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La crise du coronavirus fait craindre des dérives policières à Montréal

SPVM
Des interventions du Service de police de la Ville de Montréal ont eu lieu dans plusieurs parcs de la métropole. Photo: Josie Desmarais/Métro

Des organismes craignent que la crise du coronavirus n’entraîne des dérives policières alors que les forces de l’ordre ont intensifié leurs efforts pour faire respecter les règles de distanciation sociale à Montréal.

Jeudi, le SPVM a annoncé qu’il intensifiait ses mesures visant à intervenir contre les rassemblements interdits dans les lieux publics et privés. Le corps de police n’attendra d’ailleurs pas un cas de récidive pour remplir un rapport d’infraction, qui pourra mener à l’octroi d’une amende 1000 à 6000$.

À la demande de la Ville, la présence policière également été rehaussée dans six grands parcs de la métropole, dont le parc La Fontaine et du Canal-de-Lachine.

«Le mot d’ordre, depuis les deux dernières semaines, c’était qu’on priorisait la sensibilisation et l’information. Maintenant, on priorise la rédaction de rapports [d’infraction]», relate en entrevue à Métro l’inspecteur et chef de la Division des communications du SPVM, André Durocher.

Ce dernier n’a pu fournir de données sur le nombre de rapports que le SPVM a rédigé dans les derniers jours en lien avec l’application de la Loi sur la santé publique, la situation évoluant trop rapidement.

«Ce qu’on a en ce moment, c’est qu’on a un certain nombre de dossiers qui sont sous analyse et ça change à la minute près», a justifié M. Durocher. 

Jeudi, le premier ministre François Legault a appelé les policiers à être «moins tolérants» à l’égard du non-respect des mesures de distanciation sociale.  

«Je pense qu’il y a eu une prise de conscience collective que si on n’agit pas, on ne voudrait pas en venir à un moment où on doit empêcher les gens de sortir de chez eux et fermer les parcs. On ne voudrait pas pénaliser une majorité de personnes à cause d’une minorité d’irréductibles.»

Dérives policières

Cette situation inquiète plusieurs organismes, qui craignent des dérives dans les interventions policières.

«On a interpellé la Ville pour qu’elle s’assure que le SPVM continue de privilégier d’abord la communication avant de passer à la coercition. Il faut s’assurer qu’il y a des actions qui sont adaptées aux besoins des populations plus vulnérables», évoque à Métro la coordonnatrice de la Ligue des droits et libertés, Eve-Marie Lacasse.

Cette dernière a récemment envoyé une lettre à la mairesse de Montréal, Valérie Plante, pour lui faire part de ses préoccupations. Le document mentionne notamment les craintes que l’appel de la mairesse pour inciter les citoyens à signaler au 911 les situations qui ne respectent pas les normes de distanciation sociale n’ait des «effets discriminatoires» à l’égard de «certaines communautés».

«Pour les citoyens, nous leur demandons de faire preuve de jugement et de signaler les rassemblements inhabituels», a réagi le cabinet de Mme Plante.

En octobre dernier, un rapport accablant a fait état de la surreprésentation des minorités visibles dans les interpellations du SPVM sur la voie publique.

«Ce ne sont pas des problèmes qui vont cesser du jour au lendemain. Donc, oui, je crois qu’il y a lieu de craindre que les pratiques policières contestables vont continuer dans cette période de crise-là», soulève le porte-parole de la Coalition contre la répression et les abus policiers (CRAP), Alexandre Popovic. 

Intervention «injustifiée»

En soirée, jeudi, des policiers sont intervenus dans une synagogue de la rue Bernard, à la limite d’Outremont et du Plateau-Mont-Royal. Un signalement aurait été fait au SPVM en raison de la présence de plusieurs individus dans l’établissement. Au moment de l’arrivée des policiers, la plupart d’entre eux avaient quitté les lieux. Aucune arrestation n’aurait eu lieu.

«Je me sens très mal à propos de ça. Les policiers sont venus, ils n’ont rien vu et ont fait arrêter l’événement. C’est très grave. Ils n’ont pas le droit d’aller dans la propriété de quelqu’un sans raison réelle. Ils n’ont trouvé personne là. C’était injustifié», a déploré à Métro le président de la Coalition des organismes hassidiques d’Outremont, Alex Werzberger. 

Le SPVM n’a pas voulu commenter ce cas précis.

«Lorsque les policiers se déplacent, c’est pour une raison», a laissé tomber M. Durocher. 

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