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Les parodoxes du Dr Miami

Dr Miami
Dr Miami Photo: Collaboration spéciale

Michael Salzhauer, mieux connu sous le nom de Dr Miami, est un personnage fascinant pour un documentariste. Mais aussi pour un psychologue, un sociologue ou quiconque s’intéresse à la nature humaine et à ses contradictions.

Autoproclamé «le médecin le plus connu de l’univers», le chirurgien floridien est une vedette sur Snapchat, où il diffuse à ses milliers d’abonnés des stories de ces interventions chirurgicales, avec l’accord de ses clientes bien sûr.

Augmentation mammaire, liposuccion ou encore le très populaire «brazilian butt lift»: Dr Miami vulgarise son travail dans de courtes vidéos où se mélange sang, humour potache et apologie du corps parfait, sur fond de musique pop.  Sa clinique est aussi le lieu de tournage de plusieurs clips hip-hop, qui mettent en valeur les courbes prononcées de ses ex-patientes.

Dr Miami est également un brin mégalomane. Dans They Call Me Dr. Miami, documentaire que lui consacre Jean-Simon Chartier, on le suit aussi dans ses démarches pour agrandir l’enseigne qui orne l’entrée de sa clinique. «Je veux qu’on puisse la voir de l’espace», s’exclame-t-il avec enthousiasme.

Il veut aussi faire peindre sur un mur attenant une gigantesque murale à son effigie coiffée de son slogan personnel: «Faites des fesses, pas la guerre».

Avec d’autres docteurs à qui il enseigne ses méthodes d’autopromotion sur les réseaux sociaux, il souhaite répandre la bonne nouvelle: la beauté est une arme et la chirurgie plastique un moyen de l’obtenir. Un moyen de se sentir mieux et de devenir une «meilleure personne».

«La personne qu’on veut vraiment être», selon les dires d’une de ses patientes qui est passée plusieurs fois sous son bistouri.

Michael Salzhauer est aussi un être profondément croyant. Juif orthodoxe, il est marié depuis 20 ans, a cinq enfants et respecte scrupuleusement le sabbat.

Toutes ses facettes sont réunies à l’intérieur d’un seul homme et semblent (relativement) bien cohabiter.

«La chirurgie esthétique n’est qu’un facette de la culture de l’image dans laquelle on vit. Mais ce n’est pas certainement pas la seule.» Jean-Simon Chartier, réalisateur de They Call Me Dr. Miami

«J’ai été captivé par l’ampleur de personnage et du phénomène qu’il représentait. Il y avait définitivement un film à faire sur lui et ses paradoxes», explique le réalisateur Jean-Simon Chartier, qui avait croisé Dr Salzhauer lors du tournage d’un autre film consacré à la chirurgie esthétique, Corps à la carte.

«J’essaie de montrer sans le juger un être humain qui a ses contradictions, ses carences et ses croyances. Il croit foncièrement en la chirurgie esthétique. Il y a eu recours et crois que ça améliore sa confiance et l’améliore comme personne. Quand il intervient sur le corps de quelqu’un d’autre, il fait la même chose: il permet à des gens d’avoir plus confiance en eux.»

They Call Me Dr. Miami est toutefois plus critique du culte du corps et de l’image parfaite véhiculée par les médias sociaux.

«Je crois au libre choix. Certaines personnes ont des raisons valables d’avoir recours à la chirurgie plastique et que ce n’est pas à moi de juger», précise Jean-Simon Chartier.

«En même temps, il existe un phénomène en Floride et en Californie où les jeunes femmes ont recours à la chirurgie plastique pour être aimées et admirées, à la plage et sur les réseaux sociaux. Être à la mode, c’est avoir des fesses rondes et de gros seins. Cette culture amène  des jeunes femmes à prendre des risques pour leur santé et pour leur vie même, seulement pour s’offrir en spectacle. Ce phénomène-là, je trouve qu’il est exagéré.»

Il est aussi exagéré selon la fille de Michael Salzhauer, l’une des intervenantes les plus intéressantes du documentaire. Du haut de ses 13 ans,  l’adolescente n’hésite pas à placer son père devant ses contradictions, elle qui a quitté tous les réseaux sociaux, «cette perte de temps qui détruit les relations humaines».

«Dieu nous a créés et nos corps lui appartiennent», affirme-t-elle en reprenant les principes de la religion juive que son père lui a inculqués.

Au final, peut-on vraiment concilier de si grandes contradictions?

«Je crois qu’il se pose des questions, soutient Jean-Simon Chartier. Et qu’il se trouve des réponses pour bien vivre avec les deux facettes de sa personnalité, comme on le fait tous. Je crois que je l’ai amené à réfléchir à des choses qu’il ne s’était jamais dites à lui-même. Il n’a pas fini de se questionner.»

They Call Me Dr. Miami: jeudi 20h à CBC, aussi offert sur CBC Gem

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