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Une signalisation faisant appel aux émotions aux abords des écoles

Silhouettes enfants grandeur nature
En 2021, l’Arrondissement annonçait qu’une trentaine de silhouettes grandeur nature seraient installées, en plus de quatre dos d’âne temporaires, les premiers de l’histoire du quartier. Photo: Isabelle Chénier, Métro Média

Près de l’école primaire Jean-Nicolet de Montréal-Nord, les automobilistes rencontrent sur leur chemin deux dos d’âne et un passage piéton surélevé bordé par des saillies de trottoir, en plus de devoir éviter une image d’enfant grandeur nature installée au milieu de la rue. L’objectif? Assurer la sécurité des écoliers.

La sécurité routière a en effet été renforcée aux abords d’une dizaine d’établissements scolaires, en prévision de la rentrée 2022. Parmi les moyens utilisés se trouvent une trentaine de silhouettes d’enfants grandeur nature, installées l’an dernier au centre des rues pour inciter les automobilistes à ralentir.

Métro s’est rendu sur l’avenue Salk, entre les rues d’Amos et de Charleroi, dans le secteur de l’école Jean-Nicolet, pour y sonder résidents, parents et enseignants sur ces silhouettes qui attirent le regard et qui commencent à pulluler à travers la province.

Des mesures efficaces?

«Oui, je pense que ça renforce la sécurité pour les enfants, affirme d’entrée de jeu Carolina, tout en aidant un de ses enfants à sortir de sa voiture. Ces silhouettes aident les automobilistes à réaliser qu’il peut y avoir des enfants sur la route», croit-elle.

Nadia, enseignante et éducatrice, abonde dans le même sens. «Je pense que ce genre de signalisation est très important. Quand on conduit, cette image du petit garçon au milieu de la rue qui dit “ralentissez pour ma sécurité” est très tape-à-l’œil. C’est comme s’il demandait de l’aide.»

Céline, également enseignante, doute quant à elle de l’utilité de ce type de signalisation vis-à-vis de la sécurité routière. «À force de passer devant, les automobilistes vont clairement finir par s’y habituer et ne plus le voir, affirme-t-elle. Je crois que c’est plutôt le dos d’âne qui fait ralentir les voitures.»

«Quand les gens sont stressés, ils ne remarquent pas une image placée devant eux, renchérit Rosa, mère d’une écolière. Ils ne nous remarquent même pas. Avec le dos d’âne, ils n’ont pas le choix de ralentir», croit-elle.

Des dos d’âne plus qu’utiles

Des silhouettes rigides, une traverse piétonnière avec détection passive et un radar pédagogique ont aussi été installés près des écoles Pierre de Coubertin et De la Fraternité. Photo: Isabelle Chénier, Métro Média.

En effet, qu’elles croient ou non en l’utilité des silhouettes, les personnes questionnées par Métro s’entendent toutes sur un point: l’efficacité indéniable du dos d’âne pour réduire la vitesse des automobiles et assurer la sécurité routière.

Bien que Nadia reconnaisse l’utilité des images d’enfants au milieu des rues, elle concède que ce sont «les dos d’âne qui sont les plus efficaces, car les automobilistes ont peur pour leur voiture».

Sophie, une autre mère d’écoliers, croit par ailleurs que c’est l’effet combiné des silhouettes d’enfants et des dos d’âne qui «forcent les automobilistes à ralentir» et les rendent plus conscients des enfants aux alentours.

Une signalisation à double effet

Anthony Lapointe. Photo: Isabelle Chénier, Métro Média

C’est ce que soutient également Anthony Lapointe, directeur des ventes et marketing chez Kalitec, l’entreprise qui a fabriqué les silhouettes d’enfants.

«Avec la signalisation émotive, on tend à ralentir parce que ça pourrait être un vrai enfant. C’est aussi une balise de centre de rue qui a un effet de rétrécissement de voies. On est obligé de ralentir parce qu’il y a un obstacle dans la rue», explique-t-il.

Ce sont selon lui, l’aspect pédagogique et le faible coût des silhouettes qui rendraient cette solution à l’enjeu de sécurité routière particulièrement attrayante pour les municipalités et le grand public, contrairement aux dos d’âne, qui miseraient davantage sur la punition.

«Si on passe [sur le dos d’âne] à 60 km, on endommage notre véhicule. Les gens n’aiment pas ce genre de mesure. C’est sûr que rien ne bat un dos d’âne, seulement, leur acceptabilité sociale est moins grande. On ne parle pas non plus du même budget. Refaire un aménagement de rue est bien plus dispendieux qu’une silhouette qui vaut 500$», affirme le représentant de Kalitec.

Briser la linéarité des rues

Selon la directrice générale de Piétons Québec, Sandrine Cabana-Degani, l’installation d’images d’enfants dans la rue «a un impact au niveau de la sensibilisation, mais comme toutes les campagnes de sensibilisation, elles ont malheureusement un effet très court dans le temps».

«Ce type d’affichage ne remplace pas les aménagements physiques qui permettent de briser la linéarité de la rue», précise la directrice générale. Le réseau routier actuel a été construit à la base pour encourager la fluidité automobile. Les automobilistes adaptent leur vitesse en fonction de l’aménagement de la voie de circulation. Ils auront donc tendance à circuler plus rapidement dans une voie large et sans entrave, et oublieront la signalisation», précise-t-elle.

Des mesures de sécurité routière passives comme des dos d’âne allongés, des saillies de trottoirs et des chicanes rendraient le comportement beaucoup plus facile à adopter par l’automobiliste et ne nécessiteraient pas d’intervention policière pour assurer le respect de la signalisation, soutient Sandrine Cabana-Degani.

Un «cocktail» de mesures d’apaisement

La stratégie adoptée par l’Arrondissement pour renforcer la sécurité routière sur l’ensemble du territoire repose sur le pouvoir combiné d’un «cocktail de mesures», affirme la mairesse d’arrondissement de Montréal-Nord, Christine Black, en entrevue téléphonique.

«L’effet des silhouettes seules n’est peut-être pas aussi grand, mais quand on le jumelle à celui des dos d’âne allongés, des interventions policières de prévention, des traverses lumineuses et des saillies de trottoir pour réduire la largeur de la rue, cette combinaison de mesures peut donner un effet encore plus important», souligne-t-elle.

Elle assure également que l’administration compte maintenir la cadence le printemps prochain en continuant à mettre en place des mesures adaptées à la réalité du secteur, en collaboration avec le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).

«On va poursuivre l’implantation de dos d’âne, de saillies de trottoir, de traverses lumineuses et de panneaux pédagogiques pour encourager les automobilistes à respecter les limites de vitesse», promet-elle.

Une mesure d’apaisement de la circulation à proposer?

L’Arrondissement de Montréal-Nord a mis à la disposition des citoyens un formulaire à remplir pour qu’ils puissent demander la mesure d’apaisement jugée appropriée pour leur quartier.

Cette requête peut être remplie à partir du site Web de la Ville de Montréal.

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