Les demandes d’aide à la Fondation de la Visite explosent
L’organisme Fondation de la Visite n’arrive plus à combler toutes les demandes d’aide: la liste d’attente pour le service de mères et pères-visiteurs est passée d’une dizaine à près de 30 noms à Montréal-Nord, à la suite de la vague de nouveaux arrivants cet été.
Ces familles avec jeunes enfants et bébés naissants arrivent au Québec avec un stress énorme. En plus de devoir s’adapter à leur nouvelle vie dans un autre pays, ils doivent s’occuper d’un petit être, avec tout ce que cela implique même dans les conditions régulières: fatigue, dépression post-partum, suivis médicaux, etc.
Les pères et mères visiteurs, des aidants naturels rémunérés, font une énorme différence par des choses simples. «Très souvent, on va accompagner les parents pour les rendez-vous à l’hôpital ou à l’urgence», explique Ghassan Assio, père-visiteur à Montréal-Nord.
Occianie Tity, mère-visiteuse à Montréal-Nord, accompagne beaucoup de femmes monoparentales, dont certaines ont plus d’un enfant, avec jumeaux, ou encore qui présente un handicap lourd, comme la paralysie cérébrale par exemple.
«Quand j’arrive, je demande: « j’ai trois heures à t’offrir, comment je peux t’aider aujourd’hui ». Parfois elles ont besoin de répit, parfois ce sont les sorties pour faire faire des papiers, des recherches d’emploi, etc.», explique-t-elle.
«En entrant dans la maison, les parents-visiteurs vont permettre d’apaiser instantanément le stress vécu de n’importe quel ordre, juste par leur présence, leur chaleur. C’est une ressource précieuse, sans jugement», ajoute, Marie-Josée Desrochers, coordonnatrice à l’intervention à Montréal-Nord.
Chaque parent-visiteur s’occupe de huit familles à raison d’environ trois heures par semaine par famille. Fait exceptionnel, ceux-ci sont aussi disponibles pour urgence 24 heures, sept jours par semaine pour les familles.
Éviter les placements d’enfants
Selon l’évaluation de l’organisme, ces visites de premières lignes permettent d’éviter la maltraitance et la négligence auprès des jeunes enfants. «Je peux affirmer que dans environ 80% des cas, on évite même le placement des enfants à la Direction de la protection de la jeunesse, estime Denise Landry, directrice générale et fondatrice. Ce sont des économies énormes que l’on procure à la société».
«C’est que nos parents-visiteurs sont des gens du milieu qui n’arrivent pas avec un mandat de travail social du réseau de la santé et cela fait une grande différence dans la confiance et le lien avec les familles», ajoute Mme Landry.
Dans la dernière année, les intervenants ont remarqué une hausse des situations problématiques de violence conjugale et familiale. «Notre travail est d’arriver avant qu’il y ait ces problèmes», indique Mme Landry.
Un travail d’éducation et d’intégration se fait naturellement. «On leur explique les valeurs d’ici. Essentiellement, on leur explique qu’il faut protéger l’enfant, l’aider à s’épanouir et ne pas utiliser de force excessive avec les enfants», explique M. Assio.
Le travail des pères et mères visiteurs en est un de première ligne et il est reconnu par le réseau de la santé. Bien qu’il ne soit pas reconnu comme une profession, la formation octroyée est attestée par la Société de formation continue (SOFEDUC) depuis deux ans. «Ces formations mensuelles portent sur la santé mentale, la toxicomanie, l’écoute active, etc.», énumère Mme Desrochers.
Financement refusé pour l’immigration
L’organisme, financé à 52% par les gouvernements canadien et québécois, peine à maintenir le niveau de financement d’une année à l’autre depuis quelques années. Entre autres, Centraide a dû couper 25 000$, l’équivalent d’une intervenante à temps partiel. «Ce sont 15 familles qui n’obtiennent pas les services annuellement», souligne Mme Landry.
Du côté du privé, «Beaucoup de fondations ne veulent pas financer des salaires et préfèrent financer un bien matériel», indique Arnaud Payet, agent au développement et au financement.
Les coupes gouvernementales se sont aussi succédé depuis 2014. C’est le cas au ministère de l’Immigration qui s’est retiré pour se concentrer sur les organismes qui agissent exclusivement auprès des immigrants. «Pourtant 84% de notre clientèle est issue de l’immigration», fait valoir Mme Landry.
De plus, leur demande d’aide récente pour embaucher deux intervenantes supplémentaires a été refusée, malgré des lettres d’appui de plusieurs organismes travaillant avec les immigrants, dont le Baobab familial, Petites Mains et Médecins du Monde.
Les parents-visiteurs participent pourtant en grande partie à l’intégration des nouveaux arrivants. «On arrive avec notre expérience de parents et on peut leur expliquer comment on est arrivé à passer au travers de nos difficultés, dans la communication et la compréhension, tout en faisant appel aux ressources», explique Ghassan Assio.
Soulignons enfin que la Fondation de la Visite offre le service de parents-visiteurs à domicile dans les arrondissents de Montréal-Nord, Bordeaux-Cartierville, Hochelaga-Maisonneuve, Côte-des-Neiges, ainsi que dans l’ouest de Montréal. De plus, des trousses de naissance incluant piqués, pyjama et tricots sont distribués à l’ensemble de la population référée par le réseau de la santé. En 2016-2017, 700 trousses ont été distribuées comparativement à environ 450 l’année suivante.