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Campement Ville-Marie: une éviction «au cours des prochaines semaines»

Le campement sous le l'autoroute Ville-Marie.
Le campement sous l'autoroute Ville-Marie Photo: Quentin Dufranne, Métro Média

Alors que le ministère des Transports du Québec (MTQ) reprendra bientôt un chantier de travaux majeurs sur l’autoroute Ville-Marie, entre l’échangeur Turcot et le tunnel Ville-Marie, les personnes en situation d’itinérance ayant trouvé refuge sous l’autoroute devront être relocalisées, et ce, «au cours des prochaines semaines».

«On a entamé l’année dernière des travaux de réparation de six structures, indique à Métro la porte-parole du MTQ, Sarah Bensadoun. À l’heure actuelle, les campeurs se trouvent sur une propriété privée, qui est celle du Ministère, et ce sera aussi une zone de chantier jusqu’en 2025. C’est impossible d’effectuer les travaux avec la présence de campeurs sans avoir de répercussions sur leur santé et leur sécurité.»

Mme Bensadoun précise que les travaux, qui nécessiteront de la machinerie lourde, créeront un bruit intense et qu’il y aura beaucoup de va-et-vient, avec entre autres des camions qui transportent de l’équipement.

Aucune date butoir

Le chantier de l’autoroute Ville-Marie est en pause hivernale en ce moment, mais devrait reprendre au cours des prochaines semaines.

«La date de reprise du chantier n’est pas encore confirmée. Mais c’est un chantier qui reprend dès que les conditions météo s’améliorent. Dès qu’on ne sera plus en conditions hivernales, ça va reprendre», souligne Mme Bensadoun.

D’ici là, le MTQ est en discussions avec plusieurs partenaires, entre autres le ministère de la Santé et des Services sociaux et le CIUSSS Centre-Ouest, afin de trouver une solution durable pour les campeurs, qui devront trouver un logement lors de la reprise des travaux.

«Du côté du MTQ, on n’a pas l’expertise pour trouver des logements ou quoi que ce soit sur une base temporaire ou plus longue, ajoute la porte-parole. C’est pourquoi on travaille avec des partenaires et on espère vraiment qu’on va pouvoir leur proposer des solutions durables et qu’ils vont surtout les accepter.»

Le chantier, qui s’échelonnera sur trois ans, vise six structures surélevées sur l’autoroute Ville-Marie. Réfection du hourdis supérieur – un élément structural de la dalle –, réparation de certaines piles, remplacement de joints de tabliers, réfection du système de drainage des structures, reconstruction de la chaussée, remise en place du marquage ainsi que mise à jour de l’éclairage routier et du système de transport intelligent sont au menu.

Craintes confirmées

Mercredi, la défenseure fédérale du logement, Marie-Josée Houle, disait craindre que le campement des personnes en situation d’itinérance sous l’autoroute Ville-Marie soit démantelé. Mme Houle avait récemment lancé un examen officiel des campements au Canada.

C’est sur le compte officiel du Bureau du défenseur fédéral du logement que Mme Houle a partagé ces informations, le 1er mars.

«Alors que j’entreprends un examen national des campements de personnes en situation d’itinérance, je tiens à souligner que tous les niveaux de gouvernement ont l’obligation de promouvoir et de protéger les droits de la personne des résidents des campements», a-t-elle publié sur Twitter.

Éviction reportée

Installés depuis plusieurs années sous l’autoroute Ville-Marie, la vingtaine d’habitants du campement avaient été menacés d’éviction l’automne dernier par le ministère des Transports, éviction qui devait se produire le 10 novembre. Rencontrés par Métro peu avant cette date butoir, les résidents du campement craignaient alors de voir leurs biens emportés par les camions à ordures et de se retrouver isolés les uns des autres, aux quatre coins de la métropole.

Les campeurs déploraient en outre l’absence de solutions concrètes et pérennes venant des autorités. Ils demandaient au MTQ de pouvoir passer l’hiver au campement pour être à l’abri de la neige et avoir ainsi plus de temps pour se trouver un autre emplacement.

Le MTQ avait par la suite décidé in extremis de reporter l’expulsion. Son service des communications avait confirmé à Métro que la décision avait été prise dans le but de laisser le temps aux personnes concernées de s’organiser et «pour que ces gens-là soient pris en charge».

Le 10 novembre, une cinquantaine de manifestants avaient répondu à l’appel du Syndicat des locataires autonomes de Montréal (SLAM) et avaient arpenté les rues de l’arrondissement du Sud-Ouest en soutien aux personnes en situation d’itinérance du campement. Les manifestants étaient décidés à se faire entendre pour que les autorités cessent les démantèlements de campements et qu’elles mettent en place des solutions pérennes.

Examen officiel des campements au Canada

Rappelons que le 23 février, la défenseure fédérale du logement lançait un examen officiel des campements au Canada, «lesquels sont devenus une crise des droits de la personne dans les villes de partout au pays».

«Depuis le début de la pandémie, nous assistons à une nette augmentation du nombre de campements de personnes en situation d’itinérance, peut-on lire dans le communiqué annonçant l’examen officiel des campements. Les logements deviennent de plus en plus inabordables et inaccessibles. Les personnes ont perdu leurs moyens de subsistance et leur logement. De nombreux centres de services sociaux et refuges sont à pleine capacité. Plus de personnes que jamais se voient forcées de vivre dans des tentes ou se tourner vers des abris de fortune pour survivre.»

Selon le bureau du défenseur fédéral du logement, bien que les tribunaux et les organismes de défense des droits de la personne reconnaissent de plus en plus l’itinérance non hébergée comme une question relevant des droits de la personne, les personnes résidant dans des campements font face à certaines des situations les plus précaires dans notre société.

«Leur dignité et leurs droits sont souvent ignorés, explique-t-on dans le communiqué. Elles sont victimes de harcèlement et de violence de la part de la police, des agents chargés de faire appliquer les règlements municipaux et des membres du public. La plupart n’ont pas accès à des services de base comme l’eau potable ou le chauffage. Certaines ont subi des préjudices ou sont décédées à la suite d’une exposition aux intempéries, d’un incendie, d’une surdose ou d’autres causes attribuables aux conditions dans lesquelles elles vivaient.»

Le démantèlement des campements pendant l’hiver compromet la santé et la vie des personnes, et il constitue une grave violation des droits de la personne, ajoute la défenseure fédérale du logement.

L’examen officiel des campements portera principalement «sur des solutions systémiques permettant de remédier aux facteurs qui mènent aux campements, ainsi qu’aux luttes quotidiennes des personnes qui y résident».

À l’issue de l’examen, la défenseure fédérale du logement présentera ses conclusions et recommandations au ministre fédéral du Logement et de la Diversité et de l’Inclusion, Ahmed Hussen.

L’examen comprendra des témoignages de personnes ayant vécu une expérience en lien avec les campements. Toute personne ayant résidé dans un campement peut contribuer à l’examen en présentant une observation à la défenseure fédérale du logement dès le mois d’avril.

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