Laurent Gaudé entre dans l’histoire
Prix Goncourt 2004 pour Le soleil des Scorta, Laurent Gaudé, invité d’honneur au Salon du livre de Montréal cette année, revisite le mythe d’Alexandre le Grand dans Pour seul cortège. Rencontre avec l’auteur de cette œuvre originale, très éloignée du genre historique.
Pourquoi vous êtes-vous attaché au personnage d’Alexandre le Grand?
En 2002, j’avais écrit un court monologue sur Alexandre le Grand pour le théâtre et j’avais envie de poursuivre sur ce thème. C’est un personnage fascinant, hors norme. Il est dans le débordement, l’ivresse, l’appétit. C’est pour ça qu’il est beau et terrifiant. Alexandre le Grand est un homme qui a réussi à s’affranchir des frontières de la mort en plongeant dans le mythe.
Vous avez fait un travail d’historien?
J’ai eu toute une phase de documentation, notamment sur la fin de sa vie, sur ses voyages en Inde et au Pakistan. Puis mon travail a été d’oublier un peu tout ça, car je ne voulais pas faire un roman historique. Je ne voulais pas dérouler une chronologie ni être dans le péplum. J’ai donc intégré des éléments imaginaires, comme le cavalier sans tête, pour éviter toute confusion.
Dans votre roman, outre Alexandre, il y a surtout une femme, Dryptéis. Qui est-elle?
C’est un personnage très beau avec lequel je suis en harmonie. Dryptéis est la fille de Darius, le roi de l’Empire perse. Elle a donc fait partie des vaincus. Puis elle est redevenue reine lors de son mariage avec Héphaïstion, le plus proche compagnon d’Alexandre. Cette femme a tout connu, la gloire et la défaite. Cela a dû déposer en elle une forme de désir de sortir de l’histoire. J’avais envie de mettre cela en parallèle avec Alexandre qui, lui, ne cesse d’avoir envie d’être historique, d’être le plus fort, le plus beau. Elle, elle est dans le retrait du monde.
Dryptéis est prête à tout abandonner, bijoux et palais, pour se soustraire à l’Empire. C’est une invitation à être moins matérialiste?
Dans beaucoup de mes romans, il y a des personnages qui penchent vers le dénuement, l’abandon. J’aime cette idée que la grande leçon qu’on a à apprendre de la vie, c’est de se déposséder, pour être le plus possible en harmonie avec la fin. On devrait apprendre à se passer de tout ce qui peut encombrer. Il n’y a pas forcément de frustration à consommer moins.
Bibliographie
Laurent Gaudé a écrit des pièces de théâtre, des nouvelles, mais surtout des romans :
- Cris. 2001
- La mort du roi Tsongor. 2002
- Le soleil des Scorta. 2004
- Eldorado. 2006
- La porte des Enfers. 2008
- Ouragan. 2010
- Pour seul cortège. 2012
Infos
Laurent Gaudé au Salon du livre de Montréal
Stand 232 (Actes Sud/Leméac)
Jeudi et vendredi de 17 h à 18 h
Samedi de 14 h à 17 h
Dimanche de 13 h 30 à 14 h 30