La tempête venue du centre
Il a venté. Il a tonné, et rien ne laissait prévoir une telle vague. Si les prévisions indiquaient un changement, rien n’annonçait un tel bouleversement du paysage politique. La tempête n’est pas venue de l’est, ni de l’ouest. Elle est venue du centre. Les électeurs du Québec et de l’Ontario ont complètement redessiné la composition du parlement à Ottawa.
La poussière retombe lentement et on se demande : est-ce que les résultats d’une campagne qui a porté davantage sur l’image des chefs que sur les enjeux, peuvent redéfinir la dynamique? Avec Jack Layton à gauche et Stephen Harper à droite, tout est possible! La polarisation des acteurs en présence devrait faire porter le débat sur le fond plutôt que sur la forme.
On doit toutefois nuancer. Stephen Harper a atteint son premier objectif, celui de redéfinir l’échiquier politique. Il doit maintenant installer le Parti conservateur dans l’histoire comme parti de gouvernance. Pour y parvenir, il devra élargir sa base. Un re-centrage de ses positions et une main tendue au Québec devraient faire partie de sa stratégie. De son côté, Jack Layton cherchera, lui aussi, à séduire une part plus grande de l’électorat. Il lui faudra ajuster son discours pour faire des gains à l’extérieur du Québec, sans pour autant perdre ceux fraîchement acquis.
Le temps contribuera aussi à amener le débat ailleurs. Minoritaires depuis 2004, tous devront apprivoiser les réalités d’un gouvernement majoritaire. L’échéance de la prochaine élection est fixée en 2015. Tout le monde aura le temps de s’installer et de bien positionner sa vision. Les épouvantails pourront reprendre le chemin des placards, tant ceux de la coalition que ceux de la «démonisation».
Pendant ce temps, comment survivront les grands écorchés de ce scrutin? Avec seulement quatre représentants, reconnus comme indépendants aux Communes, les forces souverainistes devront se demander si Ottawa est encore l’endroit pour faire valoir leur option. Le message envoyé par les Québécois peut être interprété de diverses façons. Ottawa : pas la place. Souveraineté : pas la priorité. Besoin de changement. Il serait imprudent d’en tirer des conclusions prématurées. Cependant, un débat en profondeur devra être entrepris.
Le temps dira aussi si et comment les libéraux pourront se relancer. Le chemin de la facilité ne sera pas une option. La nomination d’un nouveau chef ne réglera pas tout. Ils devront prendre le temps de trouver leur place dans l’arène politique et se définir eux-mêmes plutôt que de se laisser définir.
Est-ce la fin du débat souverainiste-fédéraliste à Ottawa? Ce serait surprenant! C’est l’émergence d’un nouvel axe droite-gauche. Les résultats du scrutin de 2011 redéfinissent pour l’instant la dynamique. Reste à savoir si cela sera durable. Seul le temps nous le dira. Il reste quatre ans pour laisser retomber la poussière. Avec les élections à date fixe, l’échéance du 19 octobre 2015 est connue. On saura à ce moment si ce n’était qu’un coup de gueule ou une humeur durable de l’électorat. Cela dit, une déception; cette grande marée n’a pas été accompagnée d’un taux de participation à la hauteur du phénomène.
– Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.