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La pandémie a-t-elle mis fin au «small talk»?

Photo: iStock
Geneviève Jetté - Collaboration spéciale

ANALYSE – Le small talk a perdu pas mal de ses lettres de noblesse en 18 mois de pandémie. Avec des «tue-papotage» comme les 5 à 7 virtuels ou les deux mètres de distance à respecter, aurait-on mis fin à ces conversations spontanées pour toujours?

Aurons-nous encore besoin d’aiguiser nos aptitudes à parler-sans-rien-vraiment-dire sous notre masque en discutant de l’indice humidex avec des gens dont on ignore le signe astrologique? Des experts montrent que, même en pleine pandémie, le small talk n’a pas qu’un petit impact dans nos vies.

Le small talk omniprésent

Moins de contacts en chair et en os, moins d’occasions de jasette, croirait-on. Mais en tant qu’êtres sociaux, le small talk est inévitable (nos pensées sont avec vous, les introvertis) et se manifeste même à distance. Oui, même ces quelques minutes à parler des mesures sanitaires avec un collègue sur Zoom, c’est du small talk.

Ces courts échanges «pour faire la conversation» sont restés vivants grâce à… la pandémie. Eh oui! Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort, clairement.

Selon François Cooren, professeur titulaire et directeur du Département de communication de l’Université de Montréal, la crise sanitaire est devenue «la nouvelle météo», un sujet de conversation universel. Aussi commun que la température ou le trafic sur Papineau, la COVID-19 meuble nos silences malgré nos interactions limitées.

Même s’il s’agit d’un sujet plus ou moins léger, c’est notre point de ralliement. C’est dans notre nature de vouloir connecter à tout prix, affirme l’expert.

Important, ce papotage

Des discussions spontanées en croisant un voisin ou un collègue, ce n’est pas seulement anodin; c’est nécessaire. Surtout dans des moments aussi incertains que la pandémie, le small talk crée «un sentiment de confiance et de sécurité» en plus de réduire l’incertitude, assure Catherine Des Rivières-Pigeon, professeure au Département de sociologie de l’Université du Québec à Montréal et doctorante en santé publique et en épidémiologie.

Passons quelques moments à imaginer tous ces trolls qui mériteraient un peu de small talk avec leur bouc émissaire… Ça fait du bien d’imaginer un monde aussi bienveillant, non? Une chose est certaine: la communication informelle est importante, car «ces connaissances permettent d’avoir une communication plus nuancée et plus empathique», rappelle l’experte. Au-delà des anecdotes de coin de table entre deux meetings, Catherine Des Rivières-Pigeon soutient que «juste un sourire peut faire la différence».

Ainsi, il est clair qu’il n’y aura jamais assez d’émojis ou de filtres drôles pour accoter la chaleur d’un contact humain.

Pour papoter looooongtemps

Mais comment conserver ces moments de connexion considérés comme si importants avec la distanciation au travail, par exemple? À long terme, à quoi ressemblera tout ce qui est à distance? Les deux experts s’entendent pour dire qu’il faut un équilibre. «C’est pas un caprice, la vie sociale», renchérit la professeure en sociologie.

Même si la situation actuelle ne se réglera pas du jour au lendemain, les experts croient que les autorités sanitaires doivent considérer le contact humain et remettre la vie sociale dans l’équation lorsqu’ils élaborent de nouvelles mesures. Parce qu’un jour, peut-être qu’on sera capable de se parler d’indice humidex et d’aimer ça.

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