Un élu de Projet Montréal a voté contre son propre parti en 2017
Un élu de Projet Montréal a préféré accorder son vote au candidat de Denis Coderre plutôt qu’à celle de son parti, Sue Montgomery, lors des dernières élections municipales. Une situation qui témoigne des tensions internes au sein du parti de Valérie Plante, selon une experte.
Le conseiller du district de Loyola, Christian Arseneault, a fait campagne à l’automne 2017 aux côtés de l’actuelle mairesse de Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce, Sue Montgomery. L’ancienne journaliste au quotidien The Gazette et instigatrice du mouvement «Agression non dénoncée» est devenue en août 2017 candidate officielle pour Projet Montréal à ce poste, alors occupé par Russell Copeman.
C’est justement à ce dernier, alors candidat pour le parti de l’ancien maire Denis Coderre, que M. Arseneault a accordé son vote aux dernières élections municipales. Un aveu qu’il a fait sur les réseaux sociaux.
«Les membres de notre parti l’ont choisie [Sue Montgomery] comme candidate. J’ai eu deux opportunités de voter pour elle et je ne l’ai pas fait parce que j’ai vu les signes. J’ai laissé mon bulletin de vote vide [à l’investiture] et en novembre, j’ai voté pour Russell [Copeman]», a indiqué l’élu au début du mois dans une publication Facebook. Il l’a retirée depuis.
Métro n’a pas réussi à rejoindre l’élu et militant de longue date de Projet Montréal, qui est actuellement en vacances.
Des explications demandées
Questionné alors par des internautes, M. Arseneault avait refusé d’expliquer les motifs qui l’avaient amené en 2017 à voter contre la candidate de Projet Montréal dans son arrondissement, indiquant simplement que «croire à un parti ne veut pas dire être d’accord avec tout et tout le monde dans le parti».
«C’est assez bizarre qu’un élu ait fait campagne et demandé à ses membres de voter pour [Sue Montgomery] alors que lui-même ne l’a pas fait», s’étonne le chef d’Ensemble Montréal et conseiller du district de Darlington, Lionel Perez. Ce dernier presse d’ailleurs M. Arseneault d’expliquer cette décision «auprès de ses électeurs».
«C’est inexcusable d’un point de vue d’intégrité politique.» -Lionel Perez, chef d’Ensemble Montréal
Contacté par Métro, le cabinet de Mme Plante n’a pas voulu commenter. Le directeur des communications de Projet Montréal, Julien Acosta, affirme pour sa part que l’ensemble des membres du parti «ont droit à leur opinion» et que «les échanges d’idées ont toujours été encouragés au sein du parti».
Des tensions avec Sue Montgomery
Le torchon brûle entre l’administration de Valérie Plante et Sue Montgomery depuis plusieurs mois. Le 24 janvier, Projet Montréal a d’ailleurs expulsé la mairesse d’arrondissement de son parti. Une décision prise à la suite d’un rapport d’enquête du contrôleur général concluant que deux employés de l’arrondissement auraient subi du harcèlement psychologique de la part de la directrice de cabinet de Mme Montgomery, Annalisa Harris. Le parti déplorait le refus de la mairesse d’arrondissement de suivre les recommandations du contrôleur général, qui a d’ailleurs accusé la mairesse d’arrondissement d’«aveuglement volontaire» dans ce dossier.
Mme Montgomery, qui a également perdu son siège à deux commissions municipales, n’a pu être jointe par Métro mercredi. Celle-ci attend actuellement la décision d’un juge de la Cour supérieure concernant une cause qui l’oppose à la Commission municipale du Québec en lien avec ce même dossier.
Selon Lionel Perez, l’aveu de M. Arseneault porte à croire que l’enquête du contrôleur général n’est pas l’unique source des tensions entre les élus de Projet Montréal dans l’arrondissement le plus peuplé de Montréal.
«Ils ne sont pas unis et ça se voit très clairement dans la façon dont ils interagissent au sein du conseil d’arrondissement», affirme-t-il.
Stratégie électorale
La professeure à l’UQAM et experte en gestion municipale, Danielle Pilette, estime pour sa part que la décision de Christian Arseneault de voter contre la candidate de son parti est symptomatique de la stratégie électorale prise par Projet Montréal en 2017. Le parti a alors misé sur des candidatures externes ayant une certaine notoriété afin de compenser son image de «parti militant» et ainsi rejoindre «un électorat assez large». Une stratégie qui a fonctionné, mais qui a aussi créé des frictions internes, analyse-t-elle.
«Il y a eu des difficultés avec des élus qui étaient depuis longtemps dans le parti et qui n’étaient peut-être pas prêts à faire des concessions», soulève Mme Pilette.