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«La Goddam Voie lactée», concert chorégraphique

Frannie Holder, Léa Noblet Di Ziranaldi, Brianna Lombardo, Chi Long et Stacey Désilier, les cinq interprètes de « La Goddam Voie lactée » Photo: Mathieu Doyon

Tous et toutes, nous marchons les pieds ancrés dans La Goddam Voie lactée, expose la chorégraphe Mélanie Demers. Sa création onirique alliant performance chorégraphique, théâtre et musique, qui avait été présentée au Festival TransAmériques en 2021, revit à l’Agora de la danse du 3 au 5 mai.  

À l’approche des représentations, Métro s’est entretenu avec la lauréate du Grand Prix de la danse de Montréal 2021, inspirée par les « deuils incessants » découlant de notre époque.  

« Vivre, c’est avancer en faisant des deuils : le deuil de la personne qu’on était, dit-elle. Chaque nouvelle expérience nous transforme. C’est comme si on était en mue constante, en transformation. Il y a quelque chose de beau et de puissant autant que de triste là-dedans. » 

La Goddam Voie lactée a valu à la chorégraphe Mélanie Demers le Grand Prix de la danse de Montréal en 2021. Photo : Julie Artacho

Fusion des genres 

Sur scène s’amalgament les quatre interprètes Stacey Désilier, Brianna Lombardo, Chi Long et Léa Noblet Di Ziranaldi, ainsi que la chanteuse et musicienne Frannie Holder (Random Recipe, Dear Criminals). 

Dans les confins de cette galaxie chorégraphique, Frannie ne se contente pas de jouer de la guitare, pas plus que les interprètes s’en tiennent à la danse.  

« Je leur demande d’être à la fois des actrices, des danseuses, des chanteuses. Elles ouvrent le spectacle en jouant de la guitare. Il y a cette idée qu’on est toutes-puissantes, capables de tout faire », expose Mélanie Demers, dont les créations Confession publique et Cabaret noir, de sa compagnie Mayday, sont en tournée cet été.  

Les interprètes, qui incarnent « des versions de leur vie fantasmée ou rêvée », évoluent en 12 tableaux « oniriques et ludiques ». De la buanderie au parc au lit maternel, elles passent d’un lieu à l’autre. « Tout se transforme, se renverse, se contraste, dit la chorégraphe. Mais tout semble naturel. » Comme dans un songe, pense-t-on…  

Dans l’univers de La Goddam Voie lactée s’enchaînent des tableaux « oniriques et ludiques ». Photo : Mathieu Doyon

Mouvements fluctuants 

Les cinq interprètes originales plongent de nouveau dans l’univers qu’elles ont contribué à façonner dans un esprit de sororité avec Mélanie Demers, mais les mouvements des tableaux, eux, sont appelés à varier au gré des représentations, fait observer la chorégraphe, qui privilégie une approche axée sur l’improvisation. 

Au sein de scènes circonscrites par les minutes, les interprètes jouissent d’une grande liberté, se mouvant ainsi différemment d’un soir à l’autre, changeant les courbes dramatiques, remaniant également à leur guise les segments parlés. « On sait de quoi on parle, mais les mots ne sont pas tout à fait écrits », explique Mélanie. 

« La liberté des interprètes donne une saveur différente à l’œuvre, poursuit-elle. Je les mets dans une sorte de vertige. Tout n’est pas parfait, mais j’aime ces aspérités, le fait de voir les interprètes résoudre l’équation sur scène plutôt que d’avoir trouvé la réponse en répétition et la recréer sur scène. Je vais toujours créer des situations qui obligent les interprètes à se mettre en danger. » 

Place à leurs voix 

Les voix des interprètes sur scène occupent une place fondamentale. Et la pandémie pourrait bien y avoir contribué, la création du spectacle s’étant amorcée alors que les artistes ne pouvaient être en contact les unes avec les autres.  

Les cinq amies se faisaient part de « leurs bonheurs, leurs désirs, leurs malheurs, leurs triomphes, relate Mélanie. Et chaque voix a pris de plus en plus de place ». 

Frannie Holder leur donnait des cours de chant, et c’est par la voix qu’elles ont commencé à créer « une harmonisation des corps et des vibrations ».  

« Les voix sont devenues des mélodies, et les mélodies, des chansons. Elles ont pris tellement d’espace que La Goddam est devenue une espèce de concert chorégraphique. Les mots comme la musique de Frannie concourent à faire le fil conducteur du spectacle. » 

Dans les confins de la galaxie chorégraphique de La Goddam Voie lactée, les interprètes dansent, parlent et jouent de la musique. Photo : Cloé Pluquet

Révéler nos ambiguïtés  

Des réflexions actuelles à l’égard du féminisme, du mouvement de dénonciation des agressions sexuelles ou de l’exacerbation des tensions raciales dans nos sociétés sous-tendent La Goddam Voie lactée. Réflexions qui rappellent que l’on fait tous et toutes partie de ce fichu univers, diantre!  

L’approche de Mélanie Demers ne se fait toutefois pas dénonciatrice. « Il n’est pas question ici de passer un message. Ce sont plutôt des questions que je me pose et pose aux interprètes sur ce que j’observe. »  

À ses yeux, les dénonciations revêtent un caractère « monolithique », antagonique à ce qui l’intéresse foncièrement, soit « révéler les humanités dans leurs contradictions, justement ». Et le théâtre et la scène sont des lieux propices à ce que « nos ambiguïtés soient révélées ». 

« Je pense qu’une œuvre est réussie quand tous ceux qui y prennent part ont envie de la défendre comme si c’était la leur. C’est ce que je ressens avec cette œuvre », conclut la chorégraphe du « big bang esthétique » qu’est La Goddam Voie lactée

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