Contrôle des armes à feu: «Ç’en est assez, soyons un exemple dans le monde!»
La Mosquée de Québec et PolySeSouvient, qui ont vécu deux tragédies liées aux armes à feu, enjoignent aux gouvernements canadien et québécois d’agir contre les armes à feu.
La Mosquée de Québec, en collaboration avec PolySeSouvient, a organisé mercredi soir une table ronde sur le contrôle des armes alors que le 5e anniversaire de la tuerie à la Mosquée de Québec sera souligné dans quelques jours. Ils ont tenté de répondre à la question suivante: cinq ans plus tard: qu’est-ce qui a changé au niveau du contrôle des armes?
En ce sens, une lettre demandant que des actions soient effectuées pour contrer la prolifération des armes de poing est adressée au premier ministre du Canada, Justin Trudeau, ainsi qu’au ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino. Une autre lettre est adressée au premier ministre du Québec, François Legault, et à la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, pour qu’ils appuient l’action fédérale.
Plusieurs victimes de fusillades ont participé à la table ronde et joignent leurs voix à la demande adressée aux gouvernements. C’est le cas de Louise De Sousa, mère d’Anastasia De Sousa décédée dans la tragédie du Collège Dawson à Montréal en 2006. C’est le cas de Nathalie Provost, rescapée de Polytechnique, et de Mohameb Khabar, rescapé de la tuerie de la Mosquée de Québec. Ils demandent la fin de l’inaction.
Ç’en est assez, soyons un exemple dans le monde!
Le cofondateur et porte-parole du Centre culturel islamique de Québec, Boufeldja Benabdallah
«Quand on arrive en campagne électorale, les paroles sont belles, mais elles sont vides. Pour nous, c’est inquiétant et c’est frustrant», explique Nathalie Provost, qui avait claqué la porte du Comité consultatif canadien sur les armes à feu (CCCAF) en 2019, se sentant instrumentalisée. Mohamed Khabar, atteint par balles à deux reprises, n’oubliera jamais les cris des enfants. «Ces armes sèment la peur et la mort au Canada.»
Un attentat terroriste avait fait six morts et cinq blessés graves au Centre culturel islamique de Québec le 29 janvier 2017. Les victimes sont Ibrahima Barry, Mamadou Tanou Barry, Khaled Belkacemi, Aboubaker Thabti, Azzedine Soufiane et Abdelkrim Hassane.
L’impatience grandissante
«Honteux que dans un pays qui se veut pacifique les armes de poing prolifèrent encore», lance le cofondateur et porte-parole du Centre culturel islamique de Québec, Boufeldja Benabdallah. Cinq ans plus tard, M. Benabdallah se désole de constater qu’aucune législation ou législation à l’étude visant à contrer la prolifération des armes à feu n’ait vu le jour.
Depuis mai 2020, le Canada a interdit l’utilisation, la vente ou l’importation d’armes à feu de style arme d’assaut (projet de loi C-21) par décret. Après de longues années d’inaction, la mesure a été appliquée deux semaines après la pire tuerie du Canada, à Portapique, en Nouvelle-Écosse, où 22 personnes ont été tuées, explique la fondatrice et coordonnatrice de PolySeSouvient, Heidi Rathjen. Les parties présentes aimeraient plutôt que le Canada soit «courageux» et l’enchâsse dans la loi. Dans l’éventualité d’un changement de gouvernement, ces mesures pourraient être renversées, craint Mme Provost.
En 2021, le Parti libéral a aussi intégré dans ses promesses électorales un programme de rachat des armes d’assaut encore en circulation, mais le dossier des armes de poing stagne. La lettre envoyée au premier ministre lui demande d’ailleurs de ne pas se déresponsabiliser dans le dossier des armes de poing. Le gouvernement Trudeau souhaiterait laisser les provinces et territoires décider eux-mêmes de les interdire ou non.
«Si nous vous écrivons aujourd’hui, c’est pour vous supplier d’arrêter vos démarches visant à déresponsabiliser le gouvernement fédéral face au dossier des armes de poing», selon un extrait de la lettre.
La programmation de la 5e commémoration de la fusillade à la Grande Mosquée de Québec peut être consultée en ligne, à www.cciq.org.