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Zones inondables: une gestion bâclée, selon élus et experts

Un travailleur pose des sac de sable lors d'une inondation
Photo: La Presse canadienne

La troisième version de la carte des zones inondables déposée lundi par Québec continue d’inquiéter. Si la portée du secteur a été réduite dans 17 municipalités de la province, les partis d’opposition dénoncent une communication déficiente dans le dossier.

«La méthodologie utilisée n’a aucun sens, s’insurge la porte-parole en matière de Sécurité publique pour l’opposition libérale à Québec, Marie-Claude Nichols. Le premier réflexe devrait être de travailler en collaboration avec les municipalités. On les a totalement ignorées.»

Lundi pour une deuxième fois depuis sa mise en place en juin, la Zone d’intervention spéciale (ZIS), qui régit la construction en zones inondables, a fait l’objet d’une nouvelle mouture du gouvernement. Depuis plus d’un mois déjà, de nombreuses municipalités ont fait part de leur crainte auprès du ministère des Affaires municipales.

«La ZIS s’est faite à la va-vite, analyse pour sa part la députée de Québec solidaire Émilise Lessard-Therrien. C’est problématique parce que ça entraîne une surcharge de travail pour les municipalités.»

Même son de cloche chez le professeur invité à l’École nationale d’administration publique (ENAP) Rémy Trudel, un ex-ministre des Affaires municipales sous le gouvernement péquiste de Lucien Bouchard.

«Ça s’est fait sous le coup de l’émotion, affirme l’expert en gestion municipale. On était en plein drame. Donc on n’a pas pris beaucoup de temps pour dessiner ce plan de match.»

«On vient geler le territoire en pleine période estivale. Ceux qui voulaient avoir une piscine, un cabanon, c’est terminé. Que tu aies été inondé ou non.» – Marie-Claude Nichols, députée de Vaudreuil pour le PLQ

Prévention

Avec cette carte temporaire, le gouvernement est parti avec de «très bonnes intentions», soutient la professeure au Département de stratégie, responsabilité sociale et environnementale de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) Danielle Pilette.

«On a voulu dire qu’à l’avenir, on préviendrait plutôt que de guérir», avance-t-elle.

Mais dans la région métropolitaine de Montréal en particulier, le ministère des Affaires municipales a «sous-estimé l’autonomie de plusieurs municipalités», selon Mme Pilette.

«Oui, la région est soumise aux risques d’inondations. Mais elle a sa propre dynamique. Ce n’était pas la meilleure façon de procéder [ici]. C’est un gouvernement qui ne connaît pas très bien les réalités de la région métropolitaine.» – Danielle Pilette, professeure associée à l’UQAM spécialisée en gestion municipale

Plusieurs villes de l’Ouest de l’Île de Montréal se plaignent de l’inclusion de leurs propriétés dans la ZIS malgré qu’elle n’aient pas été inondées lors des printemps 2017 et 2019.

Meilleure communication

Selon Mme Pilette, la Coalition avenir Québec (CAQ) a omis de travailler sur le terrain.

«Peut-être que ce gouvernement inexpérimenté a accordé une foi trop grande à la transformation de données scientifiques en données gouvernementales. On passe d’une cartographie de l’eau à un processus qui touche des propriétés et des villes», convient-elle.

Émilise Lessard-Therrien appelle à une meilleure communication sur le plancher des vaches. «Il y a des municipalités dans mon comté qui me disent que l’information était floue sur le fait que les citoyens devaient remplir des formulaires de manière individuelle», remarque-t-elle.

«Moi j’ai des gens qui viennent au bureau en détresse. On a oublié le côté humain dans tout ça», ajoute Marie-Claude Nichols. Elle dénonce un processus informationnel «déficient».

Long-terme

Au Parti québécois (PQ), on appelle à une commission scientifique et technique, «comme on l’avait fait pour la crise du verglas», lance le député de Rimouski, Harold Lebel.

«À l’époque ça avait été assez rapide, et on avait réussi à passer à travers ça sans improvisation. Pour l’instant, on nage toujours dans l’incertitude», ajoute le porte-parole aux Affaires municipales pour le PQ.

Rémy Trudel invite le gouvernement à «prendre son temps». «Le remède qu’on veut appliquer est plus complexe», lance-t-il.

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