il y a le travail et la maison, tranche Kathy Hirsh-Pasek. Quand vous êtes à la maison, vous devriez pouvoir regarder vos enfants dans les yeux.» Cependant, 34 % des Canadiens possèdent un téléphone intelligent, selon eMarketer. Résultat? Décrocher du travail (ou de Facebook, ou des amis, ou des statistiques sportives) est devenu un défi. Les mères essaient souvent d’envoyer des courriels pendant que leurs enfants mangent ou font leurs devoirs. «Vous devez apprendre à laisser votre téléphone de côté, insiste-t-elle. Autrement, vous signifiez à vos enfants que vos courriels sont pour vous plus importants qu’eux.»