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Balarama Holness et la société distincte de Montréal

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Balarama Holness en entrevue pour Métro. Photo: Métro

Je rencontre le candidat à la mairie de Montréal Balarama Holness le jour du débat de la chambre de commerce, où il n’a pas été invité. Denis Coderre et Valérie Plante débattront ce soir-là de l’économie montréalaise sans lui. Il dit que ça va, qu’il est conscient d’être le chef du 3e parti dans les intentions.

«J’aime ça être l’underdog.»

Il a l’assurance un peu baveuse de ceux qui se sont rendus là où on ne les attendait pas.

Je lui avoue qu’au début de la campagne, on n’était pas certain, chez Métro, qu’on ferait son portrait à titre de candidat à la mairie. Il était trop marginal.

Il me demande si c’est après la fusion de son parti avec Ralliement Montréal qu’on s’est décidé, et je reconnais que oui. Content, il me montre le jeu d’échecs qui repose sur la table à côté de nous. «C’est un mouvement d’échec.»

Il n’a peut-être pas encore beaucoup d’expérience en politique, mais son parcours de footballeur – un sport de stratégie – et de diplômé en droit semble lui avoir inculqué l’importance des positionnements.

Si Balarama Holness s’estime tout désigné pour prendre les rênes de la mairie, c’est que Montréal est une ville fondamentalement cosmopolite et qu’il incarne cette réalité, lui qui est le fils d’un Jamaïcain et d’une Québécoise aux yeux bleus. Selon lui, cette mixité est l’ADN de Montréal. «Pour plusieurs personnes, c’est controversé, mais pour moi, c’est qui je suis: quelqu’un qui a mangé beaucoup de sucre à la crème et qui aime aussi les samossas.»

On est en train de créer une société unique au sein du Québec.

Balarama Holness

Une société distincte dans une société distincte, donc.

Je me souviens que je suis avec le candidat qui propose de tenir un référendum sur le statut linguistique de Montréal en vue d’en faire une ville officiellement bilingue.

Balarama Holness a le luxe des petits partis: défendre de grandes idées… controversées.

Lui-même a parfois l’impression d’être «l’ennemi public numéro 1». C’est d’ailleurs cette impression qui l’habitait le jour où il a publié un message de menaces raciste qu’il venait de recevoir.

He’s made it?

Nous quittons la Petite-Bourgogne dans sa voiture pour nous rendre à l’Hôtel de Ville, un lieu qu’il aimerait changer. Je lui demande ce qu’il écoute en auto. Dans sa playlist, il sélectionne Kick, push, de Lupe Fiasco, et We made it, de Pop smoke.

Tu écoutes les paroles? Me demande-t-il. Non, ça parle de quoi? La première est une histoire d’amour, la seconde une histoire de résilience. Il sourit en rappant par-dessus les paroles.

À l’aise sur mon siège de passagère, je challenge celui qui m’offre un lift et lui demande s’il est indifférent à l’éventualité de perdre la course à la mairie parce que pour lui, cette course est un mouvement d’échec pour un autre positionnement futur.

Il dit que son parti a déjà gagné, «parce que des gens vont voter qui n’ont jamais voté de leur vie.»

«I used to eat fifty-cent cake. Now, it’s Philippe’s, it’s Philippe’s for the steak», rappe Pop smoke.

Nous arrivons à l’Hôtel de Ville, où Valérie Plante est en train de donner une conférence de presse.

Tandis qu’on marche devant l’imposant bâtiment, inspiré par la musique, le chef de Mouvement Montréal se met à freestyler sur une analogie: si Montréal est une maison, l’Hôtel de Ville en est la clé. «C’est une clé que beaucoup de personnes n’ont jamais eue. »

En ce moment, il y a plusieurs personnes qui cognent et il n’y a personne là. Il faut des clés et on va en faire des copies pour les trois millions de Montréalais et Montréalaises.

Balarama Holness

La république de Montréal

Nous nous rendons finalement dans un lieu de la ville qui a forgé le politicien de 38 ans, au réservoir MacTavish. Nous déambulons sur le terrain de football qui surplombe le campus de l’Université McGill, à flan du Mont-Royal où il va marcher pour décompresser. Il m’y explique que le football l’a motivé à reprendre ses études alors qu’il les avait abandonnés à 18 ans, à l’époque où il était un peu rebelle.

Mais c’est ensuite le droit à McGill qui allumé en lui la flamme la politique, puisqu’il y a compris l’architecture de la société, dit-il.

«C’est le cadre juridique de Montréal qui m’intéresse, un Montréal avec un cadre législatif qui est presque étatique. Et c’est mon expérience du droit à McGill qui me donne cette vision, cette inspiration.»

Je vois vraiment Montréal comme étant une place indépendante, autonome.

Balarama Holness

En l’écoutant, je me représente une ville comme celles de la Grèce antique. Mais même être maire de Montréal avec son statut actuel, ne serait-ce pas beaucoup de pression?

Oui, mais il adore la pression. «Comme dans les sports, c’est les moments où il y a le plus de pression que tu veux performer.»

«Je veux la ville sur mon dos», dit-il avant de nous saluer pour reprendre son téléphone dans sa poche et se laisser ré-engloutir par la métropole.

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