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Réparer l’infini

Le tapis roulant représente quelque chose d'un peu magique. Photo: Pierre Brassard | www.pierrrebrassard.com

Chaque mardi, la journaliste et animatrice Julie Laferrière et l’humoriste, animateur et illustrateur Pierre Brassard posent un regard original sur les usagers du transport en commun.

Ligne verte du métro, à la station Beaudry. C’est vendredi, il est 13 h 10.

En entrant dans la station, je réalise que le long tapis roulant est immobile. On a sécurisé l’accès à l’aide d’un panneau et d’une banderole jaune sur laquelle le mot «danger» est inscrit à répétition.

Il faut donc emprunter les escaliers conventionnels à contrecœur. Parce qu’on va se dire les vraies affaires : c’est vraiment l’fun un tapis roulant! Pas seulement parce qu’il nous évite des efforts, mais aussi parce qu’il représente quelque chose d’un peu magique. On y avance sans avoir à mettre un pied devant l’autre.

Quand on l’emprunte, on a, comme souvent dans nos vies «technomodernes», ce sentiment que l’humain est une formidable bibitte ingénieuse, une espèce rebelle qui défie les lois de l’ordinaire.

L’aviation nous a donné accès au ciel; les bouteilles d’oxygène font que, même submergés par l’océan, nous respirons librement. Nous roulons, nous nous propulsons dans l’espace et nous pouvons avancer en restant complètement immobiles.

Je m’arrête au beau milieu de ma réflexion, et de ma descente, pour observer le tapis – pour l’instant – pas-roulant-pantoute. Une section a été retirée et un technicien s’est glissé dans le ventre de la bête; un tout petit homme au cœur de ce long chemin mécanique qui, seul, tente de redémarrer le mouvement perpétuel.

Parce qu’un tapis roulant, quand on y pense, à échelle humaine, représente par sa séquence de recommencement continu, un morceau d’éternité. Une notion qui donne le vertige parce que notre cerveau, pour la plupart d’entre nous, a besoin de paramètres et de balises pour fonctionner et concevoir les choses.

C’est peut-être pour ça aussi que le tapis roulant est un peu fabuleux. Parce qu’avec lui, on accepte en toute confiance, pour un moment défini, de poser les pieds sur un petit bout d’infini.

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