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La mort annoncée de la presse locale

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Photo: Montage Métro

LETTRE OUVERTE – Alors que, depuis plusieurs jours, tous se renvoient la balle à propos de l’abolition du Publisac, on oublie souvent que ce ne sont pas uniquement des circulaires qui sont distribuées de cette manière, mais aussi les journaux locaux. Or, sans un mode de distribution abordable et sans aide publique concrète, nous risquons d’assister à la disparition prochaine et définitive de la presse locale.

Souvent considérés comme la principale source d’information pour des millions de Québécoises et de Québécois, les hebdos locaux tels que les journaux de quartier fournissent une vitrine indispensable aux événements, commerçants et organismes de leur communauté, petits et grands. Sans eux, bien des communautés dans lesquelles nous vivons perdraient leur dynamisme et leur attrait.

Bien que l’abolition du Publisac soit prévue pour mai 2023, l’annonce de la Ville a eu un effet immédiat qui a pris tout le monde par surprise. Le Publisac a été tellement démonisé au cours des derniers mois que par association, certains clients ne désirent plus annoncer chez nous, entraînant ainsi une importante baisse de revenus aussi subite qu’imprévue. Comme la très grande majorité de nos journaux sont distribués par le Publisac, on peut aisément imaginer l’impact.

Pour remédier à cette situation, nous pourrions nous tourner vers Postes Canada et c’est d’ailleurs ce que nous faisons dans le secteur Verdun-Île-des-Sœurs dans le cadre d’un projet pilote. Cette option est toutefois beaucoup plus coûteuse que le Publisac et nous estimons qu’un passage complet vers Postes Canada occasionnerait des coûts supplémentaires de près de 2,5M$ par année, ce qui est énorme pour une petite entreprise comme la nôtre.

Une autre solution réside dans une transformation complète vers le numérique et c’est ce que Métro Média envisage de faire à plus ou moins brève échéance. Toutefois un tel projet est excessivement coûteux et rempli d’embûches. La disparition de notre principal mode de distribution actuel arrive donc trop tôt. La baisse de revenus qui découle directement d’une décision sur laquelle nous n’avons aucun contrôle nous empêchera de réaliser cette transformation qui représente l’avenir de nos publications.

Encore à ce jour nous saluons la décision de la Ville de Montréal de vouloir abolir le Publisac – une décision qui fait l’unanimité d’un point de vue environnemental. Or, la mairesse Plante avait alors aussi annoncé en avril dernier que la Ville de Montréal allait mettre en place une forme de compensation qui aiderait les hebdos locaux à trouver d’autres méthodes de distribution. Cette aide allait permettre aux médias locaux, comme les nôtres, de survivre le temps de migrer vers un nouveau modèle d’affaires davantage orienté vers le numérique. Presque six mois se sont écoulés et la première ébauche de ce à quoi cette aide financière pourrait ressembler se fait encore attendre, alors que le temps presse.

Nous sommes donc aujourd’hui des victimes collatérales d’une décision qui a du sens du point vu environnemental, mais dont les effets pervers avaient été sous-évalués. Les dommages sont déjà visibles et nous avons déjà pris des décisions difficiles. D’autres suivront si rien n’est rapidement fait. La situation est à ce point critique que le secteur de la presse locale a besoin d’aide dès maintenant. Que ce soient par les mesures promises par la Ville de Montréal ou par un effort de la part des autres paliers gouvernementaux, cette aide est absolument nécessaire pour permettre à la presse locale de survivre.

Certains diront que cette situation fait partie d’une inévitable transformation de notre société et que les journaux sont chose du passé. Permettez-moi d’être en désaccord avec eux. La presse locale est, et doit demeurer un élément central d’une saine démocratie et doit continuer à être le reflet de nos communautés. Oui nous devons adapter nos manières de faire et nous le faisons. Mais sans aide, nous n’allons pas y arriver. Je pose donc la question. Pouvons-nous courir le risque de voir un large pan de notre précieuse démocratie s’effondrer sous nos yeux ? Personnellement, je ne le crois pas et j’espère ne pas être le seul.

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