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«It Must Be Heaven»: la comédie humaine

It Must Be Heaven
En plus de réaliser It Must Be Heaven, Elia Suleiman y tient le rôle-titre, celui d’un héros pratiquement muet incapable d’échapper à sa patrie d’origine Photo: Collaboration spéciale

Un homme cherche une terre d’accueil dans It Must Be Heaven, l’irrésistible nouveau conte tragi-comique d’Elia Suleiman.

Qui eût cru que ce film d’exception, Mention spéciale du jury au Festival de Cannes de 2019, aurait anticipé à ce point le quotidien en ces temps de pandémie? On y trouve d’ailleurs un Paris pratiquement désert où errent quelques âmes perdues étant contraintes de se distancer de gré ou de force.

«Plusieurs personnes me blâment pour ce qui se passe aujourd’hui, lance en riant Elia Suleiman. Je ne cherchais pourtant qu’à décrire des situations d’urgence et d’apocalypse.»

Son virus revêt plutôt une forme politique, se manifestant par la violence, l’anxiété et la militarisation de la société moderne. Que l’on se trouve à Nazareth , Paris ou New York, la même tension persiste.

«C’est le résultat de l’état du monde et de la mondialisation de la planète, soutient son réalisateur, qui s’est fait connaître sur la scène internationale avec Intervention divine. On vit dans une sorte de cauchemar régressif, agressé de part et d’autre.»

Un mal-être généralisé qui, comme toujours chez le créateur palestinien, baigne dans l’absurde et le réalisme magique.

«Cette fois, j’ai poussé davantage la pureté de mon cinéma, notamment dans la scène avec l’oiseau, avoue-t-il. Les images poétiques résonnent davantage lorsqu’elles ressortent de moments politiques et sociaux.»

«Nous vivons dans un monde absurde qui possède tous les éléments du désespoir. Et ce désespoir produit beaucoup d’humour.» Elia Suleiman, cinéaste spécialiste du politico-burlesque

Comme il se plaît à dire, Elia Suleiman n’écrit pas tant des scénarios qu’il peint des tableaux.

«Tout commence par une image ou un son», confie le fils spirituel de Buster Keaton et de Jacques Tati.

Une vision finit par s’en détacher, basée sur ses expériences de vie. Cela explique pourquoi il n’a tourné que quatre longs métrages en carrière. It Must Be Heaven est son premier depuis le savoureux Le temps qu’il reste en 2009.

«Je ne veux pas enchaîner les films les uns après les autres, explique le cinéaste de 59 ans. J’ai besoin de vivre pour observer, pour m’inspirer, et ça prend du temps.»

Coproduction québécoise  – l’épisode new-yorkais a été filmé à Montréal et «souvent dans le froid» –, It Must Be Heaven traite d’exil et de déracinement à travers les yeux d’un héros pratiquement muet, incarné par le metteur en scène, qui semble incapable d’échapper à sa patrie d’origine.

«J’ai quitté la Palestine il y a très longtemps et je suis parvenu à être un citoyen du monde, relate le créateur de Chronique d’une disparition. Tous ces pays et ces cultures ont fait de moi qui je suis et je les en remercie. Mais dernièrement, en préparant ce film, j’ai senti une mélancolie m’envahir, des souvenirs très forts ressurgir. Un peu comme si j’avais eu besoin de voyager autant pour que mon identité palestinienne prenne le dessus et qu’elle ait encore davantage de sens.»


It Must Be Heaven

Présentement en ligne en version originale anglaise et sous-titré en français sur les plateformes du Cinéma du Parc et du Cinéma Moderne.

Le film sera offert en vidéo sur demande sur les autres plateformes (dont ITunes, Illico, Bell, Shaw et Rogers) dès le 19 juin.

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