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Keny Arkana: la parole et un haut-parleur

Photo: Collaboration spéciale

Après quelques années passées à voyager et à s’engager socialement pour essayer de changer les choses, l’étonnante rappeuse marseillaise Keny Arkana revient avec Tout tourne autour du soleil. Un second album sur lequel, avec son flow si singulier, elle dénonce et se confie. À nous aussi.

Keny, Tout tourne autour du soleil, c’est un disque que vous portiez en vous depuis longtemps?
Après la sortie de mon premier album en 2008 et la tournée qui a suivi, j’avais décidé de faire un petit break de quelques mois. Sauf qu’il a duré plus de trois ans! Ce second disque, je l’ai fait assez spontanément. Je l’ai créé à 80 % entre l’automne 2011 et le printemps 2012.

On sait que vous êtes allergique au vedettariat, que vous avez beaucoup de mal avec la game qui se joue parfois dans le milieu. Est-ce que ç’a été difficile de vous replonger là-dedans à la sortie de votre nouvel album ou est-ce que, désormais, vous avez mis vos barrières et les gens savent à quoi s’attendre de vous?
(Rires) On va dire que, même si je reviens dans la musique, je me tiens loin du showbiz. J’habite toujours le même quartier, j’ai les mêmes amis, et je n’ai toujours pas mis les pieds dans une station de radio ou de télé. Jamais! Je continue de faire ma musique comme une artisane. Je suis bien dans ma bulle… et j’y reste!

Vous dites que les artistes ont une responsabilité et un rôle à jouer, «parce que vous êtes les seuls à ne pas être censurés». Cela dit, avez-vous été confrontée à la censure? Est-ce qu’on vous a déjà empêchée de dire certaines choses?
Directement, non. Mais en ce moment, puisque je dénonce la politique de ma ville [dans la chanson Capitale de la rupture], je ressens le boycott local. C’est la première fois que certains médias marseillais m’ignorent. Dans plusieurs journaux, il n’y a rien eu sur l’album, pas une seule ligne, alors que, jusque-là, c’était des gens qui me soutenaient!

À la sortie de votre premier disque, vous disiez : «Le rap, c’est mon moyen d’expression, mais ce n’est pas ma vie. Ma vie, c’est le changement.» Est-ce toujours le cas?
Oui. Je suis juste une petite humaine. Mais il y a des trucs avec lesquels je ne suis pas d’accord. Et j’ai envie de les dénoncer pour essayer de les changer, humblement, à mon échelle. La vie m’a donné la parole et un haut-parleur. Du coup, j’essaye de les utiliser!

On vous présente souvent, si ce n’est tout le temps, comme «une femme dans un milieu de gars», voire «un milieu machiste». Est-ce que ça vous étonne qu’on insiste autant là-dessus?
C’est vrai que les deux questions qu’on me pose le plus souvent, c’est : «Alors, les filles dans le rap?» et «Alors, le rap à Marseille?» Et moi, je trouve que le rap, la musique et l’art en général, ce sont peut-être les seuls domaines où on s’en fout de savoir si t’es une meuf, un mec, un riche, un pauvre, un blanc, un noir, un rouge ou un vert. La seule question qu’il faut se poser c’est : est-ce que l’art que cette personne fait te touche ou pas. Et ça s’arrête là!

Sur la pièce Le syndrome de l’exclu, vous chantez que vous avez l’impression de «ne pas être à votre place» et d’être «mal jugée et mal vue depuis l’époque d’aller en classe». Quand vous sortez un disque ou quand vous êtes sur scène, est-ce que ce syndrome s’estompe un peu?
Au fur et à mesure, oui, mais c’est vrai que je le porte toujours en moi. C’est un truc que j’essaye de travailler : me dire que, si je suis ici, c’est parce que je suis à ma place. La scène, ça va. Je m’y sens bien. Mais c’est vrai qu’à la base j’ai toujours préféré être au fond de la classe ou du bus!

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