Non, vous ne «scraperez» pas vos enfants avec une heure de plus de Pat’ Patrouille
La plupart des enfants ont littéralement grandi devant des écrans: ils pitonnent plus vite que leur ombre (et que leurs parents) et font les mises à jour sur l’ordi sans même nous le demander. Est-ce grave, docteur?
Dès qu’ils reviennent de l’école, ils s’emparent des écrans. Le plus vieux joue en ligne avec ses amis (qu’il a pourtant côtoyés toute la journée en classe) et l’autre prend sa collation devant Netflix. Une habitude qu’ils ont aussi lors des journées pédagogiques et les dimanches matins.
On est bien loin des avis de la Société canadienne de pédiatrie, qui recommande moins d’une heure d’écran par jour pour les tout-petits et aucun écran du tout pour les moins de deux ans.
Le saviez-vous?
La Société canadienne de pédiatrie recommande les temps d’écran suivants: aucun avant l’âge de 2 ans, moins d’une heure par jour pour les enfants de 2 à 5 ans, et moins de 2 heures par jour pour les 5 à 17 ans. Des normes qui sont dépassées, selon plusieurs experts.
Mais avant de faire de l’urticaire, il faut savoir que ces normes sont considérées comme dépassées par plusieurs experts. «Les écrans font partie de nos vies et ils contribuent également à l’épanouissement des jeunes. Il n’y a pas que des impacts négatifs», soutient Emmanuelle Parent, doctorante en communication et cofondatrice du Centre pour l’intelligence émotionnelle en ligne (CIEL).
Ouste, la culpabilité!
Début janvier, l’école et la garderie étant fermées, Carolanne* a dû, malgré elle, «parker ses enfants devant la télé», illustre-t-elle avec émotion. «J’avais des réunions sur Zoom et mon conjoint travaillait à l’extérieur.» Elle est loin d’être la seule.
La pandémie a fait bondir le temps d’écran chez plus de 85% des jeunes de 5 à 17 ans, indique un sondage réalisé par la firme Léger l’automne dernier*. La gestion des écrans est une source de conflit dans 44% des familles interrogées. Doit-on s’inquiéter de cette hausse? «Oui, si ça nuit aux autres sphères d’activités. Par exemple, lorsque votre jeune s’isole, ne va plus à ses pratiques de soccer ou si vous achetez la paix avec du temps de tablette», prévient Mme Parent, dans un balado sur l’utilisation des médias sociaux.
Si ces comportements ne se manifestent pas, les parents ne devraient pas céder au sentiment de culpabilité pour une heure de plus de Pat’ Patrouille, renchérit la psychoéducatrice et autrice Stéphanie Deslauriers. Dans son sympathique livre Le bonheur d’être un parent imparfait, elle fait la promotion de l’indulgence et de l’acception de l’imperfection parentale, avec humour et rigueur (quand même!).
Parce que tout n’a pas à être parfait, et surtout pas la gestion des écrans des enfants alors que, avouons-le, on a de la difficulté à gérer notre propre temps d’écran.
La réalité des familles d’aujourd’hui, entre le télétravail, les cours de gym et le nez qui coule, demande des compromis, de l’improvisation et de la souplesse.
Ça ne veut pas non plus dire que l’enfant doit avoir les yeux rivés sur son écran 24h par jour. Il est plutôt recommandé d’instaurer progressivement une utilisation saine, équilibrée et contrôlée.
Les bienfaits des écrans
Les écrans ne sont pas que des monstres pixellisés. Ils peuvent aussi contribuer à développer le sens critique, certaines compétences ou passions. Bien entendu, un écran passif (par exemple, regarder la télé) n’a pas la même dimension sociale que ceux qui demandent une interaction, où l’enfant est invité à réfléchir, à bouger ou à être créatif.
N’empêche, relaxer devant un film en famille a aussi ses bienfaits. Cela permet de se sentir bien, d’évacuer le stress et d’accéder à des mondes imaginaires. Encore une fois, tout est une question de dosage et d’équilibre.
Pas de câble, pas de cellulaire!
Plusieurs familles limitent non seulement le temps passé devant les écrans, mais aussi la disponibilité de ceux-ci. C’est le cas chez Nathalie Rondeau qui, comme plusieurs parents, a coupé le câble. La télévision sert seulement à regarder des films ou aux jeux vidéo. Avant d’allumer un écran, son garçon de 11 ans doit avoir fait ses leçons, une tâche ménagère ou joué dehors. «Ça devient une récompense», dit-elle.
L’ordinateur lui sert aussi dans ses apprentissages. «Comme il a un TDAH, ça lui permet de mieux se concentrer et de se calmer aussi», dit la mère, qui est aussi enseignante au primaire.
Donner l’exemple
Et si on débutait par la gestion de nos propres écrans? Donner l’exemple est une bonne façon d’influencer d’une manière positive nos enfants. Éteindre le cellulaire lors des repas ou des soirées en famille, c’est également bon pour nous.
La boîte à outils
- La compagnie québécoise Belles Combines propose la trousse «Avant d’allumer un écran», qui comprend un tableau de tâches et des écussons aimantés afin que les enfants puissent gérer eux-mêmes leur temps d’écran.
- Une solution de remplacement aux écrans? Abonnez votre jeune à un magazine papier (Les Débrouillards, Les Explorateurs, J’aime lire…) ou à un atelier de bricolage (Pandacraft) qu’il recevra par la poste chaque mois.
- Votre jeune vous dit qu’il a joué seulement une heure? Vérifiez son temps d’utilisation réel en activant les paramètres sur son téléphone. Mieux encore: téléchargez une application de contrôle parental (par exemple OurPact ou FamilyTime) afin de programmer ses heures d’utilisation ou de bloquer l’accès à certains sites et contenus.
- Pour les plus jeunes, utilisez un tableau de motivation ou des jetons afin qu’ils puissent mieux matérialiser le temps alloué pour les écrans. Cela deviendra un privilège bien mérité!
- Envie de regarder la télé? Optez pour une émission ou un film en anglais. Même les profs d’anglais le recommandent pour se familiariser avec les intonations et les accents.
- Apprendre avec les écrans? On aime les jeux et applications d’Alloprof, qui permettent aux enfants de tous les âges de développer leurs compétences scolaires. Notre préféré pour les maths est Fin Lapin.
* Source: Sondage Léger réalisé auprès de 1002 parents d’enfants de 6 à 17 ans et de 801 adolescents âgés de 14 à 17 ans, du 18 octobre au 2 novembre 2021.
* Nom fictif
Ça va bien aller? Elle est bonne! La série «Parents à boutte» vise à déculpabiliser les familles à bout de souffle dans le contexte pandémique. Au programme : conseils, mises au point, et boîtes à outils sur une tonne de thématiques. À suivre dans la section Inspiration.