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Les femmes en politique face aux préjugés et aux stéréotypes

Les femmes en politique face aux préjugés et aux stéréotypes
La mairesse de Montréal, Valérie Plante, lors de sa victoire électorale en 2017. Photo: Josie Desmarais/Archives Métro

Un écart persiste encore entre la couverture médiatique accordée aux hommes et aux femmes en politique, selon une nouvelle étude de l’UQAM. Celles-ci subissent aussi davantage de préjugés, ce qui peut créer une pression indue à leur égard, et la moindre erreur peut amener son lot de critiques.

«Encore en 2020, le traitement médiatique des femmes passe encore par leur aspect vestimentaire et leurs traits émotionnels», lance à Métro Stéphanie Panneton. La doctorante en communication à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) fait partie des quatre chercheuses derrière une récente étude portant sur la couverture médiatique des femmes en politique municipale.

Le document, de plus de 90 pages, est basé sur les témoignages de nombreuses candidates, élues ou non, qui ont pris part aux dernières élections municipales, en 2017. Nombre de ces femmes, provenant de 10 régions du Québec, ont déploré «la discrimination» et les «stéréotypes genrés» qu’elles auraient subis au cours de la dernière campagne électorale.

Selon les chercheuses, ce «régime de genre» a l’effet de réduire la couverture médiatique accordée aux politiciennes. Une situation que vient exacerber le fait que les femmes ne représentaient, au lendemain des élections municipales, que 32% de l’ensemble des élus dans les villes et villages de la province. «On a peu de femmes en politique municipale, donc on en parle peu et on se retrouve dans un cercle vicieux», dit Mme Panneton.

Traits émotionnels

Les élues municipales interviewées estiment qu’elles ont beaucoup plus tendance à être décrites en fonction de leurs traits émotionnels, en comparaison avec leurs collègues masculins. Une situation qui détournerait les médias de la teneur des propos et des idées de ces politiciennes, estiment les chercheuses.

«On ne leur reproche pas [aux hommes] d’agir sous le coup de l’émotion», souligne Mme Panneton.

Les élues et candidates sur la scène municipale ont aussi senti qu’elles subissent davantage de pression quand vient le moment de s’adresser en public, car le moindre faux pas pourrait leur valoir les foudres du public – notamment sur les réseaux sociaux – et faire l’objet de mentions dans les médias traditionnels. Elles estiment qu’elles doivent avoir une fine maîtrise des sujets avant d’aller en conférence de presse.

«Ça fait en sorte que les femmes doivent se sur-préparer avant de prendre la parole dans les médias», constate Véronique Pronovost, doctorante en sociologie à l’UQAM.

Plusieurs femmes interviewées dans le cadre de cette étude ont d’ailleurs fait état des répercussions de la couverture médiatique à leur égard «sur leur vie personnelle et professionnelle».

«Quelques candidates expliquent que les membres de leur famille subissent les contrecoups de leur couverture parce que les médias les contactent directement ou que les critiques à l’égard des candidates véhiculées dans l’espace médiatique les affectent», peut-on lire. Certaines candidates évoquent des impacts «sur la poursuite de leur carrière politique».

Prévenir les stéréotypes par la formation

Les auteures de l’étude appellent les médias et la société à contrer les stéréotypes dont sont victimes les femmes en politique municipale en mettant davantage de l’avant «leur parcours» et leurs «engagements et positions politiques» lorsqu’ils couvrent celles-ci. Les journalistes devraient ainsi «se questionner sur l’usage des stéréotypes physiques ou sociaux, notamment en résistant à l’envie de passer des commentaires sur l’apparence, la gestuelle et les expressions faciales», écrivent-elles.

«Par rapport aux médias, il faudrait rapporter des sujets qui portent sur la politique et non pas sur les femmes qui se présentent. On pourrait aussi diversifier les intervenants», indique Mme Pronovost, qui constate que les hommes sont plus souvent appelés à commenter la politique municipale que les femmes.

Le rapport propose d’autre part au gouvernement Legault de mettre en place des formations destinées aux élus municipaux et aux journalistes afin de les sensibiliser sur l’importance d’entretenir des rapports égalitaires entre les hommes et les femmes.
«Ce sont des biais de genres qui sont véhiculés dans l’ensemble de la société. Donc, ce que le gouvernement pourrait faire, c’est de lutter contre ces stéréotypes-là», mentionne Mme Pronovost.

Valérie Plante, une exception?

Valérie Plante, qui est devenue la première mairesse de Montréal en 2017, a bénéficié au cours de la dernière campagne électorale d’une couverture médiatique «exceptionnelle» par rapport aux autres candidates à l’échelle de la province, constate l’étude. Une situation qui n’est pas étrangère au plafond de verre qui a été brisé par son arrivée en poste dans la métropole. Le rapport mentionne aussi son slogan de campagne, «L’homme de la situation», qui a suscité beaucoup d’attention.

«Oui, c’est une exception dans la mesure où elle est sur plusieurs tribunes et que c’est la mairesse de la métropole. […] On a l’impression qu’on parle beaucoup des femmes en politique, mais au fond, on ne parle que d’elle», laisse tomber Stéphanie Panneton.

Mme Plante n’a pas pour autant été épargnée par ce «double standard» en politique municipale, dont elle n’a accepté de parler que deux ans après son arrivée en poste, dans le cadre d’une entrevue à La Presse. Elle n’avait pas osé aborder ce sujet auparavant, par crainte d’«être accusée de jouer la victime», a-t-elle confié en novembre 2019 au quotidien montréalais.

«Lorsque des politiciennes prennent la parole pour souligner qu’il y a des biais genrés, ces femmes-là vont se faire dire qu’elles jouent la carte des femmes en politique et recevoir un accueil très froid», déplore Véronique Pronovost.

Depuis son arrivée en poste, le sourire de la mairesse a par ailleurs maintes fois servi à décrire la politicienne, pas toujours de façon positive. Mme Plante a notamment critiqué l’an dernier la décision du Journal de Montréal d’utiliser le titre «Pas de quoi rire» en première page son édition du 5 novembre 2019, en référence à un article portant sur le bilan de mi-mandat de son administration. Son style vestimentaire a aussi été scruté à la loupe.

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