Maël Lakessa Gilles: le March Madness d’une basketteuse de Montréal-Nord
Si le réfrigérateur était parfois vide à la maison, et que l’électricité venait à manquer dans le petit appartement de sa mère sur le boulevard Henri-Bourassa, Maël Lakessa Gilles se rendait au terrain de basketball du parc Saint-Laurent. Un ballon à la main, elle se sentait libre de tout tracas. À quelques jours d’une première participation au prestigieux tournoi du March Madness de la NCAA, l’ailier des Scarlet Knights de l’université Rutgers encourage les jeunes nord-montréalais à faire preuve d’audace malgré les moments plus difficiles.
Le quartier, Maël le connaît très bien. Elle a grandi à Montréal-Nord, fréquentant tour à tour l’école primaire Jean-Nicolet et l’école secondaire Henri-Bourassa avant de poursuivre, deux ans plus tard, à l’école secondaire Saint-Laurent.
Aujourd’hui, à plus de 600km du lieu de son premier coup de foudre avec le ballon orange, la femme de 23 ans s’apprête à affronter les meilleures joueuses du monde dans sa catégorie d’âge.
«Les jeunes de Montréal-Nord, c’est comme si on se disait qu’on était prédisposé à échouer. Il faut voir plus loin que le négatif devant nos yeux et travailler deux fois plus fort. Le positif comme le négatif fait partie du processus», affirme-t-elle.
Sur l’unité partante d’une équipe du Big Ten, l’une des cinq meilleures conférences de basketball universitaire féminin aux États-Unis (Power Five), la joueuse de 6 pieds 1 pouce est devenue indispensable au succès de son équipe.
Cette saison, elle a enregistré le troisième meilleur temps d’utilisation et le quatrième plus haut total de points et de tirs bloqués des Scarlet Knights.
«Je n’aurais jamais pu arriver où je suis sans demander de l’aide. Et c’est correct, il faut prendre conscience qu’on en a tous besoin. À ma quatrième année avec l’équipe, j’ai plus confiance en mes moyens que jamais», souligne-t-elle.
Croire en soi
Maël Lakessa Gilles se rappelle cependant du choc qu’elle a vécu à sa première année au New Jersey. Déçue par son maigre temps d’utilisation, elle s’est mise à croire qu’elle n’avait pas les aptitudes pour compétitionner dans la NCAA.
«Je suis arrivé à Rutgers après avoir fait l’équipe provinciale du Québec, et la team Canada. Je sortais du collège Montmorency ou j’avais été dominante. Mais en une année ici, j’ai peut-être été utilisé 5-10 minutes. J’ai commencé à croire que je n’étais pas apte à jouer», se rappelle-t-elle.
Deux longues années passèrent avant que ses minutes de jeu augmentent, mais à la troisième, une prise de conscience propulsa la Nord-Montréalaise vers de nouveaux sommets.
«J’ai compris que je n’étais pas encore prête. J’ai changé ma mentalité, reconstruit ma confiance en travaillant fort et en mettant les heures au gym. Maintenant, ma coach m’emploie dans toutes les situations», fait remarquer Maël.
Alors qu’elle vient de recevoir une nomination de l’organisation Canletes dans le top 20 des athlètes canadiennes de l’année évoluant dans la NCAA, la jeune femme se décrit comme une «peste en défense» et la «clé de son équipe en milieu de terrain».
Elle aimerait que la jeunesse de son quartier natal, les filles en particulier, s’inspire de son parcours pour réaliser leurs rêves.
«Je dirais aux filles de Montréal-Nord d’être audacieuses, « prenez votre place! » Parfois on a tendance à se rapetisser, à s’effacer, mais il faut se battre pour ce qui nous tient à cœur», affirme-t-elle.
En pleine croissance personnelle, la joueuse de basketball espère pouvoir poursuivre sa carrière une fois l’expérience universitaire terminée. Elle se voit évoluer en Europe, dans un endroit «où il fait chaud comme en Espagne», et peut-être même éventuellement dans la WNBA, la meilleure ligue au monde.