Ai-je vraiment besoin d’une pilule?
Très peu de gens remettraient en question une ordonnance d’antibiotiques. Les antibiotiques modifient essentiellement un important biorégulateur (notre système immunitaire), mais cela ne semble pas poser de problème à la plupart d’entre nous.
Cependant, les médicaments qui régulent nos humeurs ne sont pas acceptés aussi facilement. Les médicaments utilisés en psychiatrie, particulièrement les antidépresseurs, suscitent beaucoup de crainte et de méfiance. Certaines de ces craintes sont fondées, mais une grande partie ne l’est pas.
Je ne suis ni pour, ni contre les médicaments. Ce n’est qu’une option de traitement qui peut et doit être envisagée à l’occasion. En tant que psychologue, je ne prescris pas de médicaments, mais je passe beaucoup de temps à en discuter avec des clients. Parfois, je les incite à demander à leur médecin de faire un essai, ou d’augmenter ou de diminuer une dose, ou d’étudier la possibilité de changer un médicament qui, bien qu’il soit utile, a des effets secondaires indésirables.
Du meilleur au pire, en passant par le «bof…»
En fait, les antidépresseurs sont miraculeux pour certains, ne font pratiquement rien pour d’autres, sont désastreux pour quelques rares personnes, et pour le reste des gens, ils sont utiles à divers degrés. Finalement, la réaction aux antidépresseurs est idiosyncrasique, c’est-à-dire que nul ne peut prédire la façon dont une personne réagira. La seule manière de le savoir est d’en faire l’essai pour voir comment vous, un organisme unique en son genre, y réagirez.
Potentiellement nocif
Chez un très faible pourcentage de personnes, les antidépresseurs peuvent déclencher une crise hypomaniaque, ouvrant ainsi les portes de l’enfer. Cela peut se voir chez les personnes souffrant d’un trouble bipolaire. À ne pas confondre avec la foule de gens qui se disent bipolaires, mais qui sont simplement d’humeur changeante. Le trouble bipolaire est rare, mais les antidépresseurs devraient être utilisés avec précaution, sous une étroite surveillance, par les personnes qui ont des membres de leur famille qui en souffrent.
Miraculeux
Les antidépresseurs transforment la vie de bien des clients. C’est indéniable. Ils font des miracles chez les personnes qui souffrent de dépression ou d’anxiété. Il est particulièrement important d’en faire l’essai auprès des personnes qui sont submergées par l’intensité de leurs émotions, lorsque la thérapie ne procure pas assez de soulagement. Parfois, lorsque le bruit de fond est trop fort, il est difficile de se concentrer sur la conversation. Mais, quelle que soit la gravité de leur état, bien des gens s’en trouvent complètement transformés. Ils ne se mettent plus autant en colère, ils ne sont plus aussi déprimés, ils ne paniquent pas aussi facilement. Chez ces personnes, le changement est spectaculaire. Les médicaments les aident. Point à la ligne.
Ça ne fait absolument rien
Environ le tiers des patients réagit très bien aux antidépresseurs, et un autre tiers en tire quelques avantages. Très bien. Mais le problème est qu’ils n’ont aucun effet chez le reste des patients. On passe souvent d’une variante de la molécule à une autre auprès de ces patients, on augmente la dose, on la diminue et on la combine à d’autres médicaments pour en «activer» les effets. Même s’il ne faut pas baisser les bras trop tôt (j’ai vu bien des gens profiter grandement d’un médicament après ne pas avoir réagi à un autre), cela équivaut parfois à fouetter un cheval mort. Certaines personnes n’y réagissent tout simplement pas.
Ça vaut la peine d’en prendre
Finalement, il y a des gens qui, même s’ils ne se classent pas dans la catégorie des miraculés, tirent de grands avantages de la prise d’antidépresseurs. Ce médicament ne transforme peut-être pas leur vie, mais ces personnes fonctionnent mieux lorsqu’elles en prennent. Dans de tels cas, la question devrait en être une de «coût/avantage».
Les émotions: alliés ou adversaires?
Les émotions sont habituellement nos amies, mais ce n’est pas le cas pour tout le monde. Chez certaines personnes, les émotions sont si intenses qu’elles les contrôlent, les font souffrir et les empêchent de fonctionner normalement. En pareil cas, les médicaments peuvent et doivent être envisagés. Les antidépresseurs aident souvent à ne pas réagir autant aux événements, ce qui permet de mieux équilibrer les émotions.